Le Larousse du cinéma classe le Halloween de John Carpenter (1978) dans les «incontournables» du cinéma horrifique, et son génial auteur parmi les «précurseurs» d'un genre alors à peine exploité : le film de serial killer, où un obscur croquemitaine schizophrène s'en prend à des adolescents.

De fait, l'excellent Halloween a connu auprès des foules un succès aussi immense qu'inattendu, alors que le non moins excellent Black Christmas du canadien Bob Clark, réalisé en 1974 n'a fait date que dans les catalogues spécialisés, exclusivement consacrés aux films d'horreur. Il est grand temps de rendre à Bob Clark (le monsieur qui a commis les premiers Porky's) ce qui revient à Bob Clark : Black Christmas était un très bon film de genre, modeste et gauche mais franchement malsain, et il précède de quatre ans la vague amorcée par Halloween, vague réduite à la médiocrité par les Friday the 13th,ravivée par les Freddy et mise en abyme par les Scream. Voilà, il fallait le dire.

Ce film bizarre et tordu, anti-esprit des Fêtes, cynique et pervers, n'avait aucun besoin d'un remake. Il appartient à son époque et son charme réside dans sa simplicité, son honnêteté, sa désuétude même, qu'on aurait tort d'assimiler à de la maladresse. Non, il n'y était pas question que d'un type déguisé en père Noël qui tue des blondasses (ne pas confondre avec un épisode de la série Silent Night, Deadly Night, tous disponibles à bas prix dans les étalages de cassettes VHS) mais, à la base, d'un drame familial sordide aux répercussions effrayantes (un groupe de jeunes résidentes est assailli par un psychopathe échappé de l'asile, marqué à vie par d'horribles sévices, et déterminé à fêter Noël à la maison).

Le remake de 2006, quoi qu'assez fidèle au modèle, n'apporte rien, ne change rien, comme c'est si souvent le cas des refontes. Le réalisateur Glen Morgan, cocréateur des Final Destination, auteur d'un des très rares remakes qui devaient voir le jour (superbe Willard version 2003, avec Crispin Glover) fait ici son job d'ouvrier, sans enthousiasme, sans soucis d'épater ou d'innover, offrant au public un film d'horreur générique, à l'humour macabre emprunté, dénué d'effets chocs : à l'exception d'une scène de vomi, il n'y a rien là-dedans pour choquer le spectateur, encore moins l'amateur de gore.

Resaluons au passage ce vieux Bob Clark, cinéaste canadien sous-estimé, qui nous a donné, en plus de l'inquiétant Black Christmas original, un autre film de Noël, pour toute la famille cette fois, particulièrement original, remarquable et régulièrement célébré : le si charmant A Christmas Story (Une histoire de Noël en français.) Mais pour plus d'excès sanglants, pour plus de cochonnerie dégueulasse, Apocalypto de Mel Gibson est toujours à l'affiche.
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Black Christmas, film d'horreur de Glen Morgan. Avec Katie Cassidy, Michelle Trachtenberg, Lacey Chabert.

Un (ou deux) tueur fou sévit dans une pension de jeunes femmes, à Noël.

Remake fade d'un minuscule classique qui n'avait aucun besoin d'un nouveau vernis.