Édouard Aubé et Francis Tourigny, de l'entreprise AESP à Saint-Eustache, semblent avoir un cheval gagnant entre les mains.

Ils viennent de mettre au point des luminaires extérieurs qui s'autosuffisent en énergie. Alimentés par des panneaux solaires et une éolienne à axe vertical, ces luminaires écolos sont déjà, on le devine, très convoités. La PME vient d'ailleurs de signer un partenariat avec des investisseurs de Dubaï. Et elle se prépare à envahir l'Inde et plusieurs pays d'Afrique, où ses produits sont actuellement mis à l'essai dans des rues, des stationnements et sur des boulevards.

«Dans des pays où l'approvisionnement en électricité pose problème, nos luminaires sont la solution idéale. Toutefois, on voit que ça répond à une demande plus large, car on reçoit des demandes du Brésil, d'Italie et même des États-Unis. Il y a même des villes québécoises qui ont manifesté de l'intérêt et avec qui on va s'asseoir pour discuter», explique Édouard Aubé, président et fondateur de AESP.

Vive le hasard

La PME de 30 employés agissait jusqu'à tout récemment à titre de sous-traitant dans la fabrication de pièces en acier, notamment pour le compte d'Hydro-Québec et d'entreprises oeuvrant en pétrochimie. Mais Édouard Aubé songeait depuis longtemps à créer son propre produit. Le hasard (ils habitent le même quartier) lui a fait rencontrer Francis Tourigny.

M. Tourigny, diplômé en génie, a longtemps travaillé dans le domaine des énergies vertes. Il a d'ailleurs sillonné la planète dans le cadre de ses autres emplois. Il connaissait donc bien les besoins dans les pays où les infrastructures électriques laissent à désirer. L'idée de créer des luminaires fonctionnant au solaire et à l'éolien s'est donc rapidement imposée.

Deux ans de recherches et un million de dollars plus tard, les deux hommes et leur équipe ont accouché d'un concept qui suscite beaucoup d'enthousiasme, disent-ils. AESP a récemment signé une entente de partenariat avec des hommes d'affaires de Dubaï. Il est d'ores et déjà prévu qu'une usine de fabrication de poteaux y sera aménagée afin de réduire les coûts de transport.

Trois produits

«Rien que pour envoyer cinq luminaires là-bas, ça nous a coûté des milliers de dollars. Quand la nouvelle usine ouvrira, on n'aura qu'à expédier les composantes électroniques qui seront fabriquées ici à Saint-Eustache», affirme Francis Tourigny.

Pour l'heure, la PME offre trois produits différents, lesquels sont vendus de 5000$ à 8000$. À ce prix-là, ils disent être concurrentiels, car ils offrent un produit unique, durable (ils utilisent des ampoules LED) et qui ne coûte rien à alimenter en énergie. Les deux entrepreneurs ne se sont d'ailleurs pas contentés de fabriquer des luminaires autosuffisants en énergie; ils les ont également rendus «intelligents». Ainsi, ils peuvent à distance, contrôler l'intensité lumineuse, éteindre ou allumer le luminaire de leur choix, vérifier si la pile de chacun d'entre eux est suffisamment chargée, si l'ampoule DEL doit être remplacée, etc.

Pour l'heure, la division luminaire de AESP ne génère aucun revenu. Mais ça ne saurait tarder, croient les deux hommes d'affaires. Rien qu'avec leur nouveau partenaire de Dubaï, les ventes des produits québécois pourraient se chiffrer en milliers d'unités à très court terme. «On commence le stade de la commercialisation», dit Édouard Aubé.

Une usine en Inde

«Et en Inde, où nous songeons éventuellement à ouvrir une usine de poteaux, le potentiel est énorme. Le gouvernement investit des dizaines de milliards dans la construction de liens autoroutiers. Il y a là un marché à prendre», ajoute M. Aubé, un ancien coureur automobile (Formule Ford et 2000) qui a été parrainé par le mécène Stephen Bronfman. C'est d'ailleurs M. Bronfman qui a financé AESP à ses débuts.

Le chiffre d'affaires de l'entreprise se situe entre 3 et 5 millions. En 2012-2013, la PME prévoit doubler, sinon tripler ses revenus. Si l'engouement pour leurs produits se maintient, «the sky is the limit», croient les entrepreneurs. D'ailleurs, l'entreprise n'abandonnera pas sa division de fabrication de pièces en acier pour autant. Toutefois, il se pourrait que la division éclairage s'installe sous peu dans ses propres locaux.

Les deux hommes d'affaires savent pertinemment qu'ils vont éveiller la concurrence et qu'on ne leur fera pas de quartier. «Nous sommes en instance de brevets et nous avons de très bons avocats qui nous conseillent», disent-ils. Outre leur entente avec des investisseurs du Moyen-Orient, les deux hommes recherchent de nouveaux capitaux pour la suite des choses. Ils sont à l'affût, demeurent très prudents et souhaitent faire un choix... éclairé.