Vous êtes propriétaire d'une terre agricole ou d'un lot boisé. Vous voulez léguer ou céder votre bien de votre vivant à vos enfants.

L'impôt exigible sur le gain en capital réalisé depuis l'acquisition viendra-t-il amputer votre don?

Règle générale, lorsqu'on donne ou lègue un actif ou un bien immobilier à un enfant, on doit acquitter l'impôt sur le gain en capital réalisé sur ce bien. La moitié du gain réalisé entre l'acquisition et la cession du bien doit être ajoutée aux revenus. Rappelons que la résidence principale est exemptée de l'impôt sur le gain en capital.

Mais qu'en est-il d'une terre agricole ou d'un lot boisé?

Deux mesures fiscales s'appliquent à cette question.

Le transfert entre générations

Bonne nouvelle. Le fisc permet de donner ou de vendre à son enfant un bien immobilier agricole sans impact fiscal... à certaines conditions.

Une terre agricole peut être transmise à un descendant sans déclaration de gains en capital, dans la mesure où elle a été utilisée principalement dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise agricole. Il faut également que le contribuable qui cède ce bien, ou encore son conjoint, son enfant ou son parent (son père, sa mère ou un de ses grands-parents), ait pris une part «active, régulière et continue» dans cette exploitation.

Ce transfert peut s'effectuer en faveur d'un enfant, d'un enfant adopté ou naturel, de l'enfant du conjoint, d'un petit-enfant, et même d'un arrière-petit-enfant.

Depuis 2001, «cette règle s'applique également aux boisés qui sont exploités et soumis à un plan d'aménagement», indique Marc St-Roch, directeur du Service de comptabilité et de fiscalité à l'Union des producteurs agricoles.

Ce plan d'aménagement devra avoir été approuvé par un ingénieur forestier. Ici aussi, le propriétaire du lot boisé - ou son conjoint, son enfant, ou son parent - devra avoir participé à l'exploitation de ce bien «dans la mesure requise» par ce plan, explique M. St-Roch.

Qu'est-ce que ça signifie? Le spécialiste forestier établira un programme d'entretien et d'amélioration du lot boisé correspondant aux disponibilités du propriétaire (ou celles de son conjoint, etc.). «Il faut avoir mis le temps requis par le plan d'aménagement fait pour ce bois», précise-t-il.

Ce transfert peut se faire sous forme de donation, de vente, et même d'un legs.

Lorsqu'il s'agit d'une donation ou de legs, la terre sera réputée avoir été cédée pour une somme qui correspond généralement au coût d'acquisition par le parent.

La déduction pour gain en capital

Par ailleurs, quelle que soit la personne à qui le bien agricole est vendu, le propriétaire qui s'en défait peut bénéficier d'une déduction pour gains en capital de 750 000$... s'il respecte certains critères, bien sûr.

Diverses exigences s'appliquent selon que ce bien immeuble (terre agricole, lot boisé...) a été acquis avant ou après le 18 juin 1987.

S'il a été acquis avant cette date, ce bien doit avoir été principalement utilisé dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise agricole par le contribuable qui vend le bien, ou encore par son conjoint, son enfant, un de ses parents, ou une société agricole familiale. Cette utilisation doit avoir eu lieu soit pendant l'année de la disposition, soit pendant au moins cinq années non nécessairement consécutives.

Cette terre a été acquise après le 17 juin 1987?

«Le test est différent, indique Marc St-Roch. On demande que, pendant au moins deux ans, cette terre ait été utilisée principalement dans une entreprise agricole». Le particulier - ou son conjoint, son enfant, son parent - doit y avoir participé activement et de manière continue.

S'y ajoute également une exigence de revenus. «Il faut que, pendant une période de deux ans, le revenu brut que la personne a tiré de l'entreprise agricole soit plus important que toutes ses autres sources de revenus», précise Marc St-Roch. Le fisc veut ainsi soustraire à cette disposition «les gens pour qui l'agriculture n'est pas la principale source de revenus», poursuit-il.

Cette exigence de revenu ne s'applique toutefois pas lorsque la terre était exploitée par une société agricole familiale.

Marc St-Roch ajoute une autre nuance, illustrée par l'exemple suivant.

Vous détenez une terre léguée ou transmise par votre père, qui l'a exploitée du temps où il en était propriétaire. Vous décidez de vendre la terre mais l'agriculture n'a jamais été votre principale source de revenus. Avez-vous droit à la déduction pour gains en capital de 750 000$?

«Vous pouvez la vendre aujourd'hui en bénéficiant de la déduction pour gain en capital, parce que votre parent vous a qualifié au test de revenu, car pour lui, l'agriculture était sa principale source de revenu pendant au moins deux ans», indique Marc St-Roch.

S'il s'agit de la vente d'un lot boisé, les règles sont plus strictes que dans le cas d'un transfert entre générations. «Un plan d'aménagement ne suffit pas à qualifier l'exploitation pour la déduction pour gain en capital», indique M. St-Roch. Il doit s'agir d'une véritable entreprise sylvicole.

Prenez note qu'il s'agit ici d'un résumé, auquel des subtilités fiscales byzantines s'ajoutent. Il est préférable de consulter un fiscaliste compétent en ces matières, par exemple en communiquant avec la Fédération régionale de l'Union des producteurs agricoles de votre région (www.upa.qc.ca).