Le roman de Jorge Volpi Les bandits parle de la crise financière et de ceux qui se tirent avec la caisse. Un roman d'actualité? Tout à fait, reconnaît l'auteur mexicain qui était de passage au Salon du livre de Montréal quelques jours après l'élection de Donald Trump.

«Trumperies: mensonges qui n'empêchent pas leur auteur de rafler les grands honneurs.» Le néologisme en vogue sur les réseaux sociaux peut s'appliquer aux bandits à cravate qui ont survécu à la récente crise financière en continuant de s'enrichir. 

Il n'y a pas de grande différence entre les malfrats décrits dans le roman de Jorge Volpi et le président américain désigné. 

«Dans un certain sens, c'est comme si le personnage principal de mon roman avait été élu président des États-Unis, confie le romancier mexicain. Ça peut être vu comme une métaphore du monde actuel. J'ai tenté de faire un portrait de la société dans laquelle on vit.» 

Le récit des Bandits suit les aventures de J. Volpi, investisseur de Wall Street qui a détourné 15 milliards de dollars. Comme les Ponzi ou les Madoff de ce monde, il ment comme il respire et ne vend que du vent. Il écrit sa biographie pour dénoncer le système financier et mieux comprendre le père qu'il n'a pas connu, un fonctionnaire soupçonné d'avoir frayé avec les communistes.

«J'ai décidé de mêler deux histoires, celle qui se déroule durant la Seconde Guerre mondiale et celle de la crise de 2008 parce que je vois un lien entre les débuts du capitalisme moderne et ce qui semble en être la fin aujourd'hui.»

Le tout agrémenté de photos d'époque, de rappels historiques et de leçons d'économie. Si bien qu'on ne sait plus trop ce qui est vrai ou faux à certains moments dans cette lecture passionnante.

«C'est un roman sur le mensonge aussi. Il joue sur la ligne qui sépare la réalité de la fiction. J'utilise des photos justement pour brouiller les pistes. Certaines sont tirées d'événements réels, d'autres, non.»

Humour

Ce caractère ludique, voire humoristique, est bien propre aux Mexicains.

«On rit de tout au Mexique. Et on aime rire des tragédies en particulier. La satire et l'humour noir m'intéressent.»

Il y a évidemment une part de cynisme dans le monde décrit par Jorge Volpi. Face à la situation actuelle, il n'y a pas de quoi se réjouir, croit-il. 

«L'histoire se poursuit malheureusement. Trump est la conséquence, jusqu'à un certain point, de ce qui se passe dans le livre. La crise financière a provoqué une sensation d'angoisse au sein de la classe d'hommes blancs, sans éducation et religieux qui constituent la base électorale de Trump. Le paradoxe, c'est que ceux qui ont provoqué la crise sont maintenant au pouvoir et disent qu'ils vont la résoudre.» 

Comme artiste mexicain, comme citoyen du monde qui a beaucoup voyagé, comme écrivain qui a signé un recueil d'essais sur la situation difficile dans son propre pays, Jorge Volpi se dit inquiet. 

«C'est terrible pour le monde entier, et plus particulièrement pour le Mexique. C'est terrible qu'un personnage comme Trump puisse devenir l'homme le plus puissant du monde. Un menteur, raciste... L'équipe qu'il met en place est dangereuse. Son discours est terrifiant.»

La crise

Le romancier a écrit le livre durant deux années passées à l'étranger, dont une à Princeton. De prime abord, il n'était pourtant pas intéressé par les finances et l'économie. Sauf qu'en tant que Mexicain, la «crise», il connaît.

«Nous n'avons pas vécu au Mexique que la crise de 2008, mais dans ma vie, au moins quatre autres: 1976, 1982, 1994, 1996. Cinq crises économiques tout aussi violentes. Je voulais essayer de comprendre comment fonctionne une crise.»

Après Les bandits, Jorge Volpi a écrit un roman en vers Las elegidas (Les élues) qui a déjà été adapté au cinéma. Il prépare en ce moment un livre de non-fiction sur un dossier criminel mexicain. Mais pas touche aux narcotrafiquants. 

«Ça, ce serait vraiment dangereux. La situation du Mexique ne s'améliorera pas avec ce qui se passe aux États-Unis. D'un point de vue économique, social et politique, c'est un très mauvais moment pour le Mexique.»

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Les bandits. Jorge Volpi. Seuil, coll. Points,  510 pages.

image fournie par l'éditeur

Les bandits de Jorge Volpi