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Tous les jours, ou presque, on apprend que les États-Unis envoient des millions et des milliards de dollars par-ci, par-là, mais où prennent-ils tout cet argent ? Y a-t-il une limite à cet endettement que j’imagine colossal ? On imagine difficilement qu’un jour ils pourront rembourser leur dette…
— Jocelyn Hardy

Les milliards pleuvent en effet au sud de la frontière. Pour l’Ukraine, pour les énergies vertes et pour le secteur des semi-conducteurs, pour ne nommer que quelques exemples récents. D’où vient tout cet argent ? C’est de l’argent emprunté par le gouvernement américain, qui dépense plus que ce qu’il perçoit en revenus. À l’exception de quelques années qui se comptent sur les doigts d’une main, les finances publiques y sont déficitaires et ces déficits s’accumulent.

La dette nationale qui en résulte est, comme vous le dites, colossale. Elle atteint un niveau historique, à plus de 30 000 milliards US (plus de 41 000 milliards CAN). Depuis 2013, la dette publique américaine dépasse la taille de l’économie et elle continue d’augmenter. Y a-t-il une limite et doit-on s’en inquiéter ? On a posé la question à Francis Généreux, l’économiste principal de Desjardins qui s’intéresse de près à l’économie américaine.

On parle beaucoup de la taille de la dette américaine, mais on ne s’en inquiète pas trop encore.

Francis Généreux, économiste principal chez Desjardins

Les États-Unis, première économie mondiale, n’ont aucun problème à financer cette dette, explique-t-il. Les investisseurs du monde entier sont très friands des obligations émises par le gouvernement américain, qui sont liquides et sécuritaires. Le dollar américain règne toujours sur le commerce mondial, ajoute l’économiste, même si on prédit depuis longtemps qu’il sera remplacé par le yuan chinois, la cryptomonnaie ou d’autres devises.

Cette dette croissante coûte aussi de plus en plus cher à financer avec l’augmentation des taux d’intérêt. Lentement mais sûrement, les paiements annuels d’intérêts à ceux qui détiennent des titres de dette se rapprochent actuellement des 1000 milliards US.

Une inquiétude d’abord politique

Francis Généreux souligne que les agences de crédit attirent de temps en temps l’attention sur la dette américaine. Deux d’entre elles, Moody’s et Fitch, ont déjà réduit la cote de crédit des États-Unis. « Mais leur préoccupation porte surtout sur le fonctionnement du gouvernement et sur les désaccords fréquents sur le plafond de la dette qui menacent de paralyser le pays », précise-t-il.

Même le président de la Réserve fédérale américaine (Fed), Jerome Powell, dit publiquement que la dette publique est « insoutenable ». Il a même dit à la télévision qu’« il est temps que nous ayons de nouveau cela dans [le] viseur ». « On peut dire que c’est urgent. »

Il n’y a malgré tout aucun signe d’un coup de barre prochain pour freiner l’augmentation de la dette, soit en dépensant moins, soit en augmentant les impôts, constate l’économiste.

Quant au jour où cette dette pourrait être remboursée, il ne faut même pas y penser, selon lui. « On s’attend à ce qu’un individu, qui a une durée de vie limitée, rembourse ses dettes avant de mourir, mais on ne s’attend pas à la même chose d’un gouvernement qui, en principe, ne peut pas mourir. »

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