Wall Street a terminé le mois de juillet sur sa performance hebdomadaire la plus médiocre en deux ans et s'est enfoncé davantage au début de ce mois, conduisant des investisseurs à penser que la correction tant annoncée est là. Et ce ne serait pas une mauvaise chose.

Les corrections boursières font partie intégrante des cycles financiers. Comme les orages qui ont l'avantage de rafraîchir l'air et de nettoyer les lieux lors de canicule, c'est une reprise de contact avec la réalité et l'occasion d'écarter de la Place du marché les spéculateurs trop demandant ou les investisseurs trop frileux.

« Si vous êtes dans le marché, vous devez savoir qu'il va y avoir une baisse et que les prix vont plafonner et que vous allez voir une correction de 10 % tous les deux ans », rappelait le gestionnaire vedette Peter Lynch en entrevue sur la chaîne télé PBS en 1996.

« Si vous n'êtes pas prêt pour cela, vous ne devriez pas être dans le marché boursier. Je veux dire, l'estomac est l'organe clé, ici. Ce n'est pas le cerveau. Avez-vous l'estomac pour ce genre de baisse ? », disait celui qui a fait du fonds Fidelity Magellan l'un des plus gros au monde dans les années 80 en réalisant un rendement annualisé moyen de 29 %.

Wall Street est à sens unique depuis trois ans. La reprise boursière n'a pas vu la moindre déviation de plus de 10 % depuis 2011. Tout au plus, un repli d'environ 5 % généralisé dans le monde en début d'année a été vite effacé en 11 séances d'affilée de hausse globale et pratiquement en ligne droite, en février.

Une opportunité

Depuis leur sommet de la fin-juillet, le S & P 500 et le S & P/TSX ont abandonné environ 1,5 % de sa valeur, reprenant le lendemain une partie du terrain abandonné la veille. C'est dire que le sixième seulement du chemin de la correction aurait été parcouru.

« Les investisseurs semblent presque aussi indifférents au risque au même degré qu'ils étaient en 2007 », constate John Zechner, président de la firme J Zechner Associates, sur BNN. Le fonds canadien a pris ses bénéfices dans les secteurs de l'énergie, de la finance et des technologies et se promet d'y revenir quand les cours auront baissé de 5 à 10 %.

Les corrections représentent en effet de belles occasions d'investissement à bon compte. C'est notamment ce qu'enseigne Mary Buffett dans le livre The New Buffettology consacré à Warren Buffett. « Warren sait très bien que si le marché haussier n'est pas encore dans un bulle, les corrections et mouvements de panique dureront peu de temps et seront d'excellentes occasions d'achat », écrit celle qui fut sa bru durant 12 ans.

Dans son livre Winning on Wall Street, le gestionnaire vedette Martin Zweig, réputé pour avoir prédit le krach de 1987, note que l'absence de correction l'avait notamment alerté. « Les similitudes de 1929, 1946, et 1962 m'inquiétaient, écrit M. Zweig. Le schéma familier est la surévaluation des prix par rapport aux bénéfices et les rendements élevés ainsi que la poussée des cours en ligne droite sans correction majeure depuis des années. »

Les valorisations des marchés d'actions restent encore raisonnables, soutiennent toutefois plusieurs analystes qui croient que les marchés ont encore de la marge pour progresser. « Le climat économique reste sain. Et donc, la volatilité devrait diminuer et les actions rebondir », pense notamment Jonathan Golub, stratège du marché américain chez RBC Marchés des Capitaux.

La crainte d'un repli boursier est exacerbée par l'approche inéluctable du relèvement des taux de la Réserve fédérale américaine, peut-être dès l'année prochaine. Les marchés dopés depuis cinq ans par les liquidités injectées par les banques centrales appréhendent surtout un sevrage trop rapide.

La bulle éclate en Europe

Tandis que les marchés nord-américains mesurent leur fragilité, la correction est évidente sur les Bourses européennes.

L'économie décevante a plongé dans le rouge plusieurs grands indices cet été. Le DAX allemand a chuté de plus de 10 % en quatre semaines avant de se redresser légèrement ces dernières séances.

Les indices généraux des Bourses de Paris et Madrid accusent tous deux des reculs de 8,2 % depuis leur sommet de juin. En moyenne, les grandes entreprises européennes comme L'Oréal, Total, Airbus ou la Deutsche Bank ont perdu 7,8 % de leur capitalisation boursière, suivant l'indice Euro Stoxx 50.