Une femme transportant une petite valise s'assoit sur un banc de parc. Autour d'elle, les gens circulent et s'agitent. C'est sur cette image à la fois simple et évocatrice que commence l'histoire de Devant moi, le ciel, nouvelle création de DynamO Théâtre sans paroles qui frappe par sa force poétique autant que par son côté ludique, mais qui n'a pas peur de l'émotion et d'un certain lyrisme.

DynamO est reconnu pour son théâtre acrobatique et Devant moi, le ciel n'y fait pas exception. À l'aide d'un trampoline installé entre deux bancs placés dos à dos et dont le dessus du dossier est plat, les cinq comédiens-acrobates sautent, virevoltent et prennent leur envol, jouant une bataille, une rencontre amoureuse ou une fuite en train. Le tout dans une scénographie très épurée -le seul autre élément sur scène est un écran, sur lequel des images du ciel changent au gré de l'action.

Sauts temporels

Malgré cette simplicité, la pièce mise en scène par Yves Simard est ambitieuse, surtout par ses nombreux voyages entre le passé et le présent. C'est que Devant moi, le ciel raconte le présent de cette jeune femme incarnée avec grâce par Andréanne Joubert, et le monde qui bouge autour d'elle: une jeune fugueuse avec qui elle noue un début de relation, une vieille dame qui nourrit les pigeons, un balayeur qui se prend pour un danseur de ballet, une joggeuse, une starlette, un homme d'affaires pressé et bien d'autres - les quatre comédiens qui entourent Andréanne Joubert changent de costume avec une rapidité déconcertante.

Mais, comme un vieux film, des images de son passé défilent aussi. Un passé heureux, des parents aimants, une petite soeur sautillante, un amoureux, un métier de pianiste, tout ça anéanti par la guerre. Son histoire se dessine par petits coups, et même si ce n'est pas toujours clair - l'amoureux est-il enlevé, emprisonné, recruté? -, chacune des scènes est parfaitement dessinée et d'une grande puissance évocatrice.

Émouvante et souvent drôle, Devant moi, le ciel dégage d'ailleurs un parfum de nostalgie - beau sentiment à faire partager aux enfants-, portée par le jeu athlétique précis des acteurs-acrobates et par les compositions au piano de Christian Légaré. Les Variations Goldberg de Bach, pièce fétiche de la jeune exilée, viennent ponctuer le récit d'une note de dignité et servent même de lien entre la jeune fugueuse et elle.

À la fin, après un rêve tout en douceur où ses proches viennent l'embrasser et laisser un objet dans sa valise, celle-ci regarde enfin vers le haut, debout sur un banc. Le voyage est terminé et elle peut continuer sa vie.

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Devant moi, le ciel, à la Maison Théâtre jusqu'au 26 janvier.