Révolue, l'époque où les actrices vieillissantes n'avaient plus de premiers rôles à de rares exceptions? Aujourd'hui, les actrices matures, comme la septuagénaire Catherine Deneuve, occupent le terrain avec succès.

Elles aussi ont dépassé les 60 ans voir les 70 et 80 mais sont toujours présentes au box-office: les Britanniques Judi Dench (79 ans), Helen Mirren (68 ans), ou encore la Française Emmanuelle Riva (86 ans), héroïne d'Amour.

Deneuve, actrice à la filmographie riche en rencontres et en genres - de la pure comédie au film d'auteur - incarne en ce moment sur les écrans Bettie dans Elle s'en va, où elle campe une restauratrice bretonne qui part sur les routes sur un coup de tête.

Mi-juin, la réalisatrice Marion Vernoux offrait à Fanny Ardant, 64 ans, le rôle d'une dentiste à la retraite entretenant une liaison avec un jeune homme dans Les beaux jours. Le film a été l'une des belles surprises de l'été avec près de 500 000 entrées.

Que dire encore de Paulette, sorti en début d'année, avec une Bernadette Lafont impayable en mamie qui se met au trafic de drogue pour arrondir ses fins de mois. Résultat: plus d'un million d'entrées pour l'un des derniers rôles de l'actrice décédée en septembre à l'âge de 74 ans.

C'est plus qu'Amour de Michael Haneke, film multi-récompensé dans le monde entier qui a engrangé plus de 760 000 entrées depuis sa sortie il y a un an en France et attiré plus de 3,3 millions de spectateurs à l'international. Ses deux personnages principaux, Emmanuelle Riva et Jean-Louis Trintignant, sont octogénaires.

Après The Iron Lady, Meryl Streep (64 ans) reviendra sur les écrans européens en début d'année prochaine avec August: Osage County.

Quant à Judi Dench, célèbre «M» des James Bond, elle est à l'affiche de Philomena de Stephen Frears qui a chaviré dernièrement la Mostra de Venise.

Les seniors, grands cinéphiles

Concours de circonstances? Pas forcément. «Au même titre qu'il y a des teen movies (pour ados) je ne vois pas pourquoi il n'y aurait pas de films seniors pour les seniors!», déclarait il y a peu à l'AFP Emmanuelle Bercot, réalisatrice de Elle s'en va, qui voulait écrire pour Catherine Deneuve et devait donc «créer un personnage de son âge».

«Et puis les seniors sont ceux qui font le plus d'entrées au cinéma avec les jeunes», souligne la jeune cinéaste.

Selon une étude récente du Centre national du cinéma (CNC), les seniors (50 ans et plus) sont devenus en 2011 la population cinématographique la plus importante, représentant 34,2% des entrées (contre 14,3% en 1993) devant les moins de 25 ans, 31,8%.

Mais l'historien du cinéma Bernard Bastide «ne pense pas que tous ces exemples résultent d'un mouvement général dans le cinéma».

«Aujourd'hui, on est encore à remarquer les beaux rôles pour les femmes de 50, 60, 70 ans parce que c'est exceptionnel», souligne M. Bastide qui sort le 21 octobre Une vie de cinéma (Éd. Atelier Baie), ouvrage consacré à son amie Bernadette Lafont.

Bernadette Lafont n'a pas «refusé de vieillir à l'écran et comme il n'y a pas eu de cassure dans sa carrière, qui aurait fait un vide de 5 ou 10 ans, on l'a vue vieillir» naturellement, souligne-t-il.

«Elle me disait que Paulette était une opportunité magnifique pour une comédienne de son âge», dit encore Bernard Bastide. «Elle disait avoir eu un grand rôle par décennie. Paulette était le grand rôle de ses 70 ans».

Pour Fanny Ardant, la vieillesse «il faut la prendre à bras le corps, c'est à dire qu'il ne faut écouter personne. Il faut l'apprivoiser, comme la mort», disait-elle à l'AFP lors de la sortie du film «Les beaux jours».

Catherine Deneuve, qui vient de fêter ses 70 ans, avouait au dernier festival de Berlin qu'il n'était «pas évident de vieillir». «Ce n'est pas facile pour une femme et encore moins pour une actrice, mais ce n'est pas pour cela que cela doit devenir une obsession».