Les accommodements raisonnables, la charte des valeurs, la Commission sur le racisme systémique... Au moment où le Québec tourne le fer dans la plaie de sa diversité, Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu? tourne l'affaire en dérision. Adaptée par Emmanuel Reichenbach et mise en scène par Denise Filiatrault, la comédie met en vedette Rémy Girard et Micheline Bernard. Avec ce duo en verve, aucun besoin de journaliste!

On est en plein dans la diversité avec cette famille...

Rémy Girard: «On est dans un sujet contemporain, universel et très sensible. Le personnage d'Alain ne plaira pas à tout le monde. Il est raciste, mais il fait des efforts. C'est tout de même un personnage merveilleux. Emmanuel a fait un travail d'adaptation remarquable. Les dialogues sont particulièrement réussis.» 

Micheline Bernard: «En fait, Alain plaît... C'est qu'on aime le détester. Il essaie de changer, mais c'est plus fort que lui.»

Rémy Girard: «Si tu ne veux pas que ça devienne caricatural, ou jouer comme au théâtre d'été, dit souvent Denise, il faut montrer qu'Alain est très sérieux. Pour lui, c'est un drame profond, ce qui arrive à sa famille. On le joue de façon vérité. C'est totalement incarné. Ce n'est pas une farce, ni de la grosse blague.» 

C'est une question de dosage...

Micheline Bernard: «C'est toujours une question de dosage, la comédie. Jusqu'où aller, quand arrêter? On va voir avec le public, comment il réagit. On s'ajuste avec lui. Parfois, on voit qu'on n'a pas besoin de pousser, on l'entend dans sa réaction.»

Rémy Girard: «Ce sont des one liners, c'est pour ça qu'on joue dans la vérité. Sinon, ce serait trop gros.» 

Micheline Bernard: «En même temps, la situation est exagérée. Ce couple a quatre filles, et les quatre gendres sont de différentes communautés ethniques. On en rit. Les gens vont se reconnaître ou y voir des gens qu'ils connaissent. Un des gendres le dit à un moment: "On est tous un peu racistes." Il y a aussi un conflit entre les jeunes et les plus vieux dans la pièce. Les jeunes étant plus ouverts et plus libéraux.»

Pour une fois, on va voir des membres de la diversité sur les planches...

Rémy Girard: «On a rarement vu une telle distribution sur une scène montréalaise. Et surtout, aborder ce genre de questions. Ce qu'on dit être de souche au Québec, ce n'est plus la couleur de la peau, c'est la culture et la langue communes.»

Micheline Bernard: «On parle d'inclure les immigrants, mais beaucoup sont nés ici. Ils sont québécois depuis plusieurs générations. Ils n'ont aucun accent. Mais le personnage d'Alain ne comprend pas ça. Il faut être ouvert aux nouvelles cultures et à tout ce qu'elles nous apportent.»

Rémy Girard: «Alain est le faire-valoir de toutes les contradictions qu'on vit au Québec par rapport à ça. D'abord par sa mauvaise foi, puis ses habitudes et ses croyances. C'est délicat quand il dit: "S'ils veulent pas se réfugier en français, qu'ils aillent se réfugier ailleurs", peut-être que certains vont applaudir. Mais j'espère que non. Ça reste une question importante.»

Sommes-nous assez inclusifs?

Rémy Girard: «Dans le passé, à mon avis, on n'a pas été assez inclusifs. C'est un fait historique. Il faut se questionner là-dessus. Encore aujourd'hui, si les gens ont de la difficulté à se trouver du travail, c'est qu'il y a un problème.» 

Micheline Bernard: «Il faut s'y attaquer, mais à l'époque, c'était le pouvoir de l'argent qui attirait les immigrants vers l'anglais.»

Rémy Girard: «La pièce remet en question toutes ces choses-là. Ce que j'aime, c'est qu'on en rit. Ce sont les accommodements raisonnables à l'intérieur d'une famille.»

Micheline Bernard: «Et dans les relations hommes-femmes aussi. Il y a un peu de machisme là-dedans. Les femmes font advenir la vérité dans la pièce. En général, je dirais que c'est comme ça dans la vie. À mon humble avis, ça manque de femmes!»

Fou rire final!

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Au Rideau-Vert, du 9 mai au 10 juin.