Rénover sa maison pour qu'elle consomme le moins d'énergie possible n'est pas toujours évident. Devrait-on changer les fenêtres ou mieux isoler le toit? Or, certains travaux valent davantage la peine (et l'investissement) que d'autres. Tour d'horizon des bons coups.

Écorénos tout confort

L'an dernier, Pascal Rajotte avait deux critères en tête lorsqu'il a voulu acheter une maison avec sa conjointe, Sabrina Vincent. L'habitation devait se trouver sur la Rive-Sud et être relativement récente, pour ne pas exiger trop de travaux. Un bungalow construit en 2004, à Verchères, a retenu l'attention du couple. En prime, l'inspection a révélé que le bâtiment était bien isolé.

«Cela m'a rassuré», indique M. Rajotte, qui a emménagé en juin dernier et a entrepris des démarches sans tarder pour participer au programme Rénoclimat.

Les projets sont nombreux. Il a préféré, dans un premier temps, s'atteler à améliorer l'efficacité énergétique de la maison.

«Cela va rapporter plus de faire les travaux à l'intérieur en premier, explique-t-il. Mieux vaut profiter dès que possible des économies qui seront générées.»

Les rénovations devant être faites pour rendre les maisons moins énergivores varient d'une habitation à l'autre, souligne Benjamin Zizi, conseiller technique chez Écohabitation, qui a accompagné les nouveaux propriétaires dans leur démarche.

«C'est du cas par cas. Mais en général, changer les fenêtres vient en dernier. De petits travaux très simples, qui ne coûtent pas cher, peuvent faire une différence, comme l'installation d'aérateurs sur les robinets et les pommes de douche, pour en réduire le débit.»

Selon lui, les autres rénos les plus rentables dans presque tous les cas sont: l'installation d'un récupérateur de la chaleur des eaux grises (comme celles de la douche et du lave-vaisselle), l'isolation des solives de rive (juste en haut des fondations), l'isolation des combles non aménagés, l'amélioration de l'étanchéité à l'air du bâtiment et l'installation d'une thermopompe air-air bibloc pour climat froid (dans le cas d'un chauffage par plinthes électriques).

Les résultats sont probants. À l'achat de sa maison, Pascal Rajotte calculait devoir payer annuellement une facture d'électricité d'environ 1600 $. Après avoir effectué les travaux recommandés, il s'attend dorénavant à payer moins de 1200 $.

Précisons que Pascal et Sabrina ont participé au programme de Financement innovateur pour des municipalités efficaces (FIME), offert pour l'instant aux citoyens de Verchères, Varennes et Plessisville dans le cadre d'un projet-pilote.

Ils ont ainsi contracté un emprunt à faible taux d'intérêt auprès de leur municipalité, qu'ils rembourseront à même la taxe foncière au cours des 18 prochaines années. Le prêt est attaché à la propriété. Il continuera donc d'être payé par les prochains propriétaires en cas de vente de l'habitation. Autre avantage: le couple a profité de l'expertise d'un conseiller de l'organisme Écohabitation, qui a vu à ce que les économies d'énergie réalisées couvrent une bonne partie du prêt à rembourser.

Le prêt s'élevant à 8137,23 $, le remboursement annuel sera de 484,94 $ (une somme en grande partie couverte par les économies annuelles de 400 $ sur le compte d'électricité). La facture globale des travaux de 11 154,09 $ avait en outre été réduite avec une aide financière et un crédit d'impôt totalisant 3016,86 $, obtenus grâce aux programmes Rénoclimat et Rénovert. À noter: ces deux programmes sont en vigueur jusqu'au 31 mars. Hydro-Québec propose à bon prix par ailleurs, jusqu'au 28 février, des produits pour réduire le débit d'eau afin d'économiser de l'eau et de l'énergie.

À plus grande échelle

L'Association québécoise pour la maîtrise de l'énergie (AQME), qui a mis sur pied et pilote le programme de financement FIME dont ont profité Pascal et Sabrina, organise la Rencontre internationale des municipalités efficaces, qui aura lieu les 21 et 22 mars au Palais des congrès de Montréal, pour mieux faire connaître le programme FIME, ainsi que d'autres pratiques avant-gardistes adoptées par des villes au Québec et ailleurs dans le monde.

«On veut lancer le programme FIME à plus grande échelle, pour qu'il soit adopté par un plus grand nombre de municipalités, indique Mathieu Gillet, vice-président, développement, de l'AQME. On veut transformer le marché et développer un souci pour l'efficacité énergétique. Le programme facilite l'accès à du financement. Sa colonne vertébrale, c'est l'accompagnement fourni, car les gens manquent souvent d'information. Cela réconforte beaucoup.»

En mettant fin au gaspillage d'énergie, en augmentant le confort dans la maison et en stimulant l'industrie de la rénovation, le programme agit sur plus d'un aspect, à la fois environnemental, économique et personnel, fait remarquer Valérie Sanderson, directrice de projet, pour le programme FIME.

Tous y gagnent.

PHOTO IVANOH DEMERS, LA PRESSE

Pascal Rajotte se sent bien dans sa maison, qu'il a rendue à la fois moins énergivore et plus confortable.

Des rénos à peu de frais

Le cas de Pascal Rajotte

TOTAL DES FRAIS ADMISSIBLES À FIME: 11 154,09 $

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AIDE FINANCIÈRE À SOUSTRAIRE

Programme Rénoclimat: 1470 $

Crédit d'impôt Rénovert: 1546,86 $

TOTAL DE CES AIDES FINANCIÈRES: 3016,86 $

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SOMME TOTALE ADMISSIBLE AU PRÊT FIME: 8137,23 $

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À rembourser sur 18 ans: 484,94 $/an

Économies d'électricité*: environ 400 $/an

COÛT TOTAL ESTIMÉ: environ 85 $ / an

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* Au coût annuel de l'énergie

Des économies d'énergie substantielles

Pascal Rajotte et sa conjointe Sabrina ont effectué des travaux assez typiques pour rendre leur maison moins énergivore. Ces travaux leur permettront de réduire de 26 % leur facture d'Hydro-Québec. L'économie de gaz à effet de serre atteint par ailleurs 101 kg d'équivalent CO2 par année (ce qui équivaut à 482 km parcourus en voiture). La performance énergétique du bâtiment atteint de plus la cible visée par le programme Novoclimat 2.0. Voici ce qu'ils ont fait.

Appareils de plomberie à faible débit

Le couple a profité du programme d'Hydro-Québec qui offre à bon prix des produits homologués WaterSense diminuant le débit d'eau de la douche et des robinets. La consommation d'eau et d'énergie est ainsi réduite.

Coût: 34,06 $

Étanchéité à l'air de l'enveloppe

Construite en 2004, la maison avait été bien isolée. Les solives de rive (les poutrelles de bois juste au-dessous du rez-de-chaussée) avaient été isolées avec de la mousse de polyuréthane giclée. De petits travaux de calfeutrage ont été recommandés. Les infiltrations d'air ont été réduites de 25 % en installant, par exemple, des mousses autour des prises de courant qui se trouvent sur les murs extérieurs.

Coût: 11,47 $

Isolation du toit

Le toit a été isolé de l'intérieur afin d'en augmenter la cote R et son équivalent métrique, la cote RSI. Le but? Réduire les pertes de chaleur, afin de maintenir une température confortable dans la maison. De la cellulose pulvérisée (R-30) a été installée pour atteindre un coefficient RSI 8,81 (R-50).

Coût: 1327,39 $

PHOTO IVANOH DEMERS, LA PRESSE

Le débit d'eau du robinet de la cuisine a été réduit.

Récupération de chaleur des eaux de drainage

Communément appelé Powerpipe, le système récupère la chaleur des eaux grises, comme celles de la douche et du lave-vaisselle, pour préchauffer l'eau froide alimentant le chauffe-eau. Un transfert de chaleur s'effectue lorsque l'eau de drainage tiède s'écoule dans un tuyau de cuivre autour duquel est enroulé le tuyau d'alimentation en eau froide du chauffe-eau.

Coût (installation comprise): 1405,25 $

Ventilation et apport d'air frais

Le système de ventilation a été optimisé. Un ventilateur récupérateur de chaleur (VRC), qui s'assure de la circulation d'air frais dans la maison et gère le taux d'humidité de l'air intérieur, a été installé. L'appareil procure d'intéressantes économies d'énergie puisqu'il préchauffe l'air frais entrant dans la maison en lui transférant la chaleur de l'air intérieur évacué vers l'extérieur. Adieu courant d'air froid.

Coût: 3098,58 $

Thermopompe bibloc sans conduits

Le couple a fait installer une thermopompe murale performante et silencieuse, qui permet de réduire les coûts de chauffage l'hiver tout en climatisant l'été. Les plinthes ne fonctionnent qu'à partir de - 26 °C.

Coût: 4357,55 $

PHOTO FOURNIE PAR RENEWABILITY ENERGY

Communément appelé Powerpipe, ce système récupère la chaleur des eaux grises, comme celles de la douche et du lave-vaisselle.

Pour des maisons moins énergivores

Imaginez si tous les pommeaux de douche de toutes les habitations au Québec avaient un débit d'eau réduit. À l'échelle de la province, ces 3,7 millions de pommeaux à haute efficacité permettraient d'économiser environ 2 térawattheures (2 milliards de kilowattheures). C'est l'équivalent de la consommation annuelle d'électricité d'une municipalité de 244 000 habitants comme Longueuil!

Cette mesure est l'une de celles qui gagneraient à être mises de l'avant pour réduire à la fois la consommation d'énergie électrique et les émissions de gaz à effet de serre, révèle une ambitieuse étude réalisée par Écohabitation avec la participation financière de l'Institut de l'énergie Trottier.

«On a voulu voir quelles sont les mesures les plus efficaces, à faible coût, qui permettraient de diminuer notre consommation d'énergie, indique Louis Beaumier, directeur exécutif de l'institut. Une certaine capacité pourrait alors être libérée pour l'exportation en Ontario, par exemple, où la production énergétique est moins propre que la nôtre.»

La recherche, intitulée Potentiel technico-économique de réduction des émissions de GES du secteur résidentiel au Québec, est truffée de savants calculs qui tiennent compte de la consommation énergétique des maisons unifamiliales, jumelées et en rangée (les plus énergivores) selon leur année de construction. Un travail colossal mené par Denis Boyer, coordonnateur en efficacité énergétique chez Écohabitation.

Six mesures concernant l'enveloppe des bâtiments ont été analysées: l'amélioration de l'étanchéité, l'ajout de pellicules à faible émissivité aux fenêtres existantes, l'isolation de la toiture, l'isolation des murs de fondation, le remplacement des portes et des fenêtres, ainsi que l'isolation des murs hors sol.

Quatre autres mesures, qui ont trait aux systèmes mécaniques et concernent l'ensemble des Québécois, peu importe le type de logement habité, ont aussi été étudiées: le remplacement des pommeaux de douche, la récupération de chaleur des eaux grises, l'installation de thermopompes à haut rendement et l'élimination des systèmes de chauffage au mazout (le cas échéant).

Pour chaque mesure, le potentiel d'économie d'énergie a été estimé, ainsi que le coût, afin d'en évaluer la période de retour sur l'investissement (PRI). L'impact sur les émissions de GES a aussi été calculé.

Résultat? L'installation à grande échelle de pommeaux de douche à faible débit est celle qui s'avère la plus avantageuse. Suivent l'amélioration de l'étanchéité, l'isolation des toitures, l'ajout de pellicules à faible émissivité aux fenêtres existantes et l'installation de thermopompes à haut rendement (dans certains cas).

«C'est très difficile d'amener les gens à poser des gestes pour l'environnement s'ils n'y voient pas leur propre intérêt. Leur dire qu'en 2100, le niveau de l'eau pourrait avoir monté d'un mètre, c'est abstrait. Leur dire qu'en dépensant environ 30 $ pour un pommeau de douche à débit réduit, ils rentreront dans leur argent en six mois et continueront d'économiser pour les années à venir, c'est plus facile à vendre», indique Denis Boyer, coordonnateur en efficacité énergétique chez Écohabitation.

Photo thinkstock

Économies d'énergie réalisables au Québec*

Si tous les foyers du Québec prenaient les mesures suivantes, voici les énergies qui seraient réalisées.

Mesures

> Pommes de douche à faible débit: économies d'énergie: 2,00 TWh

> Amélioration de l'étanchéité: économies d'énergie: 2,61 TWh

> Ajout de pellicules à faible émissivité aux fenêtres existantes: économies d'énergie: 3,36 TWh

> Installation de thermopompes à haut rendement: économies d'énergie: 5,20 TWh

> Isolation des toitures: économies d'énergie: 9,16 TWh

2 TWh sont l'équivalent de la consommation annuelle d'électricité d'une municipalité de 244 000 habitants comme Longueuil.

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* Source: La recherche Potentiel technico-économique de réduction des émissions de GES du secteur résidentiel au Québec.