Le quotidien des artistes de la scène n'est pas toujours très glamour. Comme dans n'importe quel domaine, certains réussissent mieux que d'autres. N'empêche. Il y a les vedettes, il y a ceux qu'on reconnaît sans pouvoir les nommer, et il y a les autres, qui nous sont complètement inconnus. J'aurais voulu être un artiste propose sept courtes pièces qui explorent la face cachée de ces artistes connus... et moins connus.

L'idée de départ vient de Philippe Provencher. Un acteur professionnel accompli, mais peu connu. Souvent, confie l'acteur, on me demande: Qu'est-ce que tu fais dans la vie?» Et puis, comme on ne le replace ni dans le paysage télévisuel ni au théâtre ni au cinéma, on finit par lui dire: «En tout cas, lâche pas, mon vieux, tu vas y arriver!»

Pourtant, Philippe Provencher y est. Il a joué dans de nombreuses séries à la télé (L'auberge du chien noir, Virginie, Cover Girl, etc.), tout comme au théâtre, où il fait justement partie de la distribution de J'aurais voulu être un artiste, aux côtés de Normand D'Amour, Geneviève Alarie et Marilyse Bourke, sa compagne dans la vie - qu'on a vue notamment dans Les invincibles.

Sept auteurs ont été joints par le couple Provencher-Bourke, à l'origine des Collègues précaires qui produisent la pièce. Des auteurs de tous les horizons. Connus... et moins connus: Christian Bégin, Simon Boulerice, Jean-Marc Dalpé, Nico Gagnon, Annie Girard, Maia Loïnaz et Stéphane Roy. La commande: explorer les multiples vies d'artistes. En coulisse. Des vies ordinaires... et parfois sombres.

Une mise à nu

Tout cela ressemble un peu à du théâtre-réalité tant il est question du quotidien des comédiens et du sentiment d'insécurité qui les habite souvent. Et même d'un exutoire pour les artistes inconnus. Mais, insistent les deux comédiens, il n'y a pas d'autoflagellation ou de règlement de comptes dans J'aurais voulu être un artiste. Plutôt de l'autodérision, de l'humour grinçant et touchant à la fois. Une mise à nu, quoi!

«L'idée, c'était de montrer ce qu'on voit moins, précise Marilyse Bourke. Les comédiens qui triment dur, ce qui se passe dans un bureau de producteur (un monologue de Normand D'Amour), etc. Les vedettes que l'on voit au cinéma ou à la télé ne représentent qu'une toute petite partie de la réalité. On voulait montrer un autre côté de la vie d'artiste. »

Le texte d'Annie Girard, par exemple, met en scène un couple de comédiens. Lui, travaille beaucoup ; elle, a de la difficulté à se trouver un contrat de pub. Comment vivent-ils ces hauts et ces bas? Ou bien ce texte de Nico Gagnon: deux comédiens jouent dans une très mauvaise pièce. À la fin de la représentation, ils retrouvent des amis dans leur loge qui, bien sûr, les félicitent. «Promettez d'être vrai et mentez le mieux possible», disait si bien Albert Camus...

Dans une autre pièce, Windex, de Simon Boulerice, deux jeunes finissants d'une école de théâtre qui ne trouvent pas de boulot, boivent du Windex pour attirer l'attention d'un directeur de casting... qui finit par les embaucher. Dans une autre pièce encore (Hystérie), Stéphane Roy décrit la relation malsaine entre un réalisateur et son actrice, etc.

Cela dit, les sept courtes pièces (d'environ 15 minutes chacune), toutes mises en scène par Philippe Lambert, ne braquent pas uniquement les projecteurs sur les comédiens. Les quatre acteurs interprètent des rôles d'artistes, mais aussi de gens qui gravitent autour du milieu, dont le spectateur, sans qui l'acteur... n'est rien!

Dans la pièce de Christian Bégin, Voulez-vous passer au salon?, un notaire espère revigorer sa vie de couple en invitant chez lui des vedettes. Évidemment, rien de très bon n'en ressortira... Dans la pièce de Maia Loïnaz, Les escargots, un couple revient du théâtre. L'un est bouleversé par ce qu'il a vu, l'autre en est dégoûté...

Sept pièces sur la vie d'artiste, sous forme de sketches, qui révèlent finalement une foule de petites vérités que personne n'ose dire, mais que tout le monde pense tout bas, concluent Philippe Provencher et Marilyse Bourke, qui espèrent que le public embarquera dans leur délire.

Après avoir vu J'aurais voulu être un artiste, si vous ne reconnaissez pas Philippe Provencher dans la rue...

J'aurais voulu être un artiste, des Collègues précaires, au théâtre La Licorne du 28 mai au 20 juin.