Avant de me répandre en éloges racoleurs et en enthousiasme débordant, pour dire tout le bien que je pense du Festival TransAmériques, je dois confier un petit truc de rien du tout. Un détail, mais qui me fait tiquer chaque année.

Pourquoi avoir collé à cette formidable vitrine de la création contemporaine internationale l'étrange appellation «TransAmériques»?

Parce que quoi qu'en disent, en se tapant sur les cuisses, tous les amateurs de «blagues de mononcle» portés sur la facilité, le FTA n'est pas un festival consacré à l'identité transgenre et transsexuelle. Et puis, il y a cette méprise sur la provenance des artistes, puisque le FTA, qui reçoit des propositions venues de 12 pays, excède largement le seul territoire américain.

 

Voilà, c'est dit. Passons maintenant au déluge d'éloges qui mettra assurément en doute mon impartialité journalistique.

J'adore le FTA. Ce festival ne cesse de me ravir, m'étonner et de me faire aimer un peu plus le théâtre. J'adhère complètement à cette volonté qu'a la directrice artistique du FTA, Marie-Hélène Falcon, de rendre ténues les frontières entre les genres. En fait, lorsqu'arrive le FTA, je deviens, sans distinction, amatrice de théâtre et de danse contemporaine.

Depuis le pré-dévoilement de la programmation du FTA, en janvier dernier, j'ai hâte. Hâte de voir ce que Brigitte Haentjens fera avec les mots et les images de l'artiste visuelle Sophie Calle. Hâte de voir danser Robert Lepage. Hâte de goûter de nouveau à la sensibilité lettone du Nouveau théâtre de Riga. Hâte de découvrir le Nature Theater of Oklahoma. Hâte de juger si la dernière création de l'agent provocateur Jan Fabre frappe dans le mille ou fait dans le cliché de bas étage.

Chaque FTA, j'en reviens à cette même question: intégrer aux saisons des théâtres montréalais une ou deux productions d'ailleurs serait-il vraiment si compliqué et coûteux?

Pas que je trouve que ce qui vient d'ailleurs est nécessairement meilleur que la création d'ici. Le FTA gâte le public montréalais, en sélectionnant le meilleur des arts de la scène de partout sur le globe. Pour un chef-d'oeuvre de théâtre letton, les spectateurs de Riga ou d'Anvers ont certainement droit à des dizaines de pièces moyennes.

Le gazon n'est pas plus vert chez le voisin. Mais il me semble qu'on pourrait prêter nos scènes au théâtre d'ailleurs plus qu'une fois par année.

On a beaucoup parlé récemment de l'abolition des programmes qui soutenaient le rayonnement de nos artistes à l'étranger. Or, pour rendre le public sensible à la nécessité des rencontres culturelles, nos théâtres pourraient recevoir plus de visiteurs. Juste pour prendre l'air, s'ouvrir l'esprit, se remettre en question.

Rien contre le foisonnement de la création d'ici. Ne le répétez pas trop fort, mais j'ai comme l'impression qu'en produisant moins et en invitant plus souvent, on ferait du meilleur théâtre. On deviendrait plus exigeant.

Mais avant de régler ces grandes questions, plongeons plutôt dans la transe du FTA.

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