Conter, faire rire et instruire est le propre de Boucar Diouf, un des humoristes les plus brillants du Québec... et pas à cause de sa peau noire! Le Longueuillois d'origine sénégalaise a vraiment charmé le public du Gesù, hier soir, lors de la première médiatique de son spectacle Pour une raison X ou Y, un mélange d'intelligence raffinée et de bonheur de vivre sur le thème de la biologie humaine.

Dans ce spectacle, il est question d'identité et de l'origine de la vie, en réponse à la question de son fils Anthony, qui voulait savoir d'où il vient. La fécondation, l'accouchement, la paternité, la maternité, toute la vie humaine y est passée, avec humour et une érudition dénuée de toute prétention.

Boucar Diouf lance d'abord que les chansons à répondre ont longtemps été au Québec un exutoire pour éviter d'expliquer les «vraies affaires». Et de citer le petit oiseau que l'homme a entre les jambes et qui n'est pas un «animal de compagnie»... avalé par le minou de sa blonde!

Séduire sa conjointe

L'humoriste de 47 ans apprend ensuite aux hommes du public comment séduire leurs conjointes avec un bruit de bouche. Oups, pas facile à faire! Puis il parle des sites de rencontres et enchaîne avec les traditions des chasseurs au paléolithique!

Son propos, étayé de références biologiques, historiques ou sociales, est là pour nous enrichir en même temps que pour nous amuser. Et dès qu'il devient un peu trop professoral, il revient vite sur le plancher des vaches avec des jeux de mots du style «Madame, vous êtes manipulée, non, vous n'êtes pas mal épilée», ou «Chassez le naturiste et il revient au bungalow».

Une facilité dont il s'excuse en enfilant alors une blague du type «Offrez des roses plutôt que du chocolat à votre blonde pour la Saint-Valentin, car le chocolat est en concurrence avec le sexe, et il ne faut jamais encourager la compétition!».

Il cite ensuite le livre Technologies de l'orgasme, de l'historienne et chercheuse américaine Rachel P. Maines, pour rappeler que les médecins ont longtemps cru pouvoir guérir l'«hystérie féminine» avec l'orgasme, cette idée étant reliée à l'invention du vibromasseur par un médecin! Et de nous parler de l'automédication des femmes pour baisser l'hystérie!

Surprenant passage du spectacle pendant lequel il raconte ensuite comment un marchand de tissu hollandais a découvert par hasard le comportement du spermatozoïde au XVIIe siècle. D'où l'origine de l'expression «tissu à la verge», a lancé Boucar...

Sol africain

Le spectacle est ainsi fait d'une succession de savantes références, de calembours et de maximes savoureuses.

Sa blonde, sa «crevette de Matane», Caroline Roy, vient jouer de la guitare sur scène à quelques reprises pour ponctuer ses numéros et pour chanter avec lui une toune africaine émouvante et évocatrice.

S'il peut être coquin, Boucar Diouf est d'abord un amoureux de la connaissance et des mots, sorte de Sol africain, poète avant d'être humoriste, humaniste plus que scientifique. Et, bien sûr, un judicieux mélange des quatre.

Avec son sage grand-père jamais bien loin dans son coeur et sur ses lèvres, on rit beaucoup et on passe un moment précieux en compagnie de Boucar Diouf, un homme qui nous rappelle que le parler peut être châtié et drôle et l'humour d'autant plus singulier qu'il est pluriel. Comme notre société.

_____________________________________________________

Pour une raison X ou Y, par Boucar Diouf. Ce soir et demain, 20h, au Gesù.