Chaque rentrée, c'est pareil. Que de livres! Trop de livres? Une fois le choc passé, on remarque quelques valeurs sûres, de nombreux auteurs dont on espère beaucoup, des traductions d'écrivains canadiens qui ont fait leurs preuves, une abondance de premières oeuvres, des curiosités et une déferlante de romans historiques, dont le succès populaire ne se dément pas.

LITTÉRATURE QUÉBÉCOISE

Les incontournables

Ceux-là n'ont plus besoin de présentation. Plusieurs fois primé (Booker Prize, Médicis et autres), le Torontois Michael Ondaatje publie ce jours-ci La table des autres (Boréal et L'Olivier), une fiction inspirée de la traversée en paquebot qu'il a fait enfant, de l'actuel Sri Lanka à l'Angleterre.

Les filles de Marie Cardinal et l'éditrice Annika Parance ont reconstitué un roman, L'inédit, à partir des carnets laissés par l'écrivaine. En librairie mardi prochain.

En septembre, l'homme de théâtre Wajdi Mouawad lancera son deuxième roman, Anima, (Leméac/Actes Sud). Un homme rentre chez lui pour trouver sa femme enceinte sauvagement assassinée.

Chez le même éditeur, l'essai de Nancy Huston sur le regard porté sur les femmes, Reflets dans un oeil d'homme, sera disponible sous peu, après quelques mois de retard sur la France.

De même, Francine Noël publie Le jardin de ton enfance (Leméac), «journal d'affection» d'une grand-mère à son petit-fils.

En octobre, Robert Lalonde reprend les thèmes qui lui sont chers sous un titre dont il a le secret: Un jour le vieux hangar sera emporté par la débâcle. Début novembre, Michel Tremblay propose Au hasard la chance (Leméac), le retour à Montréal de la Louve d'Ottawa, guidoune vieillissante aux valises pleines d'argent.

Ils piquent la curiosité

Qu'est-ce qui se cache derrière L'Orphéon, chez VLB? Cinq auteurs à contre-emploi se partagent les personnages et les cinq étages d'un même édifice. Stéphane Dompierre ouvre la porte à la mi-octobre avec Corax, un roman d'épouvante. À l'hiver, un des maîtres du genre, Patrick Senécal la refermera avec... un conte allégorique! Ce dernier lance d'ailleurs en août, chez Alire, le deuxième tome de Malphas, Torture, luxure et lecture, dans un cégep bien étrange.

Dans le filon «néo-conteur du terroir», La fiancée américaine d'Éric Dupont (Marchand de feuilles) happe le lecteur dès les premières pages.

Quand des artistes en arts visuels écrivent des romans, cela donne Les vautours de Barcelone de Rober Racine (Boréal), et Hollywood, de Marc Séguin (Leméac), tous deux dès septembre.

Autre objet de curiosité: la nouvelle collection littéraire de Druide compte quatre titres dont un roman d'un auteur chevronné, Alain Beauliey, qui propose une vision désenchantée de l'immigration Quelque part en Amérique.

Chez La Mèche, l'échange épistolaire entre Bertrand Laverdure et Pierre Samson, Lettres crues, traite entre autres de la disparition des intellectuels et des petites misères des écrivains québécois.

Les éditions Coups de tête nous ont habitué à un littérature virile et plutôt trash. Cet automne, on y trouve que des auteures féminines, dont l'artiste de cirque Geneviève Drolet, avec Le reflet de la glace, et la «mère indigne» Caroline Allard avec Universel Coiffure.

Après le grand succès d'Aurélie Laflamme, India Desjardins publie une première bande-dessinée pour adultes, La célibataire, chez Michel Lafond, en octobre.

Chez Mémoire d'encrier, l'Haïtien Gary Victor fait le récit d'une adolescence sous la dictature dans La Maudite éducation.

Le documentaire Le coeur d'Auschwitz (2008) tentait d'expliquer l'origine d'une carte de voeux fabriquée par des femmes dans le camp de concentration. Le co-réalisateur, Carl Leblanc, n'a pas trouvé une réponse satisfaisante et imaginé une fiction autour de cet objet étonnant chez XYZ.

Le collaborateur à La Presse Frédérick Lavoie délaisse le reportage le temps d'un récit: Allers simples, aventures d'un journaliste en Post-Soviétie, qui relate ses voyages et rencontres en ex-URSS (La Peuplade)

Des prix, mais encore?

Leurs oeuvres précédentes ont remporté des honneurs. Que nous réservent-ils cette fois?

Récipiendaire du Prix Archambault pour La petite et le vieux, gagnante du Combat des livres 2012, Marie-Renée Lavoie propose en novembre Le syndrome de la vis, sur les tourments d'une insomniaque. Très attendu.

Prix du Gouverneur général 1997, Prix Elle Québec 1999, Aude revient à la nouvelle avec le recueil Éclats de lieux (Lévesque).

À 19 ans, Olivia Tapiero a remporté le prix Robert-Cliche du premier roman avec l'histoire d'une jeune suicidaire. Trois ans plus tard, elle signe Espaces (XYZ), qui s'annonce tout aussi tourmenté.

Le directeur littéraire de l'Instant même, Gilles Pellerin a remporté le Prix de la Ville de Québec avec le recueil de nouvelles Ï . Il poursuit dans la même veine avec I2 .

Prix Ringuet de l'Académie des lettres en 2009 pour son premier roman, Les déliaisons, Martin Robitaille lance un second roman, En chemin, je t'ai perdu (Druide), sur un bonheur en apparence parfait qui se fissure.

Lauréate du prix France Québec 2009 pour Mademoiselle Personne, Marie Christine Bernard dresse un Autoportrait au revolver (Hurtubise).

À surveiller: trois finalistes récents au Prix des libraires publient cette saison: Serge Lamothe, Les enfants lumière (Alto); Nicolas Chalifour Variétés Delphi (Héliotrope), dans la continuité de Vu d'ici tout est petit; Benoit Quessy, La singularité (Québec Amérique). Et Une belle famille d'Annie Cloutier (Triptyque), dont La Chute du mur avait été récompensée par le Prix des abonnés des bibliothèques de Québec.

De premières découvertes

Le prix Robert-Cliche du premier roman 2012 a été décerné cette semaine à Judy Quinn pour Hunter s'est laissé couler (L'Hexagone). L'auteure, qui a déjà publié de la poésie, s'est inspiré des carnets de son grand-père marin.

Le Quartanier nous a souvent fait de belles surprises. Qu'est-ce qui se cache dans Les bases secrètes, premier roman du bédéiste David Turgeon? Et dans ce Testament, de Vickie Gendreau, la prose poétique et autobiographique d'une danseuse nue atteinte d'un cancer du cerveau?

À La Pastèque, l'auteure de théâtre Fanny Britt publie un premier album jeunesse avec l'illustratrice Isabelle Arsenault, Jane, le renard et moi, sur l'intimidation entre filles.

Des traductions du Canada anglais

Son École des films avait charmé bien des lecteurs. Dans son récit autobiographique Le juste retour des choses (Leméac), David Gilmour nous emmène ailleurs, sur des lieux chargés d'émotions lourdes, à commencer par le chalet où son père s'est suicidé.

La poète et romancière Alison Pick, finaliste au Man Booker, narre dans L'enfant du jeudi (Boréal) l'histoire d'un enfant qui a fui la menace nazie par le Kindertransport vers l'Angleterre.

Patrick deWitt a fait sensation l'an dernier avec la version originale des Frères Sisters. Voici en français, chez Alto, un authentique western sanglant, avec des tueurs à gages à cheval.

Lawrence Hill, à qui on doit Aminata, grand roman sur l'esclavage, revient à La Pleine lune avec Un grand destin, en partie autobiographique, sur les aventures d'un journaliste noir au Manitoba.

Des policiers à surveiller

L'auteure de Je compte les morts, Geneviève Lefebvre, retrouve Antoine Gravel dans La vie comme avec toi (Expression noire). Chez le même éditeur, Mario Bolduc envoie son enquêteur Max O'Brien en Tanzanie. Flammarion Québec fait paraître Révélation brutale, nouveau titre en français de Louise Penny, spécialiste du polar réconfortant. À La Goélette, Martin Michaud (Prix Saint-Pacôme) lance une nouvelle enquête de Victor Lessard, Je me souviens. À signaler: un premier polar historique pour un auteur de sagas: Un homme sans allégeance, de Jean-Pierre Charland (Hurtubise).

Attention, nostalgiques et amateurs de littérature de genre: pour ses premiers titres publiés comme éditeur, l'auteur de fantasy Bryan Perro se fait plaisir et réédite La porte ouverte, premier roman jeunesse de son idole, Henri Vernes, ainsi que les trois aventures de Bob Morane au Québec.

Déferlante de romans historiques

Louise Tremblay-D'Essiambre met un terme à sa série Mémoires d'un quartier avec le 12e tome! Cette saga historique connait un succès hors du commun, avec 520 000 exemplaires vendus au Québec. Chez Guy St-Jean.

Chez Libre Expression, Suzanne Aubry poursuit l'histoire de Fanette, son orpheline irlandaise, avec le tome 5, Les ombres du passé. Chez Hurtubise, Denis Vézina propose un roman d'aventure dans un cadre historique. Molly Galloway, une autre jeune irlandaise. De nouveaux tomes aussi s'ajoutent aux séries de Michel Langlois (Ce pays de rêve) et Michel David (Au bord de la rivière).

LITTÉRATURE ÉTRANGÈRE

L'évènement de la rentrée sera sans contredit la sortie planétaire du premier roman pour adultes de la créatrice de Harry Potter. Une place à prendre (The Casual Vacancy), de J. K Rowling sera lancé le 27 septembre et la version française le 1er octobre. La sortie ayant été entourée d'un secret quasi paranoïaque, on ne sait pas grand-chose du roman sinon qu'il est teinté d'humour noir et prend place dans une bourgade anglaise imaginaire et en apparence idyllique, jusqu'à ce qu'une mort inattendue laisse vacant le siège d'un conseiller municipal.

Autre lancement au retentissement international, celui du récit des années de traque de l'écrivain britannique Salman Rushdie, devenu en 1989 l'objet d'une fatwa de l'ayatollah Khomeini. Joseph Anton, Mémoires, paraît en version originale le 18 septembre, un mois plus tard en français (Plon).

Toni Morrison, Prix Nobel de littérature américaine, propose un condensé des thèmes qui ont marqué son oeuvre dans un très beau roman, Home (Christian Bourgois).

L'auteur de Rosa Candida, l'Islandaise Audur Ava Olafsdottir offre L'Embellie (Zulma). Après les Crimes, voici les Coupables, de Ferdinand Von Schirac, des nouvelles où on sombre dans la violence (Gallimard).

Un nouveau Philip Roth, Némésis paraît chez le même éditeur (Gallimard). À signaler aussi, Printemps barbare, de Hector Tobar (Belfond), autour d'une domestique latino de Los Angeles qui se retrouve au banc des accusés.

LITTÉRATURE FRANÇAISE

La rentrée française propose cette année 646 romans dont 426 français et 220 étrangers, à paraître d'août à octobre. La presse annonce déjà quelques favoris pour les prix littéraires.

Parmi les titres pressentis, on compte Les lisières d'Olivier Adam, dans lequel un écrivain retourne dans la banlieue de son enfance (Flammarion); Pour seul cortège, de Laurent Gaudé, sur les dernières heures d'Alexandre Le Grand (Actes Sud); et Peste & Choléra, de Patrick Deville (Seuil), qui révèle le parcours d'Alexandre Yersin, aventurier humanitaire ayant découvert le bacille de la peste.

Florian Zeller délaisse le théâtre pour écrire La jouissance, portrait d'une génération de trentenaires. Philippe Djian raconte les suites d'un viol dans Oh... Jean Echenoz suit cinq jeunes hommes partis au front dans 14. Tahar Ben Jelloun ironise sur Le bonheur conjugal (Gallimard). Nouvellement admis à l'Académie française, Amin Maalouf retourne au Liban de sa jeunesse dans Les Désorientés (Grasset).

Énigmatique, L'herbe des nuits de Patrick Modiano paraîtra en octobre.

Amélie Nothomb livre son interprétation du conte de Barbe bleue, son 21e roman publié en autant d'années chez Albin Michel.

Dans Une semaine de vacances, Christine Angot (Flammarion) traite entre autres de pédophilie. Agnès Desarthe livre Une partie de chasse, violente et énigmatique (L'Olivier). Hubert Mingarelli convie de soldats allemands à Un repas en hiver (Stock). Bernard Pivot lance son autobiographie, Quelle est la question? (Nil). La reporter Florence Aubenas raconte La banlieue quand elle ne brûle pas (L'Olivier). La théorie de l'information d'Aurélien Bellanger (Gallimard), suscite un certain engouement avec l'histoire d'un geek milliardaire à une époque où l'internet est omniscient (Gallimard).