Caravansérail, qui fait référence à un lieu de halte pour caravaniers, nous a été présentée comme un «voyage initiatique». Celui de deux hommes d'âge mûr désenchantés. Qui décident de faire table rase et de repartir à neuf. Vers de nouveaux horizons.

Mais ce voyage intérieur peine à prendre la route, et s'embourbe ici et là dans de petits fossés boueux qui nous retardent et nous éloignent de notre trajectoire, pour finalement faire une toute petite boucle, qui nous ramène assez rapidement à notre point de départ.

Comme ce jeune berger andalou, dans L'alchimiste, qui part à la recherche d'un trésor en Égypte. Qui quitte son village et ses amis et son amour, traverse le désert, fait moult rencontres et sacrifices, pour finalement réaliser, des mois plus tard, que le trésor est... dans son village. Misère!

Le texte de Robert Claing, écrit pour ses amis Benoît Dagenais et Paul Savoie, les deux interprètes de Caravansérail, n'est pourtant pas dénué d'intérêt. Il contient des ingrédients-clés pour donner vie à ce récit dramatique, à la fois grave et d'une suprême légèreté.

Tout se passe peut-être trop rapidement. Deux étrangers font connaissance à Paris. Les deux hommes s'ennuient. Sont seuls. Et insatisfaits de leur parcours respectif. Presque instantanément, nos deux hommes se promettent mer et monde. Se réfugient l'un dans l'autre.

Ils iront d'abord dans le sud de la France pour déguster un exquis rosé de Provence, souvenir de leurs meilleures années passées. Avant de rentrer au Québec, où ils s'achètent une vieille bicoque à Joliette. Sorte de retour à la terre de deux êtres déçus et amers, qui cherchent un sens à leur vie.

Benoît Dagenais et Paul Savoie, le professeur retraité et le comédien désabusé, ne manquent pas de talent pour interpréter ces deux épaves réunies par le hasard du destin. La scène où ils sont face à cette maison de campagne délabrée (seulement évoquée) est particulièrement réussie.

C'est d'ailleurs une des forces de la mise en scène de Robert Bellefeuille. Tout est suggestion et évocation. Et nous ramène au texte. Juste et poétique. À peine quelques objets meublent la scène, inclinée vers la salle. On nous montre bien peu de choses, et c'est très bien comme ça.

Longs dédales

En revanche, les délires des personnages - le cauchemar de Paul et le pèlerinage de Benoît sur la montagne - ne parviennent ni à nous émouvoir, ni à nous faire réfléchir. Plutôt de longs dédales, qui nous font tourner en rond. On effleure bien certains sujets, mais on se demande trop souvent à quoi riment ces errances. Peut-être s'agit-il d'une question d'âge...

Benoît et Paul finissent-ils par trouver un sens à leur vie? Le voyage proposé par Robert Claing ne nous permet pas de le croire. Cette quête ne fait que réunir deux naufragés, qui se consolent par leur présence et leur amitié. Conclusion: une chance qu'on s'a. Et ne cherchons pas de sens là où il n'y en a pas.

Fort bien, mais est-ce suffisant? La force dramatique du texte est sans cesse diluée par des passages à vide, comme ces nombreuses références à la culture de la patate ou de la tomate (consécration du jardinier), à la fois drôles et inutiles. En fin de compte, la caravane passe, mais elle ne fait que passer, sans laisser de traces derrière elle.

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Caravansérail, au Théâtre d'Aujourd'hui jusqu'au 10 octobre.