Chaque samedi, un financier différent répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Jean-René Adam, de la firme Hexavest.

À votre avis, quel est l'événement le plus significatif des derniers jours à la Bourse?

Les données économiques de façon générale. La plupart des statistiques ont surpris positivement cette semaine. Les investisseurs étaient passés rapidement d'une forte complaisance face à l'économie à une anxiété extrême. Nous sommes d'avis que l'économie mondiale va continuer de se détériorer dans les prochains mois, mais pas aussi rapidement que ce que les investisseurs étaient rendus à le penser. Le rebond boursier observé cette semaine est normal, mais je m'attends à ce que les indices reviennent plus bas.

Quel indicateur suivez-vous le plus attentivement en ce moment?

Tout ce qui touche à la crise en Europe est très important. Il faut vite arriver avec des solutions pour recapitaliser les banques et stabiliser le crédit des pays périphériques. Les solutions seront impopulaires et donc très difficiles à prendre. Il n'y a pas de solution magique. Pour recapitaliser les banques, est-ce que les pays vont décider d'injecter plus d'argent? Si oui, il y a un risque d'aliéner la population et un risque de voir certains pays qui injecteraient des fonds être décotés par les agences de crédit, ce qui mettrait l'euro un peu plus en péril.

Il n'y a pas une solution en particulier que je privilégie et je ne suis pas certain que ça va bien se régler. Nous allons encore entendre parler de ce dossier dans six mois.

Que feriez-vous avec 10 000$ à investir?

Un portefeuille conservateur avec une bonne partie dans des obligations de haute qualité, des titres boursiers défensifs qui offrent un bon dividende, comme les télécommunications, les pharmaceutiques et aussi une petite partie en titres aurifères, comme protection contre les gestes posés par les banques centrales.

Dans les télécoms, je pense à des titres comme BCE, Bell Aliant, Manitoba Telecom et Telus.

Du côté des pharmaceutiques, on peut se tourner vers Bristol Myers, Merck et Pfizer.

Il s'agit de compagnies avec de bons bilans, des produits non cycliques et qui versent de gros dividendes.Chez les aurifères, pour offrir une protection contre la perte de confiance envers les devises, je préfère Kinross et Agnico-Eagle.

Ça protège contre les risques macroéconomiques comme, par exemple, un éclatement de l'euro ou la faillite d'une grande banque.

Quel placement évitez-vous à tout prix?

Les titres de biens de luxe dans le secteur de la consommation discrétionnaire comme Louis Vuitton (LVMH), Saks, BMW et Nordstrom. Les consommateurs les mieux nantis ont vite rebondi après récession et ont recommencé à acheter des biens dispendieux. Les titres de cette catégorie ont rapidement dépassé leurs sommets de 2007. Nous croyons que la confiance des riches consommateurs sera affectée par la baisse de la Bourse, les mises à pied massives en finance ainsi que par les risques d'un retour en récession.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus présentement?

Il ne reste plus beaucoup d'outils pour relancer l'économie mondiale et les gens ne semblent pas vraiment le réaliser. Les taux d'intérêt sont déjà près de zéro dans la plupart des pays développés et les gouvernements n'ont plus les moyens de stimuler l'économie. C'est sans compter l'état de paralysie (gridlock) du gouvernement américain et de l'Union européenne.

Jean-René Adam est chef des placements adjoint et vice-président, Marchés nord-américains chez Hexavest à Montréal. Cette firme gère environ huit milliards de dollars d'actifs. Jean-René Adam est chez Hexavest depuis six ans. Auparavant, il travaillait à la Financière Banque Nationale.