Ce récit familial créé en 2011 pour le Petit Théâtre du Nord a suffisamment intrigué Denise Filiatrault pour qu'elle aille voir la pièce au centre communautaire de Blainville. Quelques mois plus tard, elle l'a programmée au Rideau Vert.

L'écriture et la mise en scène de La grande sortie ont marqué, il y a deux ans, le «grand retour» de Jonathan Racine au théâtre.

Retour parce que ce diplômé en jeu du cégep de Saint-Hyacinthe, qui a enseigné le théâtre pendant 11 ans à l'école secondaire Saint-Joseph et écrit avec son amie et complice Mélanie Maynard une demi-douzaine de pièces de théâtre, caresse aussi le rêve de travailler comme réalisateur.

«Je montais chaque année trois spectacles à Saint-Joseph, dit-il. J'ai vraiment adoré ça, mais j'avais l'impression de passer à côté de mon rêve.»

À 30 ans, il a donc quitté son poste pour s'inscrire à l'INIS en réalisation. Quand il a terminé sa formation, il a été recruté par le producteur de Sucré/Salé, Bernard Fabi, qui l'a embauché comme producteur au contenu pour cette émission, mais aussi pour Deux filles le matin et Ça finit bien la semaine. Il y est resté neuf ans.

Mais on ne sort pas le théâtre d'un comédien aussi facilement... L'équipe du Petit Théâtre du Nord l'a sollicité pour écrire un nouveau texte. Jonathan Racine avait en effet écrit la première pièce de la troupe en 1999 (Loft Sorry). Il a ainsi repris contact avec l'auteure, comédienne et animatrice Mélanie Maynard.

«J'ai quitté TVA et je suis revenu à mon amour du théâtre, de l'écriture et de la mise en scène. J'ai tripé, ça m'a fait beaucoup de bien.»

Tranche de vie

«La grande sortie part de notre envie à Mélanie et moi de raconter une histoire familiale, explique-t-il. Quelque chose de quotidien. Une tranche de vie.» L'auteur et metteur en scène s'est inspiré de sa propre jeunesse dans le village de Saint-Simon-de-Bagot pour camper ses personnages.

«Moi, ce qui me touche dans la vie, ce sont les petits pas, affirme-t-il. J'ai choisi de raconter l'histoire d'une famille dans les années 80. Je viens de ce milieu-là. D'un petit village où on peut ressentir la pression des gens qui nous connaissent. Avec le côté étouffant de la famille.»

Dans La grande sortie, une mère de famille âgée, Marthe (Suzanne Garceau), convoque ses trois enfants à la maison lorsqu'elle apprend qu'il ne lui reste que quelques mois à vivre. Son seul lien avec l'extérieur est la télévision, qu'elle regarde compulsivement. «C'est un drame, mais c'est aussi très drôle», dit l'auteur.

On y retrouve son fils Richard (Sébastien Gauthier), qui vit toujours avec elle. Sa fille Line (Sonia Vachon), qui vit dans la maison d'en face. Et sa fille Chantal (Mélanie St-Laurent), qui a quitté le village depuis 12 ans.

«C'est le seul personnage à s'être accordé la liberté de vivre sa vie», précise Jonathan Racine.

«Le personnage de Line ne s'est pas autorisé à aller plus loin qu'en face de chez sa mère, détaille-t-il. Et je crois que ça correspond à la réalité de beaucoup de gens, qui ont de la difficulté à couper le cordon. Comme il y a des mères qui empêchent leurs enfants, consciemment ou non, de couper ce cordon. Pour moi, c'est une tragédie.»

Son rêve de travailler comme réalisateur, il ne l'a toujours pas abandonné. «Ma grande frustration quand j'ai monté La grande sortie, c'était de ne pas avoir une caméra dans les mains, explique-t-il. D'ailleurs, je rêve d'en faire un film pour rendre compte de tout l'aspect dramatique et documentaire de la pièce.»

D'ici là, il va travailler avec le producteur Martin Roy aux émissions Les grandes entrevues à ARTV et Arrange-toi avec ça à Vrak.TV. Mais La grande sortie a tout de même confirmé son besoin de faire du théâtre et de raconter des histoires.

«Lorsque j'ai vu Denise Filiatrault debout à la fin de mon show, qui criait "bravo!" en applaudissant, ç'a été la cerise sur le sundae. C'est comme si la vie m'avait dit: "Tu es capable de divertir les gens toi aussi."»

La grande sortie, du 28 janvier au 22 février, au Rideau Vert.