L'héritier du patrimoine littéraire de Jack Kerouac, John Sampas, dit qu'il a refusé d'accorder les droits des écrits français du mythique écrivain à Gabriel Anctil tout simplement parce qu'il «n'aimait pas sa personnalité».

Depuis quelques jours, Gabriel Anctil, les Éditions du Boréal et l'écrivain Deni Ellis Béchard se livrent une joute dans l'espace public. L'enjeu: déterminer si l'universitaire Jean-Christophe Cloutier a diminué l'implication d'Anctil dans l'avant-propos de son livre La vie est d'hommage, recueil des écrits en français de Jack Kerouac publié la semaine dernière.

«Je n'ai jamais eu l'intention de publier [La nuit est ma femme et Sur le chemin] avec Anctil, car je n'aimais pas son approche. Son [attitude] m'a déplu», a affirmé M. Sampas entrevue avec à La Presse hier.

Rappel des faits

Samedi dernier, La Presse et Le Devoir ont publié une lettre ouverte dans laquelle Gabriel Anctil affirme avoir été réduit à un «vulgaire vendeur de saucisses» par M. Cloutier, qui a écrit qu'il avait «publicisé l'existence des écrits en français de Kerouac», sans plus.

Dans Le Devoir, hier, l'écrivain Deni Ellis Béchard - celui qui a suggéré à l'héritier de Jack Kerouac de faire appel à Jean-Christophe Cloutier pour analyser et traiter les écrits en français de l'écrivain - a répliqué à Gabriel Anctil dans une lettre au ton incisif.

«Presque tout ce que M. Anctil affirme dans cette lettre est faux, surtout le fait qu'il ait découvert les deux romans de Kerouac La nuit est ma femme, en 2007, et Sur le chemin, en 2008», peut-on y lire.

«Grâce à M. Anctil, beaucoup de gens ont su que ces textes francophones existaient (ce que Cloutier prend soin de souligner dans son avant-propos du volume publié par Boréal), mais annoncer l'existence de quelque chose et le découvrir ne sont pas pareils.»

«En tant que journaliste, j'ai appris (parfois à la dure) à revérifier tous les faits que comportent mes recherches, et M. Anctil injectait trop de mythomanie dans ses déclarations pour que je puisse utiliser son témoignage dans ce que j'écrivais. Avec une telle imagination et un tel ego, il devrait plutôt se dévouer à l'écriture de romans et non pas au journalisme», a-t-il poursuivi.

«Je les ai révélés au monde»

Or, Anctil soutient qu'il n'a jamais réclamé la paternité de la découverte de ces écrits, mais qu'il espérait tout simplement que Boréal corrige le tir dans une réimpression de son livre en lui accordant plus qu'une simple ligne d'un avant-propos de plusieurs dizaines de pages.

«Je suis le premier francophone à avoir lu [Sur le chemin] et le deuxième francophone à avoir lu [La nuit est ma femme]. Je les ai révélés au monde! On peut [débattre sur] la sémantique, mais j'ai fait beaucoup plus que publiciser ces textes. Je les ai mis en lumière! Personne n'en connaissait l'existence», a-t-il affirmé à La Presse, à qui il a fait parvenir une lettre-fleuve pour clarifier sa position dans toute cette bisbille.

«D'attaquer mon intégrité et de me bombarder d'injures, gratuites et infondées (en plus d'être grossières), comme le fait M. Béchard, me semble complètement injuste. Je ne m'abaisserai pas à ce niveau de confrontation. Tout ce que j'exigeais dans ma lettre publiée samedi dernier était un ajustement à la version des faits telle qu'exposée dans l'avant-propos à La vie est d'hommage», ajoute-t-il.

En entrevue avec La Presse, hier, le directeur général des Éditions du Boréal, Pascal Assathiany, n'a montré aucun signe d'ouverture quant aux récriminations de Gabriel Anctil.

«Jean-Christophe Cloutier, l'auteur du livre que nous avons publié, voulait donner un coup de chapeau à Gabriel Anctil en mentionnant son implication dans l'avant-propos. [...] Mais ce n'est pas un livre sur lui ou sur ceux qui ont fait connaître ces textes de Jack Kerouac. C'est un livre sur l'oeuvre!», s'est-il exclamé.

En fin de journée, hier, Gabriel Anctil a lancé l'idée sur sa page Facebook de tenir une rencontre publique entre les Éditions du Boréal et lui afin d'échanger sur toute cette affaire.