Plus chère, la rénovation écologique? Des écorénovateurs chevronnés jurent que non! D'autres répondent: «Oui, mais le jeu en vaut la chandelle.» Un consensus: il faut y mettre le temps.

«On peut toujours trouver, au même coût, un produit ou un matériau qui présente un meilleur bilan environnemental que son équivalent ordinaire, enseigne inlassablement Emmanuel Cosgrove, directeur d'Écohabitation. Il y a moyen de faire simple, vert et pas cher.»

Pourquoi alors reculer devant une rénovation écologique? «Le principal frein, estime M. Cosgrove, serait plutôt le manque de temps: «Qui peut consacrer un après-midi à faire des recherches?»

Normand Roy, chargé depuis huit ans du projet Maison du développement durable, chez Équiterre, voit les choses d'un autre oeil: «La rénovation écologique coûte plus cher, car le temps, c'est de l'argent, sur un chantier.»

De son côté, Rob Miners, du très vert Studio MMA, atelier d'architecture, où 30% des contrats consistent en rénovations, affirme qu' «investir dans une rénovation écologique devient le gros bon sens, quand on regarde à long terme, en fonction de la santé, du confort et des économies d'énergie.»

Cèdre de l'est ou bois récupéré

La différence «verte» se trouve dans chaque geste sur le chantier. «Pourquoi choisir du cèdre de l'Ouest quand on peut avoir du cèdre du Québec, aussi beau et résistant, pour beaucoup moins cher?» demande M. Cosgrove. On le commande dans une petite cour à bois ou une scierie. Idéal pour faire la menuiserie extérieure, réparer des marches, se bâtir un joli balcon ou une clôture.

Pour une terrasse à un coût raisonnable et qui durera 50 à 100 ans: on pose un dallage de patio, propose M. Cosgrove, avec du sedum - plantes de rocaille - entre les dalles. Par ailleurs, un couvre-sol de trèfle et petites fleurs, sans arrosage ni entretien, est moins dispendieux qu'une pelouse. «Ça épargne les tourbières et... ça libère nos dimanches après-midi (pas de corvée de tondeuse)!»

De son côté, Normand Roy, qui touche volontier du marteau à ses heures, donne en exemple un projet qu'il a réalisé chez un ami: remplacer une plate-forme entre deux volées de marches, à l'extérieur. Cet ami tenait à utiliser du bois récupéré, malgré le surcoût qui en découle. «Il m'a fallu trois heures pour enlever les clous et quatre heures pour planer le bois, relate M. Roy. Le matériau n'a rien coûté, mais avec mon taux horaire, le petit palier (3 pieds par 6) revient à 400$!»

Rob Miners, habitué aux rénovations majeures, rappelle que la brique fabriquée au Québec a un prix comparable à la brique importée. Le bois de charpente écologique, c'est-à-dire certifié FSC et régional, n'est pas plus cher que le bois non certifié, ajoute-t-il, grâce aux politiques d'approvisionnement des grands magasins (Rona, Home Depot, BMR...), qui l'achètent en grande quantité. «J'utilise le contreplaqué sans formaldéhyde (Canply), pas plus cher que l'autre. Même chose pour le gypse à 95% recyclé (CGC). Quant aux fenêtres performantes (avec le label Energy Star), il y en a pour tous les budgets.»

La rénovation rentable

La rénovation écologique est rentable lorsqu'on profite du branle-bas pour poser des gestes d'efficacité énergétique qui réduiront la facture de chauffage. La pièce est vide? Bloquons soigneusement les fuites d'air, avec du calfeutrant faible en émissions toxiques et du boudin mousse. On redessine les divisions intérieures? «Faisons un vestibule, qui servira d'espace tampon entre les températures extérieure et intérieure», dit Rob Miners. On change le revêtement extérieur? «Ça vaut la peine de faire gicler sur le mur une couche de polyuréthane de soya, pour bien sceller la maison, couper les ponts thermiques et ajouter un facteur d'isolation de R-5.» Rappelons que l'approche écologique commande d'utiliser le polyuréthane de soya avec parcimonie. L'agent de gonflement du produit, un puissant gaz à effet de serre, n'a pas encore été remplacé par l'industrie, bien que les recherches avancent en ce sens.

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