(Edmonton) Le budget de l’Alberta est sorti du rouge. Il prévoit un avenir économique prometteur, avec des dépenses importantes dans les hôpitaux, les soins de santé et les programmes pour combler les manques de main-d’œuvre.

Le ministre des Finances, Travis Toews, a déclaré que le budget de 2022 prévoyait un excédent de 500 millions, avec de petits excédents prévus dans les années suivantes.

Sept ans se sont écoulés depuis le dernier budget équilibré de la province et l’excédent représente un revirement profond par rapport aux budgets récents noyés dans des déficits de plusieurs milliards de dollars.

M. Toews affirme que l’économie de l’Alberta se remettra complètement de la récession qui a commencé en 2014 et que la province sera en tête du pays en matière de croissance économique.

La montée en flèche des revenus du pétrole et du gaz est le principal levier, mais des années de mesures d’austérité et une économie diversifiée ont également joué un rôle important, a-t-il déclaré jeudi.

« Sans l’aplatissement de cette courbe des charges d’exploitation, nous ne présenterions pas aujourd’hui un budget équilibré », a-t-il expliqué.

L’excédent prévu est un autre énorme mouvement de balancier pour une province qui, depuis des décennies, surfe sur les hauts vertigineux et les bas souterrains des prix du pétrole et du gaz.

Par exemple, il y a un an, M. Toews prévoyait un déficit de 18,2 milliards pour l’exercice budgétaire qui se termine le 31 mars. Finalement, on s’attend désormais à ce que ce soit une petite fraction de ce montant : 3,2 milliards.

Le gouvernement conservateur uni s’attend à tirer 13,8 milliards des énergies non renouvelables cette année, ce qui en ferait la deuxième prise la plus élevée jamais enregistrée. Les redevances sur les sables bitumineux représenteraient à elles seules 10 milliards.

Le West Texas Intermediate, le prix de référence du pétrole nord-américain, s’échangeait au-dessus de 92 $ US le baril jeudi. La province prévoit une moyenne plus modeste de 70 $ le baril au cours de l’année à venir, tombant dans la fourchette moyenne de 60 $ dans les années suivantes.

« Nous utilisons, je dirais, des projections énergétiques crédibles, mais prudentes », a déclaré M. Toews.

Lorsqu’on lui a demandé si l’Alberta restait sur les montagnes russes des prix de l’énergie, il a répondu : « Ce que je peux dire avec confiance, c’est que nous avons aujourd’hui une réalité budgétaire beaucoup plus durable qu’il y a quatre ans. »

Le budget prévoit 62,6 milliards de recettes publiques totales contrebalancées par 59,4 milliards de dépenses de base. C’est avant les dépenses supplémentaires liées à la COVID-19 et les contrats ferroviaires annulés pour transporter le brut signés par le précédent gouvernement néo-démocrate.

La dette supportée par les contribuables devrait s’élever à 94,7 milliards. Les frais de service de la dette devraient augmenter légèrement pour atteindre 2,7 milliards.

Malgré l’amélioration des résultats, la province prévoit que la dette augmentera au cours des deux prochaines années pour financer les engagements visant à créer des emplois, à faire croître l’économie et à renforcer la capacité des soins de santé.

600 m$ supplémentaires en santé

Le budget ajoute 600 millions au budget de fonctionnement de la santé, un engagement qui passera à 1,8 milliard en 2024-2025.

L’argent servira à financer de nouveaux lits aux soins intensifs, des places dans les hôpitaux, l’agrandissement des laboratoires et des hôpitaux et à aider à recruter plus de médecins et d’infirmières, en particulier pour pourvoir les postes vacants dans les régions rurales et éloignées.

La COVID-19 a mis les hôpitaux et les services d’urgence à rude épreuve et a poussé le système au bord de l’effondrement lors de la quatrième vague à la fin de l’année dernière.

Le premier ministre Jason Kenney a déclaré que la pandémie a souligné les failles d’un système dans lequel l’Alberta paie comparativement plus pour les soins de santé, mais obtient moins en termes d’espace, de lit par habitant et d’autres services. L’argent supplémentaire vise à corriger cette disparité.

La province prévoit également combler les lacunes du marché du travail.

Le gouvernement vise à investir 72 millions au cours des trois prochaines années pour développer les écoles à charte et les programmes collégiaux afin d’accroître les opportunités dans les domaines des sciences, de la haute technologie, de l’ingénierie, des mathématiques et des métiers de l’artisanat.

Il doit y avoir 171 millions sur trois ans pour créer 7000 nouvelles places postsecondaires dans des domaines à forte demande, notamment l’informatique et la science des données, la finance, les sciences agricoles, la santé et l’aviation.

Réactions mitigées

L’opposition a déclaré que le budget n’avait pas répondu aux besoins immédiats des familles accablées par les changements de politique de longue date du Parti conservateur uni qui ont entraîné une hausse du coût de l’électricité, des services publics, des primes d’assurance, des frais de scolarité, et même du camping.

« Le premier ministre est peut-être en train de célébrer, mais pas les familles albertaines, a déclaré Rachel Notley du NPD, jeudi. Il y a des familles et des propriétaires de petites entreprises qui souffrent et ce budget est loin d’être suffisant pour les aider. »

Le budget promet également des remises sur les factures de gaz naturel aux consommateurs. Une remise sur les services publics sera déclenchée à partir du 1er octobre si les prix de l’essence dépassent 6,50 $ le gigajoule.

Mme Notley l’a qualifié de plan fantôme étant donné que les propres prévisions du gouvernement ne prédisent pas que le prix atteindra ce seuil et que le gouvernement n’a pas mis de côté d’argent pour le payer.

L’économiste Trevor Tombe a déclaré que le passage d’un déficit prononcé à un excédent est le plus important de l’histoire de la province. M. Tombe s’est dit surpris par les prévisions conservatrices du gouvernement pour un pétrole en moyenne de 70 $ le baril.

« C’est bien en deçà de ce que les marchés pensent vraiment que les prix du pétrole seront, a souligné M. Tombe, de l’Université de Calgary. Donc, si cela se termine autour de 80 $, là où se trouvent actuellement les marchés à terme, nous pourrions envisager un excédent de l’ordre d’environ 6, voire 6,5 milliards, au lieu des 500 millions relativement modestes. »