Voici comment les cliniques de kétamine défendent leurs approches et répondent aux inquiétudes qu’elles suscitent. Leurs propos ont été adaptés par souci de clarté.

Haven

  • Une clinique née dans les locaux d’un centre de chirurgie esthétique de Westmount, mais en cours de relocalisation
  • Elle a offert de la kétamine en 2022-2023 et annonçait être à la recherche de personnel. Son site est toutefois devenu inaccessible le 22 mars, après un échange avec La Presse. Nous tentions de comprendre sur quoi s’appuyait l’affirmation suivante et n’avons jamais reçu d’explication convaincante : « Nikole Jecen et son équipe hautement spécialisée détiennent une vaste expérience dans l’administration de kétamine par intraveineuse pour traiter la dépression, les idées suicidaires, l’anxiété et d’autres conditions débilitantes. »

Voici ce que nous avait exposé la Dre Jecen avant la disparition de son site.

Subjectivement et objectivement, nous avons constaté une amélioration chez tous nos patients. Nos taux de réussite sont probablement dus à nos critères de sélection rigoureux, à l’accompagnement, aux debriefs/bilans et réévaluations avec notre infirmière, et à l’obligation d’être vu par son thérapeute chaque semaine pendant son traitement à la kétamine. La personne la plus sûre pour soigner un patient recevant de la kétamine est un anesthésiste, car nous sommes des spécialistes des soins anesthésiques, de la gestion de la douleur, de la gestion des voies respiratoires et de la médecine des soins intensifs. Cela explique probablement pourquoi certaines des plus grandes cliniques de kétamine aux États-Unis sont détenues et gérées par des anesthésistes.

Numinus

  • Trois cliniques, à Montréal, Toronto et Vancouver
  • D’après la chaîne, environ 1200 clients reçoivent de la kétamine à Montréal chaque année, sous la supervision d’une infirmière ou bien avec un accompagnement psychothérapeutique (et 6800 autres y reçoivent de la psychothérapie traditionnelle).

Voici ce que nous a exposé la psychiatre Hyehyun Paek, qui évalue les clients de Numinus.

Ce n’est pas parce qu’un médicament ne figure pas aux règles directrices qu’on n’a pas de preuves de son efficacité. Seules les pharmaceutiques ont généralement les moyens de faire les essais cliniques très coûteux qui sont requis pour y figurer, et la kétamine est un vieux médicament qui ne leur rapporte pas grand-chose. Des études faites dans le monde réel démontrent toutefois que la kétamine fonctionne. La sécurité est notre priorité. Une équipe multidisciplinaire procède à un dépistage approfondi et à un suivi étroit. Nous utilisons surtout la kétamine comme outil. Alors nous tendons à prescrire trois séances (plutôt que six à huit), avec deux rencontres de préparation et trois rencontres d’intégration. Certains de nos thérapeutes nous ont dit que deux séances de préparation n’étaient pas suffisantes pour qu’ils connaissent assez bien le client. Idéalement, ce serait plus long, je suis d’accord. Nous en proposons deux pour rendre le programme financièrement accessible à un plus grand nombre de personnes. C’est mieux que rien, ça permet de parler de choses importantes qui peuvent se produire, et de comment optimiser l’expérience. Mais nos clients ont la possibilité d’ajouter des séances. Et nous avons maintenant des groupes de thérapie à la kétamine et des cercles d’intégration gratuits.

Field Trip Health/Canadian Centre for Psychedelic Healing

  • Une clinique à Vancouver et quatre cliniques en Ontario (dont trois fonctionnent sous la marque Canadian Centre for Psychedelic Healing, pour une durée temporaire)
  • D’après la chaîne, environ 600 clients y font de la psychothérapie assistée par kétamine chaque année.

Voici ce que nous a exposé Ian Ruberry, PDG de Field Trip.

Beaucoup de nos clients sont à bout et les ressources en santé mentale sont insuffisantes, comme en témoigne la multiplication de toutes ces cliniques. Lorsqu’il s’agit de soulager la souffrance, on ne doit pas s’en tenir à des normes vieilles de [trois] ans. Depuis ce temps, de nombreuses recherches ont été menées, et nous mettons régulièrement à jour notre Guide des pratiques fondées sur des données probantes. La kétamine toute seule ne permet pas nécessairement d’obtenir un changement durable. Mais avec de la psychothérapie, elle permet de briser des schémas négatifs, car elle déclenche la création de nouveaux liens entre les neurones et change l’état d’esprit. Nos données, publiées dans une revue médicale, montrent que notre méthode a permis de réduire l’anxiété, la dépression et l’état de stress post-traumatique [jusqu’à cinq mois après la dernière séance, chez le petit pourcentage de clients suivis assez longtemps pour le vérifier]. Nous collaborons avec des universités et allons étudier l’effet de nos traitements sur les troubles liés à l’utilisation de stimulants. En cinq ans d’activité, nous n’avons jamais constaté de problème de dépendance à la kétamine.

Braxia Health

  • Quatre cliniques en Ontario, surtout centrées sur l’administration de kétamine
  • D’après la chaîne, de 3000 à 3500 clients y reçoivent de la kétamine chaque année, dont quelques-uns nous ont raconté avoir été laissés à eux-mêmes et que cela leur avait nui.

Voici ce que nous a exposé Edmond Chau, directeur médical de Braxia en Ontario.

Les évènements dissociatifs sont fréquents chez les patients, et ils en sont pleinement informés avant de commencer. Un professionnel est toujours dans la pièce quand des patients reçoivent des traitements par intraveineuse. Ils peuvent être laissés seuls 10 ou 20 minutes pour les traitements sublinguaux, moins intenses. Ils ont un bouton d’appel, et l’infirmière est toujours à proximité et restera avec le patient s’il a une réaction émotionnelle ou le demande. Leur perception du temps et de la réalité étant altérée, des patients ne réalisaient pas ou ne se souvenaient pas qu’un proche était dans la pièce. Notre équipe appelle dans les 24 heures – pour évaluer la tolérance au traitement – et nos psychiatres affiliés font des suivis. Les régulateurs du monde entier nous consultent sur les meilleures pratiques. Nos directeurs ont écrit les lignes directrices canadiennes et internationales sur la kétamine.