Malchance : une perte d'emploi à 52 ans. Mais peut-être est-ce aussi un signal. Josiane peut-elle ralentir le rythme jusqu'à une retraite prise à 60 ans ?
LE PROBLÈME
Josiane, âgée de 52 ans, a perdu son emploi en juin dernier.
« Ça fait deux fois en trois ans », indique-t-elle.
Malchance...
Elle touchait un salaire d'environ 63 000 $, auquel s'ajoutaient de 12 000 à 15 000 $ supplémentaires avec un travail autonome, durant la période des impôts.
« Je travaillais beaucoup, confie-t-elle. Ça fait longtemps que je suis seule, et j'ai beaucoup d'inquiétude à ce propos. »
Le stress et la fatigue accumulée l'incitent à ralentir.
« Est-ce que je peux me permettre de travailler à temps partiel, peut-être ne plus cotiser à mon REER, et prendre une retraite agréable à 60 ans ? »
Agréable à quel point ? Elle conserverait son train de vie actuel : elle dépense entre 25 000 et 26 000 $ par année. « Par contre, je vais au soleil environ deux fois par année. »
Elle habite depuis quelques mois le haut d'un duplex, qu'elle a acheté en copropriété indivise. L'appartement a été payé 230 000 $.
« C'est certain qu'en 2016, la situation a changé, car je n'ai plus d'hypothèque, souligne-t-elle. J'habite un appartement plus petit, et mon fils est maintenant totalement indépendant. »
Josiane possède une petite auto, dont le prêt sera soldé en 2021, à raison de 136 $ toutes les deux semaines.
Posons le problème.
Si Josiane travaille à temps partiel, combien doit-elle gagner annuellement au cours des huit prochaines années pour prendre une retraite complète à 60 ans ? Sans doute ne peut-elle pas se contenter de son travail autonome de 15 000 $ par année...
Deuxième scénario : comment se présenterait la situation si, de 60 à 65 ans, elle ne conservait que son travail autonome ? Jusqu'à quel point pourrait-elle ralentir le rythme de 52 à 60 ans ?
LA VIE EN CHIFFRES
• Josiane, 52 ans
• Revenus avant perte d'emploi : 75 000 $
• REER : 287 000 $
• CELI : 42 800 $
• Placements non enregistrés : 72 000 $
• Aucun régime de retraite complémentaire
• Propriété : valeur de 230 000 $, libre d'hypothèque
• Dépenses annuelles : environ 26 000 $
LA RÉPONSE
Pour répondre à ces questions, la planificatrice financière Nathalie Bachand, du cabinet Bachand Lafleur, groupe conseil, a fait une démarche inverse de la traditionnelle planification de retraite.
Elle fixe d'abord un âge raisonnable pour épuiser les épargnes de Josiane. Elle a retenu 96 ans, âge que Josiane n'a que 25 % de chances d'atteindre.
Elle fait ensuite un peu d'époussetage dans les épargnes.
« Josiane devrait transférer le maximum autorisé de ses placements non enregistrés au CELI annuellement », avise Mme Bachand. Les intérêts gagnés sur ces sommes commenceraient alors à s'accumuler à l'abri de l'impôt.
Ses épargnes non enregistrées seraient entièrement transférées au CELI dans environ six ans. Elle y aura alors accumulé 105 000 $.
Josiane cesserait cependant de cotiser à son REER. Avec un rendement de 3,4 %, son pécule en REER, qui s'élève actuellement à 287 000 $, atteindrait 386 000 $ dans huit ans.
Organisons les revenus, maintenant.
Josiane cesse de travailler à 60 ans et, jusqu'à 65 ans, tire ses revenus de son REER et de son CELI.
« À compter de cette date, elle pourra demander sa pension de Sécurité de la vieillesse de 6846 $ et une rente de la RRQ d'environ 12 000 $. » Elle les complétera avec des retraits de ses REER et CELI, de manière à maintenir ses dépenses indexées à l'inflation.
Une fois ces paramètres en place, Nathalie Bachand lance la machine à calcul. Voici ce qui en émerge.
De 52 à 60 ans, Josiane peut se contenter d'un revenu d'environ 27 000 $ par année, en incluant ses revenus de travail autonome. « Cela lui procurerait environ 20 000 $ de revenus nets après impôts et charges sociales », calcule-t-elle.
Pour équilibrer son budget de 26 000 $, Josiane devra donc retirer chaque année 6000 $ de ses placements non enregistrés.
Dans ces conditions, ses actifs s'épuisent à 96 ans : c'était les prémisses du calcul de notre planificatrice.
LES HYPOTHÈSES UTILISÉES
PORTEFEUILLE MODÉRÉ
60 % de revenus fixes, avec frais de gestion de 1,5 % pour un rendement moyen de 3,4 %
INFLATION
de 2,1 %
DÉCAISSEMENT TOTAL DES ACTIFS
96 ans, 25 % de chances d'être encore en vie pour une femme de 52 ans
Source : normes 2016 de l'Institut québécois de planification financière
AUTRE SCÉNARIO
Josiane pourrait-elle ralentir encore plus son rythme de travail, mais le maintenir jusqu'à 65 ans ?
Cette fois, le calcul montre que Josiane pourrait se contenter de 52 ans à 65 ans d'un revenu de 17 000 $ par année, ajusté à l'inflation.
« Elle pourrait ne conserver que son travail autonome si elle réussissait à augmenter ses revenus à 17 000 $ », conclut Mme Bachand. « Elle videra évidemment ses placements non enregistrés beaucoup plus rapidement, soit dans quatre ans, et elle utilisera tous ses CELI pour maintenir ses dépenses jusqu'à 65 ans. »
Encore une fois, notre planificatrice a établi son calcul sur la base d'un épuisement des actifs à 96 ans.
Avec ce scénario, Josiane travaille plus longtemps, mais moins intensivement. Cela lui évite aussi d'avoir à trouver un nouvel emploi.
Dans les deux cas, la maison n'a pas été vendue.
Josiane peut déjà se sentir un peu plus libre.