En offrant au jeune gardien Cayden Primeau un contrat garanti de trois ans, on le désigne ni plus ni moins, malgré le salaire somme toute modeste, comme le successeur potentiel de Carey Price.

Et dans le monde du Canadien, on fonctionne généralement comme en monarchie avec ses gardiens : très rarement va-t-on piger ailleurs pour combler le trône.

Entre le début de carrière de Jacques Plante en 1953 et la fin du règne de Ken Dryden en 1979, seul Lorne Gump Worsley a été arraché à une autre équipe, les Rangers de New York.

Dryden a été repêché par les Bruins de Boston en 1964, mais il n’a jamais été attaché à cette organisation. Il a été échangé au CH à 16 ans et a entrepris sa carrière sept ans plus tard.

Après Dryden, on a assisté à un bref carrousel de gardiens, Denis Herron, en provenance de Pittsburgh, Michel Larocque, l’auxiliaire de Dryden, Rick Wamsley, puis Steve Penney, le héros du printemps 1984.

Puis Patrick Roy est arrivé. Son règne a duré onze ans, avant qu’il ne soit tristement échangé à l’Avalanche du Colorado pour le jeune Jocelyn Thibault, qu’on a placé dans une situation impossible.

Le véritable dauphin de Roy, José Théodore, a été repêché en deuxième ronde en 1994 par Serge Savard et André Boudrias. Il a joué sept ans à Montréal, remporté les trophées Hart, remis au joueur le plus utile, et Vézina, pour le gardien par excellence, en 2002. Il a aussi éliminé les Bruins deux fois en première ronde, en 2002 et 2004. Théo était au sommet de sa gloire, en 2005, lorsque le CH a repêché un certain Carey Price…

En bref, au cours de la longue et glorieuse histoire du Canadien, un seul gardien provenant d’un autre club, Gump Worsley, a joué plus de trois ans dans un rôle de numéro un à Montréal.

Worsley est le seul gardien étranger à avoir remporté la Coupe Stanley. Le seul, avec Andy Moog en 1998 et Denis Herron en 1980, à avoir remporté au moins une ronde de séries éliminatoires.

En bref, le Canadien, hormis cette période de gloire avec Worsley, obtenu en retour de Jacques Plante, dans les années 60, a toujours vécu des années difficiles lorsque le dauphin ne provenait pas de son organisation.

À Cayden Primeau de s’élever au-dessus de Jake Allen et Samuel Montembeault ces prochaines années. Le jeune homme demeure rempli de promesses.

Un choix de septième ronde offert aux Flyers

Il faut se rappeler des circonstances de sa sélection, en 2017. Le CH n’avait pas l’intention de repêcher de gardien. Carey Price avait 29 ans. Charlie Lindgren, 23 ans, devait être son successeur, après une première saison impressionnante dans la Ligue américaine.

Zachary Fucale, choix de deuxième tour en 2013, était encore considéré comme un solide espoir, tout comme Hayden Hawkey, choix de sixième tour en 2014, fumant à sa première année complète à Providence, dans la NCAA.

La cour de gardiens semble donc pleine. Mais sur la courte liste de gardiens pressentis avant ce repêchage, Primeau figure au troisième rang derrière Jake Oettinger, repêché en fin de première ronde par Dallas, et Ukko-Pekka Luukkonen, choisi au deuxième tour par Buffalo.

À l’aube de la septième ronde, voyant qu’une quinzaine de gardiens avaient été choisis et que Primeau était toujours disponible, Trevor Timmins a demandé une faveur à son directeur général Marc Bergevin : pouvait-il lui dénicher un choix de septième ronde puisque le CH avait déjà donné le sien aux Jets un an plus tôt pour repêcher un certain Arvid Henriksson ?

Bergevin a fait quelques appels. Les Flyers ont accepté d’inverser leur choix de septième tour pour celui du Canadien en 2018.

Il n’y avait aucun nuage à l’horizon pour Primeau avant la pandémie. Il avait été nommé le gardien par excellence dans la NCAA en 2019. Il avait mené les Américains à la finale au Championnat mondial junior, avec une fiche de 4-1, une moyenne de 1,61 et un taux d’arrêts de ,936. Il avait brillé à sa première année chez le Rocket de Laval.

Mais la longue pause a nui à son développement. Il vient de connaitre deux saisons chaotiques, avant de rebondir de brillante façon ce printemps en séries éliminatoires avec le Rocket. Il a mené Laval au carré d’as, avec une fiche de 9-5, une moyenne de 2,17 et un taux d’arrêts de ,936.

Dans un contexte de reconstruction, on doit s’attendre à voir ce jeune gardien de seulement 23 ans rester à Laval pour au moins une autre saison, à moins d’une blessure à Jake Allen ou Samuel Montembeault.

Et ne jamais oublier les sages paroles de l’ancien entraîneur des gardiens du Canadien, Stéphane Waite, l’an dernier, avant les exploits du jeune homme en séries.

« Il faut être patient avec Primeau. Cayden, c’est Corey Crawford de A à Z. Au plan de sa taille, de ses capacités athlétiques, de sa tête, de sa personnalité. Corey Crawford a eu à améliorer la vitesse de ses jambes et de ses bras lui aussi. Je parlais souvent avec Marc (Bergevin) en lui disant qu’il avait un futur Corey Crawford. Mais il a joué en moyenne proche de 50 matchs par année dans la Ligue américaine pendant cinq ans et s’est établi dans la Ligue nationale à 26 ans après 255 matchs dans la Ligue américaine (et disputé dix saisons à Chicago à titre de numéro un, tout en remportant deux Coupes Stanley). »

Un choix de septième qui a voyagé !

Le choix de septième ronde de 2018 offert aux Flyers pour repêcher Cayden Primeau en 2017 a souvent changé de mains. L’année suivante, le CH s’est retrouvé dans une situation semblable : il était entiché par l’attaquant Brett Stapley en dernière ronde, mais avait déjà cédé son choix pour Primeau l’année précédente. Il a donc répété le même manège, avec les Flyers, en offrant son choix de septième en 2019. Stapley, après une carrière intéressante dans la NCAA, ponctuée néanmoins par des blessures, vient de signer un contrat avec le Rocket de Laval.

Arrive 2019. Un Québécois de 20 ans, Rafaël Harvey-Pinard, est toujours disponible en septième ronde. Pas de choix. Nouvel appel de Marc Bergevin aux Flyers. Il cède cette fois son choix de septième ronde en 2020. Harvey-Pinard a déjà disputé quelques matchs dans la LNH et on devrait le revoir éventuellement à Montréal.

La chaîne d’échanges avec les Flyers s’est terminée en 2020. Le Canadien n’a pas repêché en septième ronde. Philadelphie a échangé ce choix, 201e au total, et son propre choix de septième ronde, au 208e rang, pour repêcher le Québécois Elliot Desnoyers en cinquième ronde. Desnoyers vient de connaitre une très belle saison dans les rangs juniors et il a même participé au Championnat mondial junior à titre de centre de quatrième trio cet été.

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