La Bourse enrichit souvent, mais elle peut aussi servir les bonnes causes en récompensant les entreprises qui respectent l'environnement et leurs salariés. Voilà en tout cas ce que recherchent les fonds éthiques qui se développent depuis quelques années. En cette dernière journée des festivités de Divers-Cité, la place du marché s'ouvre sur deux rares expériences d'investissement dans des titres « gay friendly ».

Investir « gay-ment »

En France, le gestionnaire Turgot Asset management a lancé en février 2013 le « Rainbow fund » un fonds d'actions internationales destiné à la communauté LGBT (lesbienne, homosexuelle, bisexuelle et transsexuelle). Son slogan : « Un fonds dans l'air du temps pour investir «Gay-ment». » Tellement dans l'air que la création du fonds arc-en-ciel a été annoncée le jour même du vote de l'Assemblée nationale sur le mariage pour tous.

Le portefeuille d'actions du fonds hyperspécialisé - non offert au Canada - ne comprend que des sociétés dont la production s'adresse de manière identifiable à la population homosexuelle ou qui ont mis en place des normes antidiscriminatoires explicites à l'égard de cette même population. On y retrouve notamment des actions d'Apple, Google, Dior Christian, Estee Lauder et Peugeot.

Les promoteurs se disent convaincus que ces sociétés réalisent des performances supérieures parce que les salariés y sont mieux considérés. Une étude menée en 2009 par l'Economics and Econometrics Research Institute démontre d'ailleurs que la mise en place de politiques internes socialement responsables va de pair avec de meilleures performances boursières. Les auteurs de cette étude ont mesuré qu'entre 2002 et 2006, les sociétés les mieux notées par leurs employés LGBT ont obtenu une meilleure valorisation boursière.

« Nous nous intéressons également aux sociétés pouvant bénéficier du fort pouvoir d'achat de la population homosexuelle afin de transformer ce mode de consommation en plus-value boursière », ajoute l'une des gestionnaires, Marion Casal, dans les colonnes du quotidien financier français Les Échos.

La performance du jeune fonds n'est toutefois pas probante jusqu'à maintenant. Le fonds arc-en-ciel avec ses frais de gestion élevés de 2,5 % n'est jamais arrivé à surpasser l'indice MSCI World. Le rendement depuis sa création il y a moins d'un an et demi est de 12,9 %, presque la moitié des 25,5 % affichés par son indice de référence.

« Il n'y a pas d'indice sectoriel correspondant à la thématique du fonds Rainbow donc au moment de sa création, il nous avait semblé bien de prendre le MSCI World. Il s'avère à l'usage que cet indice n'est pas adapté, c'est un indice trop large incluant des secteurs sur lesquels Rainbow n'investit pas », nous a expliqué la gestionnaire principale, Sandrine Cauvin.

« Nous sommes en train de modifier cela en prenant un objectif annualisé de performance. Nous allons fixer comme objectif de gestion sur une durée de placement recommandée de 5 ans minimum, une performance annualisée supérieure à 7 % pour le fonds Rainbow. Comme cela est le cas déjà chez nous pour notre fonds de petite capitalisation. »

La finance « gay-friendly »

Aux États-Unis, un fonds semblable lancé en 1996 a été emporté par la vague de fusions et acquisitions. Juste quand l'expérience devenait concluante.

Le fonds Meyers Pride Value, créé par la gestionnaire Shelly Meyers, de Beverly Hills en Californie, avait pour mission d'investir dans des entreprises « gay-friendly » ayant des politiques antidiscrimation concernant l'orientation sexuelle.

« C'est révélateur de l'esprit d'ouverture de l'équipe de gestion et cela me dit qu'ils sont probablement plus conscients de ce que sera la force de travail et la clientèle du XXIe siècle », commentait Mme Meyers, sur CNN Money, en mars 2001.

Son bilan parlait pour elle. Le fonds de la fierté avec ses avoirs dans des entreprises comme JP Morgan Chase & Co et Johnson & Johnson s'était toujours classé parmi les 50 meilleurs fonds diversifiés américains (sur un total de 4200), chacune des cinq années précédentes. Son rendement annualisé de 11,3 % sur trois ans le plaçait devant 84 % de ses semblables.

Sa « forte performance depuis son origine » fut soulignée lors de son rachat en juillet 2001 par le groupe Citizens Funds. La mission du fonds devenu le Citizens Value fut toutefois élargie dès lors pour inclure d'autres critères consensuels de responsabilité sociale et environnementale. Fort d'un capital géré total de 1,7 milliard US, le groupe du New Hampshire s'est d'ailleurs illustré en imposant sa vision lors d'importantes assemblées générales.

Le fonds responsable a été refondu plus tard avec le Sustainable Core Opportunities Fund du groupe Sentinel. Ce dernier compte un actif de 247,7 millions US et affiche un rendement annualisé de 15,5 % sur cinq ans, soit un point de plus que le S & P 500.

Sur le web : consultez le site de l'Economics and Econometrics Research Institute https://www.eeri.eu/

Les entreprises les mieux perçues de la communauté LGBT américaine