La Bourse regorge de dictons et l'arrivée du mois de Marie rappelle inévitablement aux investisseurs la vieille maxime « Vends en mai et pars en vacances », traduction libre de « Sell in May and go away », un peu comme une invitation à jouer dès maintenant la cigale pour ne revenir sur les marchés qu'une fois la bise venue.

La stratégie renvoie à l'idée qu'il y a des saisons en Bourse. On suppose que les gens sont plus portés à prendre des risques dans les premiers mois de l'année et cherchent à alléger leur portefeuille avant l'été pour avoir l'esprit tranquille.

L'adage a des fondements statistiques impressionnants qui remontent presque au temps de Jean de La Fontaine. Il a été vérifié dans 36 pays par l'American Economic Review et paraît évident depuis 1694 en Angleterre.

Aux États-Unis, le Dow Jones a ainsi progressé de 7,5 % du 1er novembre au 30 avril, mais n'a augmenté en moyenne que de 0,3 % les six mois suivants, selon le Stock Trader's Almanac dont les statistiques remontent jusqu'en 1950.

L'adage vaut aussi au Canada. UBS Securities Canada a démontré l'an dernier que plus de 90 % du rendement de l'année à la Bourse de Toronto est réalisé entre les mois de novembre et de mai. Cela est surtout attribuable au fléchissement du marché des ressources jusqu'à l'arrivée de l'automne. Le prix du pétrole a notamment tendance à atteindre des niveaux plus élevés en février, mars, avril et mai.

Évidemment, il y a des exceptions. La Bourse a notamment infirmé la théorie avec le splendide revirement de l'été 2009. On ne saurait oublier d'ailleurs que les périodes automnales ont concentré le plus grand nombre de krachs boursiers depuis 60 ans.

Roulement saisonnier

La « saisonnalité » dans les marchés dépend aussi des secteurs. Par exemple, les titres des brasseurs de bière représentent de bonnes occasions d'achat en hiver, et de bonnes occasions de vente en été. La firme Canaccord Adams a aussi vérifié que le groupe Mines et métaux du TSX offre des rendements moyens négatifs en été depuis plus de 20 ans (- 29 % l'été dernier !).

Morale de cette histoire : contrairement à la cigale paresseuse de la fable, mieux vaut toujours rester actif en Bourse.

Le meilleur est-il déjà derrière nous ? Alors que débute le mois de mai, les investisseurs avisés s'interrogent. Et pour cause.

Les deux saisons de la Bourse

2012-2013 Dow TSX

1er oct. au 30 avril 9,8 % 0,7 %

1er mai au 30 sept. 2,9 % 3,8 %

Dopé par les injections de la banque centrale, le marché boursier américain a connu une meilleure performance avant les vacances de 2013 tandis que la Bourse canadienne tardait à se redresser.

2011-2012 Dow TSX

1er oct. au 30 avril 16,3 % 2,3 %

1er mai au 30 sept.  10,9 % 8,4 %

Le 30 avril 2011, le Dow touche son sommet de l'année. Ceux qui vendent en mai se privent toutefois d'un rendement additionnel dans les deux chiffres. Du côté canadien, les gains ont été nettement plus forts l'été venu après une année de valse-hésitation.

2010-2011 Dow TSX

1er oct. au 30 avril 16,1 % 11,7 %

1er mai au 30 sept. - 11,2 % - 14,1 %

La théorie de la saisonnalité des marchés a particulièrement bien servi les investisseurs tant sur le marché canadien qu'américain en 2011-2012. Du sommet de la fin du mois d'avril, le marché subit une correction de plus de 15 % les mois suivants avec la détérioration du marché de l'emploi américain.

2009-2010 Dow TSX

1er oct. au 30 avril 6,6 % 5,4 %

1er mai au 30 sept. 7,6 % 6,9 %

Au sortir de la crise financière, les marchés entreprennent une course que même les facteurs saisonniers ne peuvent ralentir.

2008-2009 Dow TSX

1er oct. au 30 avril - 21,5 % - 11,5 %

1er mai au 30 sept. 11,4 % 7,5 %

En 2008, année catastrophique pour les Bourses, il valait mieux jouer la cigale en haute saison et faire la fourmi l'été venu. L'épargnant qui aurait suivi le dicton « Sell in May » en 2009 aurait perdu beaucoup d'argent.