C’est dans le métro de Montréal que l’on compte le plus grand nombre d’interruptions de service causées par la clientèle dans le monde entier, révèlent des données internationales. Celles-ci mettent de nouveau en relief l’importance d’un futur système de portes palières, qui est toujours sur la glace.

Tout près de 52 % des pannes qui surviennent dans le métro montréalais sont en effet dues à des passagers ou des employés. C’est ce que montre un document évaluant la « performance en contexte international » de la Société de transport de Montréal (STM) datant du 13 février, obtenu en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics.

La moyenne des métros membres du groupe COMET, composé de 45 métros métropolitains dans 41 villes, est nettement plus faible, à 27 %. En Europe et en Amérique du Nord seulement, ce chiffre est de 40 %.

Parmi les métropoles comparables dans le monde, la société de transport est l’une des seules à ne pas disposer d’un système de portes palières, soit des portes automatiques le long des quais, empêchant des accidents ou des suicides. « On est une espèce en voie de disparition », illustre le conseiller corporatif en relations gouvernementales du transporteur, Simon Carreau, en entrevue.

On sait que tout le monde en voudrait, des portes palières. Mais c’est une question de priorisation. Il faut d’abord assurer la bonne santé des infrastructures existantes.

Simon Carreau, conseiller corporatif en relations gouvernementales à la STM

M. Carreau déplore que les sommes destinées au maintien des actifs « ont reculé de 20 % depuis cinq ans au gouvernement ». « On ne va pas dans le bon sens pour aller vers les portes palières », dit M. Carreau.

D’après lui, la forte majorité des métros disposant d’un tel dispositif « l’ont implanté dès le départ », un peu comme le Réseau express métropolitain (REM). « En installer sur un réseau existant, ça demande beaucoup plus de travail et de ressources », note-t-il.

Un effet immédiat

Officiellement, l’idée d’équiper le métro montréalais de portes palières avait été suspendue en 2022 en raison du contexte financier difficile des sociétés de transport. Environ 200 millions avaient été promis par Québec pour réaliser ce projet.

Dans son plus récent budget, la STM a toutefois inscrit une somme de 5 millions « destinée à l’étude du projet vers 2032 », afin de tenir compte de la reprise estimée de l’achalandage et de projets majeurs futurs, comme le prolongement de la ligne bleue vers Anjou et le Projet structurant de l’Est (PSE).

Selon le directeur planification, opération bus et métro de la STM, Patrick Hamelin, un système de portes palières ferait probablement en sorte de diminuer le nombre de pannes liées aux usagers de 52 % « à autour de 30 % ».

« On serait capables de diminuer presque de moitié le nombre d’incidents clients, et vraiment avoir un impact d’importance. Tous nos incidents les plus longs, comme des tentatives de mort violente, des intrusions en tunnel, ça baisserait de façon draconienne », soutient-il.

À ce jour, la fiabilité générale du métro demeure cela dit assez respectable. La STM est jusqu’ici classée 16e sur une trentaine de métros évalués sur la proportion de déplacements métro réalisés sans retard, à savoir en cinq minutes et moins.

En Amérique du Nord seulement, la société montréalaise se classe deuxième dans ce palmarès. « On se doute qu’en bas de nous, c’est majoritairement des systèmes avec des portes palières, justement », note M. Carreau.

L’urgence de remplacer les MR-73

Sur un total de 40 métros analysés, celui de Montréal arrive par ailleurs 22e en matière de fiabilité du matériel roulant, soit la distance moyenne parcourue entre chaque panne. Depuis 2020, on constate une baisse de la fiabilité des équipements, en grande partie en raison du vieillissement des trains MR-73.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Wagon de métro MR-73 en cours d’entretien

Ces derniers peuvent rouler en moyenne 150 000 kilomètres avant de causer une panne majeure. Les nouveaux trains Azur, quant à eux, vont jusqu’à 1,5 million de kilomètres.

Bref, le temps presse, surtout que les trains MR-73 arriveront à la fin de leur vie utile d’ici 2036. « Ce qu’on demande au gouvernement, c’est de lancer les études. La cloche est sonnée et il faut commencer ce projet-là », lance à ce sujet la directrice générale de la STM, Marie-Claude Léonard.

Son groupe estime le projet de remplacement de ces trains à 2,9 milliards seulement pour l’acquisition de nouveaux trains Azur.

Un autre milliard devrait aussi être affecté au remplacement des équipements dans les garages d’entretien et au système de contrôle des trains.

Pendant ce temps, le réseau d’autobus, lui, aura « surtout besoin de ponctualité à court terme », dit Mme Léonard. Selon les documents, un bus montréalais arrive à l’heure 81,4 % du temps. Un bus parcourt en moyenne de 17 à 18 kilomètres par heure de service, bon pour le 7rang sur 16 sociétés comparables.

Ce chiffre est toutefois en constante baisse depuis 2014, ce qui accroît les coûts d’exploitation. Ultimement, un retour à une vitesse commerciale des niveaux de 2014 permettrait même des économies de 22,5 millions, selon la société, qui misera sur la multiplication des voies réservées aux autobus pour s’en rapprocher le plus possible.

Avec William Leclerc, La Presse