Trois aliments sont particulièrement associés à l'Île-du-Prince-Édouard: la pomme de terre, le homard et les moules.

Des chercheurs de l'école de gestion de l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard sont parvenus à cette conclusion après avoir sondé le coeur de milliers de gourmands. Le but de l'exercice: mettre en valeur les atouts gastronomiques de la province pour attirer de plus en plus de visiteurs. Par le ventre.

Décidément, le tourisme gourmand gagne du terrain partout.

Selon l'Association internationale de tourisme culinaire, depuis la naissance du tourisme gourmand, qui est devenu une véritable industrie au début des années 2000, certaines destinations ont fait leur apparition parce qu'elles avaient misé sur leurs atouts agricoles et gastronomiques.

 

Au Québec, les régions jouent de leurs charmes gastronomiques à des fins touristiques. Cette semaine, Gaspésie gourmande a lancé son répertoire annuel de producteurs, un guide qui permet au visiteur d'aller chercher son saumon directement au fumoir ou sa bière chez le brasseur. Et ça marche!

«Certains de nos membres nous disent que 75% de leurs clients arrivent avec le magazine dans les mains», raconte Audrey Simard, directrice du regroupement de producteurs et artisans de la table gaspésiens.

L'étude de l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard conclut justement que les touristes souhaitent rapporter à la maison des produits de la région qu'ils visitent. Ils recherchent aussi des restaurants où les produits locaux sont en vedette et visitent les marchés paysans.

Charlevoix, qui a toujours misé sur ses produits du terroir, vient de passer à l'étape suivante: aller chercher le gourmand chez lui et l'attirer dans la région.

«Il faut que les gens se disent qu'ils doivent absolument venir voir ce qui se passe ici», explique le directeur de la MRC Charlevoix-Ouest, Guy Néron.

Comment les en convaincre? En présentant les produits ensemble dans les supermarchés. Des comptoirs Saveurs Charlevoix commencent à pousser un peu partout en province. On y trouve des rillettes de veau, du confit d'oignons, du cassoulet de canard et autres délices du terroir.

Éventuellement, des chefs de la région iront sur place, explique Jean-Robert Audet, de l'entreprise Veau Charlevoix, qui coordonne le projet.

«Chaque année, 880 000 touristes débarquent dans Charlevoix, dit-il. Notre but est de leur dire qu'ils pourront retrouver nos produits lorsqu'ils seront de retour chez eux.» Pour mieux revenir.

Les producteurs de Charlevoix ont la chance d'avoir un appui de taille: leurs politiciens. La MRC suit de près le projet Saveurs Charlevoix. Parce que les côtelettes de veau et pleurotes marinés peuvent aussi être un outil de promotion touristique. «Dans Charlevoix, les produits de créneau sont très porteurs, dit le directeur Guy Néron. La région les a toujours mis en valeur; les autres régions ont emboîté le pas.»

C'est vrai. Si vrai que Charlevoix pourrait bien avoir de la concurrence dans les supermarchés.

Cette semaine le regroupement Savoir-faire de l'île d'Orléans a lancé son «Alerte récolte», un service de courrier électronique qui avertira les consommateurs des récoltes de l'île. Mais les producteurs insulaires ont aussi le désir de s'exporter.

Des épiceries de leur région affichent déjà le logo Savoir-faire, mais le groupe espère percer le marché ailleurs au Québec et compte même installer des présentoirs regroupant leurs produits dans de grands marchés montréalais.

Entre la route des vins de l'Estrie et celle des cidres de la Montérégie; entre les parcours du paysan d'une région et le gourmand de l'autre, le coeur du gourmet balance.

Tant mieux s'il y a de la concurrence, dit Jean-Robert Audet, de Charlevoix. D'abord, cela ne fait que multiplier l'offre pour les consommateurs urbains, qui sont bien loin du producteur, dit-il. Et cela crée de l'émulation: chaque région est désormais forcée de faire plus original que l'autre.

Même réponse en Gaspésie. Oui, c'est une saine concurrence, dit Audrey Simard. «Mais on est quand même la seule région du Québec qui offre à la fois des produits de la mer, de la forêt et de la terre», ajoute-t-elle.