Deux grandes banques devront rembourser les clients qui ont dû payer une pénalité pour avoir brisé leur hypothèque avant l'échéance. La juge Marie-Christine Laberge, de la Cour supérieure, a rendu une décision en ce sens, le 21 août dernier, dans le cadre de deux recours collectifs contre la Banque TD et la Banque de Montréal.

Voilà une belle victoire pour Option consommateurs qui pilote le dossier depuis huit ans, même si la cause ira probablement en appel. «Nous songeons sérieusement à porter le jugement en appel et de ce fait, nous ne pouvons commenter davantage», a dit Ronald Monet, porte-parole de la Banque de Montréal.

Le recours s'attaquait à la méthode de calcul de la pénalité en cas de rupture d'hypothèque. Lorsqu'un client brise son hypothèque avant la fin du contrat, la banque exige une pénalité. Mais dans le calcul de cette pénalité, les banques ne tiennent pas compte du privilège de remboursement anticipé qui permet aux clients de rembourser 10% à 20% du capital emprunté, à chaque année, sans pénalité.

Dans leurs actes hypothécaires, la plupart des banques empêchent l'utilisation de ce privilège lorsque le client rembourse le solde au complet. Mais dans les contrats de la Banque de Montréal et de la TD, les clauses étaient floues.

À ce chapitre, «la juge a été très dure envers les banques», a commenté Dominique Gervais, avocate chez Option consommateurs.

«Il faut faire tout un exercice mental pour comprendre comment sera calculée la pénalité!» peut-t-on lire dans le jugement. Certains actes indiquent trois hypothèses de calcul, dont une compte quatre possibilités. «Incompréhensible», indique la juge en caractère gras. Et dire qu'un règlement force les banques à s'exprimer dans un langage simple, clair et concis!

La banque est responsable de toute ambiguité ou imprécision dans les contrats qu'elle prépare et impose à ses clients, a tranché la juge.

Les banques plaidaient aussi qu'elles n'étaient pas tenues d'accorder automatiquement un privilège aux clients qui n'en faisaient pas fait la demande. Mais cet argument n'a pas été retenu, car ce serait, «permettre à la banque de s'enrichir au détriment du droit de ses clients».

Depuis 2004, les deux banques ont clarifié leur contrat... aux dépens des clients qui ne peuvent plus utiliser le fameux privilège lorsqu'ils résilient leur hypothèque avant la fin.

Gros problème actuel

Mais le calcul des pénalités demeure encore très flou, ce qui donne de sérieux maux de tête aux consommateurs.

Généralement, la pénalité équivaut à trois mois d'intérêt ou au «différentiel du taux d'intérêt», selon la formule qui donne la pénalité la plus élevée. Avec la chute des taux d'intérêt, c'est souvent le différentiel qui s'applique.

Pour se libérer de leur prêt, les clients doivent donc verser une pénalité qui correspond à la différence entre l'ancien et le nouveau taux. Par exemple, si l'hypothèque a été conclue à 5% et que le taux actuel a fondu à 3%, il faudra payer 2% d'intérêts sur le solde du prêt.

Le hic, c'est que les banques n'utilisent pas le taux de l'hypothèque (ex: 5%) mais plutôt le taux affiché au moment de la signature (ex: 7%). Pourtant, on sait que le taux affiché est facilement 2% plus élevé que le «vrai» taux négocié. Une immense différence! Cela peut gonfler la pénalité de plusieurs de milliers de dollars.

Mais les clients ne peuvent pas s'en douter. «La clause est incompréhensible et mal divulguée», déplore Me Gervais. Bien malin le consommateur qui parvient à la repérer dans un acte hypothécaire de 50 pages. Et de toute façon, le libellé de la clause est trop flou pour que le client puisse faire le calcul.