Quand les participants à un concours d'habileté international qui utilisent votre produit monopolisent le podium, vos chances d'attirer l'attention augmentent. C'est ce qui vient de se produire avec ApexO, une entreprise de Repentigny, dans un concours militaire de tireurs d'élite tenu en septembre.

Une cinquantaine de tireurs d'élite provenant d'une demi-douzaine de pays, dont les États-Unis, la France et l'Italie, se sont déplacés à la base militaire de Gagetown, au Nouveau-Brunswick, il y a quelques semaines. Ils participaient à une compétition s'étalant sur une dizaine de jours.

Et les trois équipes qui sont montées sur le podium avaient un point en commun: elles utilisaient l'ApexO Firing System (AFS), un outil leur permettant d'ajuster leur mire pour tenir compte de la condition de leur arme, du type de munition employé, de la température, de la pression atmosphérique, de la vitesse ainsi que de la direction du vent, le tout en l'espace de quelques secondes. L'AFS n'est pas le seul système à offrir de telles informations aux tireurs d'élite. Mais selon toute vraisemblance, il est le plus efficace.

«Il y a un pays qui vient d'en tester 25 ou 30 et de choisir le nôtre», se réjouit Benoît Dufresne, président et fondateur d'ApexO.

«Il y a même des applications pour iPhone qui font ça. Mais elles sont généralement limitées à 600 ou 700 m. La nôtre fonctionne jusqu'à 2000 m, voire plus.»

C'est le ralentissement du projectile, et surtout le fait qu'il passe successivement d'une vitesse supérieure, puis égale, puis inférieure à celle du son, qui rend les calculs plus complexes quand la distance augmente.

Dans la cuisine

ApexO est née en 2005, dans la cuisine de M. Dufresne.

«J'ai une passion pour l'informatique et j'avais travaillé pour plusieurs PME, assez pour vouloir me lancer dans l'adaptation et la conception de logiciels sur mesure pour elles.»

Mais ses études en génie mécanique l'avaient aussi amené à côtoyer des tireurs d'élite lorsqu'il travaillait pour SNC Technologies, une division consacrée au militaire.

«J'ai vu que les outils qu'ils utilisaient n'étaient pas très précis, j'avais donc aussi cette idée en tête en lançant l'entreprise.»

Cette idée est en fait devenue le premier projet de l'entreprise, puisque M. Dufresne bénéficiait déjà des contacts nécessaires.

«De 2005 à 2007, j'ai travaillé à concevoir les algorithmes. Puis je suis allé voir une unité de l'armée canadienne avec une maquette et ces gens sont rapidement devenus des clients.»

Les contrats militaires étant ce qu'ils sont, ce n'est qu'en 2011 que M. Dufresne a finalement pu commencer à essayer d'exporter son produit. Mais même à ce moment, la chose n'était pas simple.

«Je n'avais pas le droit de dire à des clients potentiels qui s'en servait déjà. Ça a beaucoup ralenti notre croissance.»

Un nouveau programme fédéral, le Programme d'innovation Construire au Canada (PICC), est venu tout changer. En démontrant l'innovation dont faisait preuve son produit, ApexO a pu signer en février dernier un contrat de fourniture et de formation pour l'ensemble de l'armée canadienne.

«En plus, ça nous permet de dire que l'armée canadienne l'utilise et même de dire à des clients potentiels d'aller lui demander son avis.»

Les tireurs d'élite de l'armée canadienne bénéficiant d'une réputation enviable, la chose a son poids et devrait accélérer les efforts de commercialisation actuellement entrepris par ApexO, qui a aussi convaincu l'unité d'élite de la police de Montréal et quelques armées européennes.

Deux volets

Sinon, ApexO n'a pas oublié le deuxième volet de son plan original, la conception de logiciels industriels pour les PME.

«Une des forces de l'AFS, c'est sa convivialité, fait valoir M. Dufresne. C'est ce qu'on veut amener aussi aux logiciels d'entreprise.»

Cette stratégie à deux volets tourne autour de deux objectifs: doubler les débouchés pour la recherche et développement de l'entreprise, mais aussi trouver une source de revenus plus récurrente que les contrats militaires, dont les cycles de vente peuvent prendre de trois à cinq ans.