L'ingénieur Luc Jalbert voue une admiration sans bornes à l'inventeur de la motoneige et fondateur de la multinationale du domaine des transports Bombardier. «Mon idole, c'est Joseph-Armand Bombardier. J'ai toujours été fasciné par cet individu. J'ai lu sa biographie et j'ai vu le téléfilm. Je pense à lui souvent», dit-il, en entrevue. Comme son modèle, Luc Jalbert a commencé à travailler à son invention dans son garage. Il cherchait la réponse à une question qui l'obsédait: comment parvenir à serrer un bouchon de façon efficace?

Quinze ans plus tard, il s'est vendu 150 bouchonneuses beltorque de par le monde. Une invention 100% québécoise fabriquée par la trentaine d'employés de Jalbert Automatisation de Boisbriand.

La beltorque est une bouchonneuse automatisée qui facilite la vie des pharmas et des multinationales de cosmétiques. Une curiosité au Québec parce que l'équipement automatisé industriel est de coutume de conception européenne.

La Presse a rencontré M. Jalbert et son directeur des ventes, Alain Lamer, vendredi dernier à l'usine de 10 000 pieds carrés de Jalbert Automatisation, rue Ambroise-Lafortune, tout près du Centre d'excellence Sports Rousseau où évolue l'équipe de hockey junior L'Armada.

La propreté et la blancheur des lieux de production surprennent, un souci qui lui vient de ses 10 années passées au service d'une grande pharma, explique le fondateur.

Sur les chaînes de production, les bouchons sont habituellement serrés par un système à disque qui fait de la poussière, qui est difficile à ajuster et qui donne des résultats inconstants, au dire de M. Jalbert. Le machine de M. Jalbert a la particularité de serrer les bouchons par un système de courroies.

La bouteille et le bouchon sont apportés par des deux convoyeurs distincts à la beltorque. La première paire de courroies a pour but de visser le bouchon sur la bouteille, tandis que la seconde a comme tâche de le resserrer.

Ingénieur en production automatisé, diplômé de l'École de technologie supérieure, Luc Jalbert, 46 ans, travaillait en automatisation des emballages dans les années 90 chez Ciba-Geigy, qui s'est fusionnée avec Sandoz pour devenir Novartis.

Ce mariage a sonné le glas de l'usine de Dorval où travaillait M. Jalbert. Le temps était donc arrivé pour lui de concevoir une bouchonneuse plus efficace pour les contenants de pilules.

Un parcours pas si facile

Développer de zéro une machinerie industrielle au Québec n'est pas une sinécure. M. Jalbert a atteint son but avec beaucoup de patience, un coup de pouce apprécié des organismes de développement économique et de la chance, parfois.

«Peu de temps après avoir conçu mon prototype en 2004, un ancien collègue de travail est venu me voir. Il devait serrer très fort ses bouchons, sinon le liquide coulait. Avec ce qu'il utilisait, il endommageait ses bouchons. Un essai et mon prototype lui ont réglé son problème. Très rapidement, j'avais ma première machine sur le marché.»

Durant les années de développement de la beltorque, Jalbert a vécu de contrats d'ajustement sur mesure de machineries. Une autre partie des sous est venue des crédits d'impôt en R&D. «Sans les crédits d'impôt, je ne serais plus en affaires», reconnaît l'homme d'affaires. Les premières versions de la beltorque ont été vendues en 2006.

Aujourd'hui encore, les contrats sur mesure contribuent pour environ la moitié du chiffre d'affaires de Jalbert.

En 2011, l'entrée au capital-actions du distributeur de chaînes de production de produits pharmaceutiques NJM Packaging, appartenant aux fils de Charles Lapierre, de la région de Montréal, a complété le montage financier juste à temps pour la reprise des commandes.

Après un passage à vide causé par la crise économique en 2009 et 2010, les commandes sont reparties à la hausse depuis 2011. «On a vendu pas loin de 60 beltorque l'année dernière. Notre objectif est de vendre 75 à 100 machines par année», dit M. Jalbert. Pour ce faire, la PME devra réaliser une percée dans l'agroalimentaire.

«J'entends parfois les gens dire untel fait lui aussi des beltorque. L'industrie utilise notre nom», dit le président de Jalbert Automatisation.

Si l'inventeur du Ski-doo était encore de ce monde, on peut aisément imaginer qu'il serait admiratif du travail de Luc Jalbert.

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L'ENTREPRISE EN UN COUP D'OEIL

- Chiffre d'affaires : 4 millions en 2012

- Employés : 30, dont 12 ingénieurs

- Fondation : 1998

- Propriétaires : Luc Jalbert (51%) NJM Packaging (49 %)