(Ottawa) Un YouTuber qui donne des conseils d’investissement a aidé à financer l’évasion de 170 Afghans vers le Canada.

David Lee, un investisseur qui vit au Texas, a aidé un groupe d’Afghans bloqués à se rendre à la frontière pakistanaise après la prise de contrôle par les talibans en août dernier.

Les Hazaras, qui sont arrivés à Calgary plus tôt cette semaine, incluaient des cinéastes, des membres de la communauté artistique afghane et des militants des droits de la personne.

Ils ont fui Kaboul l’été dernier lorsque les talibans ont pris le contrôle du pays, mais se sont retrouvés bloqués à Kandahar, dans le sud de l’Afghanistan, sans argent pour se rendre à la frontière pakistanaise. Ils avaient quelques jours pour atteindre un poste frontalier avant sa fermeture, mais ils avaient dépensé tout leur argent pour fuir la capitale afghane.

M. Lee, qui avait auparavant financé la fuite d’un groupe de 38 Hazaras vers le Pakistan, ainsi que des envois de nourriture vers l’Afghanistan, a été contacté par un Afghan d’une organisation humanitaire aux États-Unis pour savoir s’il pouvait apporter une aide urgente.

Les membres du groupe de 170 personnes ne veulent pas être identifiés par crainte de représailles des talibans contre leurs familles et leurs amis.

Selon la sénatrice Salma Ataullahjan, née au Pakistan et ayant des contacts avec de nombreux Afghans, les talibans ont pris pour cible les militants pour la démocratie et les femmes, ainsi que les musiciens, brisant leurs instruments et les battants. Mme Ataullahjan a dit qu’un musicien afghan professionnel qu’elle connaît a enterré son instrument par peur de persécutions.

Selon un rapport de la BBC, les talibans ont également imposé des restrictions sévères sur ce que les Afghans peuvent regarder à la télévision et ont interdit aux femmes d’apparaître dans des séries télévisées. Le ministère de la Promotion de la vertu et de la Prévention du vice a ordonné aux diffuseurs de ne pas diffuser de films ou d’émissions « contraires aux valeurs islamiques ou afghanes ».

Avec certains de ses abonnés sur YouTube, M. Lee a amassé environ 12 000 dollars américains en quelques heures pour financer les frais de transport en taxi et autres dépenses afin de permettre aux réfugiés de se rendre à un point de passage jusqu’au Pakistan avant la fermeture de la frontière.

M. Lee, qui offre des formations en investissement sur la plateforme YouTube, avait déjà aidé un groupe de 38 Afghans, dont la famille d’un étudiant de l’Université de la Colombie-Britannique, à traverser la frontière pakistanaise. Il a prévenu le contact qui lui avait demandé de l’aide que le groupe n’avait que quelques jours pour quitter le pays avant la fermeture de la frontière afghano-pakistanaise, près de Quetta.

Toutefois, les services d’autocas locaux qui auraient pu les amener à la frontière ont été interrompus après la prise de pouvoir par les talibans.

« Ils voulaient traverser la frontière, mais ils étaient bloqués. Ils avaient utilisé tout leur argent pour se rendre à Kandahar. Les taxis exigeaient des prix dix fois plus élevés que d’habitude. J’avais aidé 38 autres personnes à passer la frontière et je leur ai dit : “ Votre groupe doit se déplacer le plus vite possible ” », a déclaré M. Lee.

J’ai fait appel à mon réseau et à un groupe de personnes qui regardent des vidéos d’investisseurs, et en quelques heures, nous avons obtenu l’argent — il s’agissait d’environ 12 000 dollars pour leurs frais, la plupart pour le transport. Ils ont réussi à sortir juste à temps. Quelques jours plus tard, la frontière terrestre a été fermée.

David Lee

L’argent a été transféré au Pakistan, où un intermédiaire a réussi à organiser le transport du groupe de Hazaras.

Les Hazaras constituent l’une des plus importantes minorités d’Afghanistan et parlent le hazaraqi, un dialecte persan. On les trouve également dans certaines régions d’Iran et du Pakistan, avec une importante population à Quetta. Historiquement, ils ont été persécutés en Afghanistan, notamment par les talibans, principalement pachtounes.

La frontière, près de Quetta, s’est fermée quelques jours après le passage des réfugiés. Selon M. Lee, certains membres du groupe ont failli ne pas réussir à la traverser. Un homme a passé trois jours à la frontière à essayer de persuader les gardes de le laisser passer. Les réfugiés se sont vu confisquer leurs bagages, qui leur ont été rendus du côté pakistanais.

De la frontière, ils se sont rendus à Quetta où ils ont fini par dormir sur le sol d’une salle pour les mariages non chauffée.

À Islamabad, avec l’aide de groupes de défense des droits de la personne, ils ont été dirigés vers le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, qui les a guidés vers le « programme humanitaire spécial » du Canada — l’un des deux mis en place pour aider à faire venir 40 000 réfugiés afghans au Canada. Ce programme est destiné à aider les groupes vulnérables, notamment les militants des droits de la personne, les femmes leaders, les minorités religieuses ou ethniques persécutées, les personnes LGBTQ et les journalistes.

À Islamabad, a indiqué M. Lee, le personnel de l’ambassade canadienne a interrogé les réfugiés et pris des données biométriques avant d’approuver leur immigration au Canada.

Les Hazaras faisaient partie d’un groupe de 252 réfugiés afghans accueillis au Canada par le ministre de l’Immigration Sean Fraser mardi, et étaient les premiers admis dans le cadre du programme humanitaire spécial.

Le lendemain de l’atterrissage de leur avion à Calgary, le chef du groupe a envoyé un message à M. Lee pour lui dire qu’ils sont désormais en sol canadien, en sécurité et en bonne santé.

Le groupe est maintenant en isolement dans un hôtel de Calgary et se rendra à Edmonton lorsqu’il sortira de quarantaine, a précisé M. Lee.

M. Lee, qui vit au Texas, espère se rendre à Edmonton pour rencontrer les membres du groupe lorsque la pandémie sera terminée.

« J’ai été personnellement très heureux de leur arrivée », a-t-il déclaré. « Leurs vies et celles des générations futures seront changées à jamais ».