Sophie Brisson, qui dépend du transport adapté de la Société de transport de Montréal (STM) pour se déplacer, voulait seulement s’abonner au programme OPUS à l’année pour simplifier le renouvellement de sa carte mensuelle. Elle s’est retrouvée prise dans un chaos administratif qui lui a causé deux mois de stress et d’anxiété.

En situation de handicap, Sophie Brisson est paralysée du côté gauche depuis la naissance. Comme sa mobilité est réduite, elle se déplace en transport adapté pour ses activités quotidiennes. « C’est comme un métro, mais individuel. Il faut que tu aies ta passe mensuelle ou un billet », nous explique en entrevue Pascale Barrette Brisson, la sœur de Sophie, qui s’occupe de la gestion de son transport adapté.

Le 22 mai dernier, Pascale Barrette Brisson décide d’abonner sa sœur au programme OPUS à l’année. Elle était alors loin de se douter qu’elle serait entraînée dans des méandres administratifs découlant d’un manque flagrant de communication. « Une chance que moi, je suis là, parce que si je n’avais pas été là, qu’est-ce que Sophie aurait fait ? », lance Pascale Barrette Brisson.

Le titre est censé entrer en vigueur le 1er juillet, et la carte doit être expédiée par la poste. Le montant du laissez-passer du mois de juillet est prélevé du compte bancaire de Sophie Brisson le 11 juin. Mais presque un mois plus tard, aucune carte en vue.

Le 19 juin, Pascale Barrette Brisson envoie un premier courriel à la STM pour signifier le problème. Une employée lui répond, quelques minutes plus tard : « Nous ne sommes que le 19 juin, la carte arrivera pour le 1er juillet », peut-on lire dans son courriel.

Le 22 juin, Pascale Barrette Brisson relance la STM. On lui dit d’attendre. Encore.

Cauchemar à la station Saint-Michel

Mais le 28 juin, soit trois jours avant le 1er juillet, toujours pas de carte. Et c’est là que la situation se complique. Depuis le 26 juin, exo – Réseau de transport métropolitain est responsable de la gestion et du service à la clientèle du programme OPUS à l’année.

Pascale Barrette Brisson décide donc de lancer un coup de fil au service à la clientèle d’exo, le 29 juin en fin de matinée. L’employée lui indique que sa sœur peut se présenter à n’importe quel Espace Clients de la STM, dont la station de métro Saint-Michel, la plus pratique pour Sophie Brisson. On lui assure que les employés de la STM sur place ont en main une liste de toutes les personnes dans la même situation et que Sophie pourra recharger sa carte OPUS ou alors qu’une carte temporaire lui serait remise.

À 14 h le jour même, Sophie Brisson se rend donc à la station Saint-Michel. Les employés, qui ne sont pas au courant de l’existence de la liste mentionnée par exo, refusent de recharger sa carte OPUS.

Je sentais qu’on ne voulait pas m’aider. Tu sais, moi, je n’aurais pas traité quelqu’un comme ça. Si j’avais le choix, j’aurais une voiture.

Sophie Brisson, en entrevue avec La Presse

À ce moment, Sophie Brisson téléphone à sa sœur, qui communique immédiatement avec le service à la clientèle d’exo. Pendant que Pascale Barrette Brisson est en ligne avec exo, elle reçoit un appel du contrôleur de la station Saint-Michel. Il l’informe que sa sœur, qui a une déficience intellectuelle légère et se désorganise en situation de stress, est en crise. « Il m’a dit : “Votre sœur est là. Elle est énervée. Moi, je suis là pour la sécurité. Si votre sœur reste énervée, je vais appeler le SPVM” », nous raconte Pascale Barrette Brisson.

À ce sujet, la position de la STM, fournie par écrit, indique qu’ils « n’ont retrouvé aucun rapport d’incident ou d’intervention dans leurs registres et ne peuvent donc corroborer la situation décrite par Pascale B. Brisson ».

À la suite de l’évènement, Pascale Barrette Brisson envoie un courriel à exo pour déposer une plainte officielle. « Ceci constitue des menaces envers une personne vulnérable et handicapée vivant un préjudice lié à des informations erronées qui lui ont été fournies par le service exo », peut-on y lire.

Après le chaos, un dénouement

Malgré ses démarches acharnées, Pascale Barrette Brisson estime ne pas avoir reçu de suivi adéquat.

Ce qui a changé quand La Presse a joint exo mardi.

Moins de 24 heures plus tard, Pascale Barrette Brisson a finalement eu des nouvelles d’exo, qui lui a promis de trouver une solution. Elle trouve déplorable qu’il ait fallu un appel de La Presse pour avoir enfin réponse à ses questions.

Eric Edström, conseiller des relations médias chez exo, affirme que ce n’est pas le coup de téléphone d’un journaliste qui a mené à la prise de contact avec la famille Brisson. « Je trouve ça dommage que vous présumiez que ce soit l’appel de La Presse qui a enclenché les démarches », dit-il en entrevue.

Il maintient que c’est un problème de communication entre exo et Pascale Barrette Brisson, et non entre exo et la STM.

Sophie Brisson a finalement reçu sa carte OPUS vers la fin de la semaine. Bien que la demande ait été faite le 22 mai, la STM ne l’a expédiée que le 29 juin.

La STM a confirmé à La Presse que « la carte de la cliente a été postée plus tardivement qu’à l’habituel, soit le 29 juin dernier », évoquant un délai administratif. Cette information n’a jamais été communiquée à Pascale Barrette Brisson, ce qui aurait pourtant pu apaiser la situation.

« C’est incroyable, le peu de choses qu’il y a pour rendre la vie des personnes handicapées facile, estime Pascale Barrette Brisson. Tout est une bataille. Tout est compliqué. »