Il y a quelques jours, sur les réseaux sociaux, j’ai demandé aux lecteurs de me raconter comment ils avaient vécu l’année qui s’achève. Voici, en vos mots, comment vous avez vu l’actualité de l’année 2022.

MÉLANIE ALAIN : « Ce qui m’a marquée en 2022, c’est la faim chez les Québécois. Petits et grands. Je suis chef exécutive à La Grande Table à Sherbrooke et, dans la dernière année, nous avons une augmentation de 30 à 35 % du nombre de repas servis. C’est 650 enfants qui mangent gratuitement le midi ou à très faible coût. Et près de 300 repas congelés par jour vendus à 1 $. Ça fait beaucoup pour une petite ville comme Sherbrooke, et la demande ne fait que continuer d’augmenter. »

MÉLANIE ALBERT : « L’année où dans ma classe, mon sac de collations se vide à vue d’œil, où les boîtes à lunch des élèves sont de plus en plus vides, où le bac de fruits dans le corridor n’a jamais été si populaire et que même les pommes abîmées et les oranges et bananes imparfaites trouvent preneurs. »

DANNY CARON : « L’inflation parfois injustifiée qui vient de partout : propriétaires de logement, grandes bannières d’épicerie et sans oublier nos fameuses pétrolières. »

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

L’inflation est un sujet qui a marqué beaucoup de nos lecteurs en 2022.

MARIEJO LEDUC : « Un seul mot : pénurie. En plus, on peut se le faire à toutes les sauces : pénurie de travailleurs de la santé, de personnel scolaire, de médicaments pour nos enfants, de lait pour nos bébés… Et pénurie de jugement et d’humanité quand on regarde ce qui se passe en Ukraine ou en Iran. »

MARTINE DESJARDINS : « Une année qui nous a frappés de plein fouet avec les droits des femmes si chèrement acquis complètement bafoués, une guerre insensée, des changements climatiques perturbants et un climat économique incertain où nos banques doivent forcer une récession. »

CHANTAL FONTAINE : « La bataille sans fin pour les droits des femmes. Iran, Afghanistan et dans tant d’autres pays, où la femme fait peur manifestement. Sinon pourquoi travailler si fort à la réduire aux seules fonctions de procréatrice et de torcheuse en chef ? Et n’oublions pas tous les féminicides et abus qui n’exemptent pas nos pays dits développés. Quand des messieurs aux USA veulent restreindre le droit à l’avortement, pas besoin de chercher bien longtemps pour savoir qui en subira les effets… »

HOUSSEIN BEN-AMEUR : « Année post-COVID-19, l’inflation, l’Ukraine, l’implosion des cryptomonnaies et l’intelligence artificielle générative (Dall-e et ChatGPT) : un moment aussi significatif que le premier iPhone. »

NORMAND BÉLISLE : « L’invasion de l’Ukraine »

OLEG KOLEBOSHYN : « Il est certain que la guerre en Ukraine a marqué le plus l’année pour moi. C’est l’année où j’ai perdu complètement la confiance en l’humanité… Et où je l’ai regagnée par la suite ! J’ai perdu confiance à cause des Russes, mais je l’ai regagnée grâce aux gens qui m’appuient dans mes projets d’aide aux Ukrainiens. C’est aussi l’année de la fierté. La fierté de mon peuple ukrainien. Et la fierté d’être un Ukrainien ! C’est la fierté de mon peuple québécois et la fierté d’être un Québécois. »

JANICK GAGNON : « Volodymyr Zelensky »

PHOTO FOURNIE PAR LA PRÉSIDENCE UKRAINIENNE, AGENCE FRANCE-PRESSE

Le président de l’Ukraine, Volodymyr Zelensky, remettant une médaille à un soldat, à Bakhmout, le 20 décembre dernier

STEVE PROULX s’est surtout senti impuissant : la Russie qui agresse l’Ukraine, une CAQ qui ne fait pas rêver, le climat qui se dégrade. « Mais on a quand même réglé une injustice majeure : les personnes non binaires ont maintenant leur pronom. Et on a enfin éliminé les catégories genrées aux Gémeaux. On se dit, laissons-nous donc inspirer par la jeunesse… et puis bon. Il y avait bien Greta, qui semble si loin. Une autre époque. La jeunesse veut canceller l’histoire, éliminer les mots qui sont pas gentils et inclure tout le monde au grand bal des différences. C’est bien parfait. À vrai dire, j’aurais pensé que cette génération aurait été galvanisée par d’autres combats que celui de vouloir imposer à notre société le code de vie d’une prématernelle d’une école alternative. Je me suis trompé. Comme je le disais, en 2022, je me suis senti impuissant. »

MARILOU DAVID : « Moi, c’est l’année où j’ai appris à écrire avec l’écriture inclusive spontanément et c’est rendu que ça me fait mal aux yeux de lire quelqu’un que je respecte ne pas l’utiliser. Le masculin l’emporte ? Pu jamais ! »

LYSANE : « En 2022 ? L’écriture inclusive et épicène ! En français et en anglais ! Après 3 jours de formation intensive, de réunions et discussions à n’en plus finir, je n’en peux plus ! Et c’est même pas terminé ! »

MARYLINE LÉVESQUE : « Pour moi, l’année 2022 fut l’année des wokes et de la polarisation des idées. Ceci se termine avec la suppression des genres pour les trophées des Gémeaux, le summum du wokisme. »

MARTIN LÉVESQUE : La dégenrisation de toute : la fée des Étoiles, des contes pour enfants, des Gémeaux. Une femme trans en prison pour femmes. Le CRTC et le mot en N à Radio-Canada. Le manque de jugement serait-il devenu la nouvelle vertu citoyenne ? »

LÉA ALICE, femme trans, a répondu à Martin Lévesque sur ma page Facebook : « Finalement, tu veux qu’on glorifie la mentalité ultraconservatrice ? »

PIERRE-YVES McSWEEN : « L’année où les crypto boys ont pris leur trou. »

VALÉRIE GARCEAU : « Ma voisine douce et gentille que j’adore est venue cogner à ma porte, au nom d’Éric Duhaime qu’elle appuyait aux élections. J’étais bouche bée, je n’ai pas été capable d’être polarisante. J’ai bêtement souri et je lui ai dit que j’admire les gens qui s’impliquent. Difficile d’être clivante, face à face. Je savais que les agitateurs comme Duhaime recrutaient des gens naïfs, mais là, c’était ma douce voisine qui n’est pas une imbécile. Nous avons même bien des choses en commun. La pandémie m’a polarisée et ce n’est pas la façon que l’on va pouvoir affronter les prochaines épreuves que le climat va faire vivre à l’humanité. »

THOMAS : « Pour moi, l’année 2022 au Québec c’est le moment où on a (enfin) collectivement pris conscience de la fragilité du français chez nous. »

JULIE BIBEAU : « Ça aura été l’année des conditions pitoyables dans nos écoles. Manque de ressources, bâtiments qui tombent en ruine, du constat des conséquences de l’école à la maison, des profs qui tombent comme des mouches et de la constante augmentation de la charge de travail des profs. Sur une note presque positive, le bunker dans lequel je travaille, au cœur du quartier Saint-Michel, aura enfin des fenêtres qui n’ouvriront pas ! J’espère que ce peu de lumière dont nous bénéficierons saura remonter le moral des troupes. Des élèves surtout, qui sont issus de milieux ultradéfavorisés, qui doivent conjuguer avec la misère à la maison, le manque de services à l’école et la violence palpable dans le quartier. Ça fait 12 ans que je travaille avec cette belle jeunesse et mon cœur souffre pour eux au quotidien. »

ELISABETH BISAILLON, impliquée en hockey féminin : « En voyant les scandales de Hockey Canada, je me suis rendu compte que c’était pour cela qu’ils disaient ne pas avoir d’argent pour le hockey féminin et pour le parahockey féminin : l’équipe nationale féminine de parahockey n’est toujours pas reconnue et soutenue par Hockey Canada… Mais l’équipe nationale masculine, oui. Malgré tous les efforts que l’on peut faire, si le sommet de la pyramide est pourri, on ne pourra pas aller plus loin. »

PHOTO ARCHIVES REUTERS

Des Afghanes manifestent contre la fermeture des universités aux femmes, à Kaboul, le 22 décembre dernier.

CHLOÉ : « J’enseigne en francisation et j’ai une étudiante qui vient d’Afghanistan. Elle était au primaire quand les talibans sont débarqués et l’ont empêchée d’étudier. Et le cauchemar s’est reproduit une autre fois. Dans les pauses, elle appelle en Afghanistan et j’ai pu saluer quelques membres de sa famille. Des femmes qui ne peuvent pas sortir de la maison sans être accompagnées. Dire la chance et l’émotion que je ressens d’être femme, ici, et de pouvoir non seulement étudier, enseigner mais transmettre aussi à ceux qui ont eu moins de chance que moi. »

PIERRE JACQUES : « Ce fut une année de guerre, de faux départs, de stagnation, de vouloir se sortir de notre misère… Et de voir l’inflation, Omicron, les riches sans conscience : Elon, Trump, Poutine et compagnie mener la vie comme s’ils savent, savaient et sauront… »

HAJAR FILALI : « Mon année a été difficile, des hauts et des bas… Mais ce dernier mois avec la Coupe du monde et ce que le Maroc a accompli, c’était merveilleux, euphorique ! Tu sais quand tu te réveilles le matin et tu as déjà le sourire et tu es content à l’intérieur, c’est ce que les Marocains ont vécu pendant le dernier mois, un beau rêve. »

MARC-ANDRÉ BEAULIEU : « L’année 2022 : celle où j’ai eu honte pour la première fois de toute ma vie d’être camionneur, après avoir vu la crise du bacon des libarteux à Ottawa l’hiver passé alors que dans notre métier, il y a plus de camionneurs vaccinés, proportionnellement, que l’ensemble de la population. C’est aussi l’année de la consternation avec ce qui se passe en Ukraine et des phénomènes météo extrêmes. »

E., une Autochtone qui ne veut pas être identifiée publiquement : « J’ai vécu le racisme toute ma vie. Et ce qui m’a éblouie, c’est la solidarité de la société civile face aux droits des Premières Nations. Je parle de grandes entreprises qui deviennent alliées et vont à l’encontre du discours politique. Pour moi c’est un grand pas. »

LOUISE DUGAS : « Ce fut l’année de bien des drames : la guerre en Ukraine, la répression en Chine et en Iran, la crise en Afghanistan encore, les féminicides. Mais d’un point de vue personnel, ce fut l’année où j’ai senti “physiquement” que la planète allait vraiment mal. Un sacré choc. Il faisait 32 degrés lorsque je suis arrivée à Dawson City, Yukon, et 31 lorsque j’ai mis les pieds à Fairbanks, en Alaska, en plein mois de juillet. C’est là-bas qu’aurait dû avoir lieu la COP15. »