(Halifax) Des voix se sont élevées pour que le gouvernement fédéral précise ce qui constitue une pêche légale et des centaines de manifestants ont exprimé leur solidarité avec des pêcheurs autochtones, dimanche, après qu’un conflit sur leurs droits eut dégénéré en Nouvelle-Écosse.

Après des affrontements violents survenus dans le sud-ouest de la province, la semaine dernière, un bâtiment où des Mi’kmaq entreposaient leurs prises de homard a été réduit en cendres, tôt samedi.

Ces attaques ont été vivement condamnées et le porte-parole du NPD en matière de pêches a demandé la tenue d’un débat d’urgence à la Chambre des communes lundi.

L’escalade de tensions a aussi poussé des centaines de personnes à se rassembler à Halifax, devant l’hôtel de ville, pour afficher leur soutien aux pêcheurs mi’kmaq.

Devant une bannière sur laquelle on pouvait lire « Respectez les traités, protégez le sacré », plusieurs militants ont pris la parole pour dénoncer la récente flambée de violence.

« Je suis terrifiée », a admis Eleanor Michael, de la première nation de Sipekne’katik, en s’adressant à la foule.

Le premier ministre de la Nouvelle-Écosse s’est tourné vers les réseaux sociaux pour exhorter Ottawa à définir ce qui constitue une pêche légale en vue d’assurer une « subsistance convenable ».

PHOTO JOHN MORRIS, REUTERS

Stephen McNeil a écrit sur Twitter que le ministère fédéral des Pêches doit d’abord trancher la question pour que la province puisse encadrer la vente de produits de la mer.

Les autorités provinciales et fédérales collaborent pour désigner un facilitateur et résoudre ce conflit par un « dialogue dans le respect », a-t-il ajouté.

M. McNeil y est allé de cette déclaration après qu’un entrepôt eut été la cible d’un incendie suspect à Pubnico-Ouest, tôt samedi. Des prises de homard de pêcheurs mi’kmaq sont ainsi parties en fumée.

Quelques jours plus tôt, deux affrontements impliquant des centaines de personnes ont éclaté devant des installations utilisées par les pêcheurs autochtones.

La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a procédé à deux arrestations, l’une pour voie de fait contre un chef autochtone et l’autre pour l’incendie criminel d’un véhicule.

Un homme qui lutte toujours pour sa vie à l’hôpital est considéré comme une personne d’intérêt dans le cadre de l’enquête sur l’entrepôt de homard incendié tôt samedi.

Le premier ministre Justin Trudeau s’est dit « atterré par les actes de violence, d’intimidation et de destruction qui ont lieu en Nouvelle-Écosse ».

« Les auteurs devront répondre de leurs actes », a-t-il écrit sur Twitter, en disant avoir pour objectif « d’assurer la sécurité de tous ».

En réponse aux tensions grandissantes, le ministre fédéral de la Sécurité publique, Bill Blair, a accepté une demande du procureur général de la province pour renforcer la présence de la GRC.

Le chef Mike Sack de la première nation de Sipekne’katik a salué les ressources policières supplémentaires, mais croit que ces renforts auraient dû être déployés plus tôt pour éviter toute « la destruction, les comportements racistes, le harcèlement et l’intimidation ».

Il s’est néanmoins réjoui du fait que les policiers fédéraux profiteront de renforts « en ces temps extrêmement bouleversants pour nous tous ».

Des pêcheurs non autochtones sont frustrés par la pêche au homard « autoréglementée » lancée en dehors de la saison prévue par la réglementation fédérale, qui doit débuter vers la fin du mois de novembre.

La Cour suprême du Canada a statué en 1999 que les peuples mik’maq et malécite du Canada atlantique et du Québec ont le droit de pêcher où et quand ils le souhaitent, en vertu de traités signés par la Couronne au 18e siècle, dans le but d’assurer un « moyen de subsistance convenable ».

Plusieurs détracteurs non autochtones citent une clarification publiée quatre mois après l’arrêt selon laquelle les droits issus de ces traités sont tout de même assujettis aux règles fédérales.

Des pêcheurs commerciaux se sont dits préoccupés par l’impact sur les stocks de homard.

Les saisons de pêche sont toutefois fixées en fonction de considérations commerciales, objecte-t-on, et les activités à petite échelle des Autochtones ne nuisent pas à la population de crustacés.

Le conflit s’est envenimé à un point où le dirigeant de l’Union des pêcheurs des Maritimes a quitté son poste, par crainte pour la sécurité de sa famille.