Pour obtenir un permis d’études au Québec, un étudiant étranger doit prouver qu’il a au moins 25 000 $ dans ses poches pour payer ses droits de scolarité et avoir de quoi se nourrir et se loger. Pas toujours facile quand on vient d’un pays où le niveau de vie est bas. La Presse a rencontré plusieurs étudiants qui doivent se démener pour joindre les deux bouts.

« Je crois que la chose la plus difficile pour un étudiant international qui arrive ici, c’est l’accompagnement, affirme Cielos Ferreyra. Il n’y a pas d’accompagnement. On se sent très seul. »

Originaire de Buenos Aires, en Argentine, l’étudiante de 31 ans est arrivée au Québec avec son mari en avril 2022 pour faire un DEC en administration des affaires dans un collège privé de Montréal, le Collège Canada. Elle a suivi des cours en français en ligne pendant six mois avant de venir.

« J’ai travaillé très, très, très fort », dit-elle.

Pour obtenir un permis d’études, elle devait prouver au gouvernement fédéral qu’elle avait la capacité financière de payer ses droits de scolarité et de subvenir à ses besoins et à ceux de son mari pour toute la durée de son programme. « Je devais avoir 50 000 $ en banque », précise-t-elle.

En Argentine, Cielos Ferreyra, qui a fait des études universitaires, travaillait en ressources humaines pour une entreprise de transport.

Pourquoi le Québec ? Et pourquoi un DEC ? « C’était important pour moi de vivre une expérience différente, répond-elle. J’aime le mélange des gens, les langues, le français, l’histoire du Québec. Mais depuis que je suis arrivée, j’ai peu parlé avec des Québécois. Au Canada College, il y a des gens de partout dans le monde, mais pas du Québec. »

Cielos compte demander un permis de travail post-diplôme d’une durée de trois ans. « Après, dit-elle, on verra. »

Son mari, en plus de suivre des cours de francisation à temps plein, travaille le soir dans une entreprise de nettoyage. Cielos, elle, est superviseure à la banque alimentaire du Café latino, où elle prend elle-même un panier par semaine.

Le Café latino distribue 45 paniers d’aliments par jour, sept jours sur sept.

« Pour les étudiants seuls, les loyers et les frais de scolarité, c’est beaucoup d’argent. Tous les jours, tout le temps, les étudiants cherchent des moyens de gagner de l’argent. Ils travaillent samedi, dimanche. Il y a beaucoup de mes collègues d’école qui travaillent la nuit. »

Ici pour s’améliorer

Pour subvenir à ses besoins, Inès, elle, travaille quatre jours par semaine, dont deux de nuit, comme réceptionniste dans un immeuble résidentiel du centre-ville.

L’Algérienne de 26 ans est inscrite à la maîtrise à l’École de technologie supérieure (ETS), où elle entreprend sa deuxième année. Ses droits de scolarité sont de plus de 20 000 $ par an.

La plupart des étudiants à la maîtrise sont des étrangers. Il y a beaucoup de Marocains et de Français.

Inès, 26 ans, étudiante à la maîtrise en génie des réseaux de télécommunications à l’ETS

En plus d’un baccalauréat, Inès a déjà fait une maîtrise en génie dans son pays.

« Je suis venue ici pour m’améliorer », précise l’étudiante.

Va-t-elle demander la résidence permanente à la fin de ses études ? « Ça dépend. Au début, je ne voulais pas rester. Et maintenant, moitié-moitié. »

Inès habite seule dans un trois et demie, près du métro Langelier. Son loyer est de 750 $ par mois.

« Si je n’arrive pas financièrement, je peux demander à mes parents de m’aider, précise-t-elle. Mais je ne veux pas parce qu’il y a une grande différence entre les dinars et les dollars. J’aime mieux travailler quelques jours de plus. Le salaire moyen d’un mois en Algérie, c’est le salaire qu’on fait ici en quatre ou cinq jours. »

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Dan Nguyen rêve d’ouvrir un jour son propre café.

Ouvrir son café

Dan Nguyen, 29 ans, a aussi appris à se débrouiller seule.

Originaire du Viêtnam, elle est arrivée au Canada, en 2016, avec un permis d’études pour suivre un cours dans un collège privé ontarien. Au bout d’un an, elle a déménagé à Montréal pour étudier en hôtellerie au Collège LaSalle. Droits de scolarité : 22 000 $ par an.

« Au départ, dit Dan en français, je ne parlais ni anglais ni français. »

À son arrivée à Montréal, elle a trouvé une « petite chambre avec un lit », près du Collège LaSalle, à 600 $ par mois, où elle est restée deux ans. « Ce n’était pas cher, mais c’était vraiment petit, il n’y avait rien là-dedans », lance-t-elle.

Son but, en demandant un permis d’études, était clairement d’immigrer au Canada, reconnaît Dan, qui a fait un baccalauréat en biotechnologie au Viêtnam.

Son plan, une fois qu’elle aura la résidence permanente au Québec, est de s’inscrire à l’université en finance, puis d’ouvrir son propre café à Montréal.

En attendant, elle cumule deux emplois, l’un dans un restaurant, l’autre dans un café. En plus de ses dépenses, elle doit couvrir celles de sa petite sœur, venue elle aussi étudier à Montréal.

Colombie, Corée, Québec

Laura Villa, elle, vient de Colombie. Elle est arrivée au Québec avec son mari en avril 2021 pour faire un DEC en gestion au Collège LaSalle dans le but de vivre ici. « Oui, je suis venue comme étudiante pour faire ma vie au Québec », dit-elle.

En Colombie, Laura a étudié en management du sport à l’université. Puis, elle a fait une maîtrise dans le même domaine à Séoul, en Corée du Sud.

« J’ai vécu dans différents pays, explique-t-elle. Ici, c’était plus difficile à cause du français. J’aime le français, mais ça rend l’intégration plus difficile et plus longue. C’est dur sur le plan émotif, psychologique et financier. Il faut faire des compromis. Mais j’ai eu de l’aide. Après deux ans, je peux dire que ça va bien. »

En savoir plus
  • 46 %
    Proportion de résidents temporaires qui sont titulaires d’un permis d’études au Québec
    Source : Institut du Québec