L'ouvrage Gaston Miron, la vie d'un homme ne contient aucun propos diffamatoire à l'égard d'Alain Horic, un proche collaborateur du poète. Telle est la décision contenue dans un jugement de la Cour supérieure rendu hier et très attendu du monde littéraire.

Un recours déposé en mai 2012 visait l'auteur de la biographie, Pierre Nepveu, ainsi que les Éditions du Boréal. Plusieurs passages concernant Alain Horic, ancien directeur des Éditions de l'Hexagone, éditeur et ami de Gaston Miron, avaient été jugés diffamatoires par ce dernier. M. Horic prétendait qu'on le présentait de façon «extrêmement défavorable ».

La juge Chantal Chatelain ne l'a pas vu ainsi à la suite des neuf jours d'audition qui ont eu lieu au printemps dernier. «Pour être diffamatoire, un propos doit faire perdre l'estime ou la considération de quelqu'un ou, encore, susciter à son égard des sentiments défavorables ou désagréables. [...] Or, ici pris dans leur contexte, les propos reprochés par Alain Horic n'ont pas cet effet. Au contraire, la biographie le présente comme étant un des artisans du succès de l'Hexagone et un ami qui a su conserver l'affection et la confiance de Gaston Miron en toutes circonstances».

Même en admettant qu'Alain Horic puisse être «blessé» par des passages du livre de M. Nepveu, le Tribunal a conclu que l'auteur et sa maison d'édition «n'ont commis aucune faute civile donnant ouverture au recours en diffamation».

Alain Horic réclamait la somme de 400 000 $ pour atteinte à la réputation, à la dignité, à l'honneur et pour préjudice corporel (stress qui aurait conduit à une maladie cardiaque, anxiété, insomnie). Le tribunal n'a pas retenu le recours d'Alain Horic puisqu'il n'a pas réussi à prouver l'existence d'un préjudice, d'une faute et d'un lien de causalité.

De son côté, Pierre Nepveu demandait au tribunal de déclarer abusif le recours d'Alain Horic. Même si le recours a été rejeté, la juge a estimé que M. Horic ne l'a pas exercé de manière excessive ou déraisonnable. Elle n'a donc pas acquiescé à la demande de M. Nepveu.

Alain Horic n'avait pas encore pris connaissance du jugement lorsque La Presse l'a joint, hier après-midi à son domicile. Il s'est dit fort surpris et déçu de la décision. 

«Je ne vois pas comment on peut arriver à cette décision. Je m'attendais à un gain de cause à 100 %.»

Malgré le choc, Alain Horic entend continuer son combat. «Je pense que ça n'en restera pas là», a-t-il ajouté.

Alain Horic a commencé à travailler aux Éditions de l'Hexagone en 1954. Il a été l'un des directeurs de cette maison d'édition jusqu'en 1991. Il a été l'associé de Gaston Miron et l'a accompagné dans plusieurs projets d'écriture.

De son côté, Pascal Assathiany, directeur général des Éditions du Boréal, accueille la décision avec beaucoup de soulagement. «Je ne vous cache pas que ç'a été une période très tendue. Mais voilà, notre rigueur a été reconnue.»

Pascal Assathiany a été impressionné par la façon dont le jugement a été rédigé. «La juge a fait un travail extraordinaire. Pour quelqu'un qui ne connaissait pas, au départ, le monde littéraire, elle est arrivée avec une compréhension d'une grande clarté.»

Photo Marco Campanozzi, Archives La Presse

L'auteur de Gaston Miron, la vie d'un homme, Pierre Nepveu.