Ceux qui s'attendent à voir un hommage à Serge Gainsbourg seront déçus. Le Cabaret Gainsbourg, lancé la semaine dernière à Montréal, relève plus de la performance tripative, mêlant musique et marionnettes avec une certaine impertinence.

En s'inspirant de la compilation Du jazz dans le ravin, le metteur en scène de Pupulus Mordicus, Martin Genest, a créé de petits numéros ludiques pour chacune des chansons interprétées par les comédiens-musiciens-manipulateurs, en y intégrant masques et marionnettes de toutes tailles.

Le spectacle s'ouvre sur les notes jazzées d'Angoisse et Coco and co. Le manipulateur Pierre Robitaille y peint sur une grande toile le visage de Serge Gainsbourg, clope au bec, une fille dans sa mire. On y note l'inscription suivante: «La laideur surpasse la beauté en ceci qu'elle dure.»

Le coup d'envoi est donné d'assez jolie manière, mais l'interprétation des premières pièces sème la confusion. Assisterons-nous à un spectacle musical après tout? Où sont les marionnettes promises? Car si les musiciens tirent bien leur épingle du jeu, les voix sont, disons, plus inégales.

Petits bijoux d'irrévérence

Il faut attendre la sixième chanson pour que le spectacle décolle, celui des Sucettes, avec une petite marionnette représentant France Gall (excellente Valérie Laroche), qui chante bien naïvement les paroles à double sens de Gainsbourg en se gavant de champignons magiques. Des fleurs apparaissent, multipliant les pas de danse. C'est très drôle.

Deux musiciens coiffés d'immenses chapeaux en forme de champignon complètent le tableau qui a soulevé les premières salves d'applaudissements. La grande force de ce Cabaret, ce sont ses petits bijoux irrévérencieux qui prennent vie sur des airs de Gainsbourg. Le tout bonifié de belles trouvailles scénographiques. Dans ces moments, la musique devient presque accessoire.

Mais ce ne sont pas tous les numéros de ce spectacle d'à peine une heure dix qui atteignent un tel équilibre entre la performance musicale et la création théâtrale. Les autres interprètes - Mathieu Girard, Stéphane Mathieu Doyon et Patrick Ouellet - portent tous les chapeaux et se débrouillent plutôt bien, mais certaines pièces tombent tout de même à plat.

69, année érotique s'étire indûment avec ses poissons et ses méduses phosphorescents qui se promènent dans la salle; Requiem pour un twister et La femme des uns sous le corps des autres sont bien rendues, mais le savoir-faire de Pupulus Mordicus n'est pas aussi évident qu'on le voudrait. La musique, trop à l'avant-plan, n'est qu'une pâle copie de l'originale.

Heureusement, quelques autres pièces font mouche, dont Les femmes, c'est du chinois, Quand tu t'y mets, La fille au rasoir, Conjugué au féminin plus-que-parfait, écrite par la dramaturge Anne-Marie Olivier, «à la manière de Gainsbourg», et Le poinçonneur des lilas, qui clôt le spectacle en apothéose, avec une marionnette de sept pieds.

Cabaret Gainsbourg, à la Cinquième salle de la PdA jusqu'au 10 décembre.