Pour la première fois au Québec, un site internet d'enchères chronométrées mettra demain une voiture neuve aux enchères.

Pour combien s'enlèvera la Honda Civic de 13 985$, sur Bidou.ca? Pour 150$ ou 200$, peut-être, si on se réfère à cet iPhone 4 adjugé à 4,92$, ou ce téléviseur Sony de 40 pouces vendu 3,59$, sur les sites québécois d'enchères à un sou.

Les gagnants, bien sûr, sont ravis. Mais ce sont des enchères d'un genre nouveau, où les enchérisseurs malheureux ne perdent pas que l'enchère: ils perdent aussi de l'argent.

La formule s'approche en fait du jeu ou de la loterie, où les perdants paient indirectement le bénéfice du gagnant... et directement les profits du promoteur.

Comment ça fonctionne?

Les détails varient selon les sites, mais le principe général demeure sensiblement le même.

Prenons comme modèle le site québécois le plus connu, Bidou.ca. L'entreprise a acheté un article - un iPhone 4, par exemple - qu'elle met aux enchères à une heure définie. L'enchère commence à un cent (0,01$), sous un chronomètre qui lance un décompte de 30 secondes. Chaque surenchère d'un internaute fait monter le prix affiché d'un cent et remet le chrono à 30 secondes. L'enchère se termine lorsque le chronomètre tombe à zéro, aucune nouvelle surenchère n'ayant été inscrite depuis 30 secondes.

La subtilité est la suivante: chaque surenchère coûte 1$. Le paiement est effectué sous la forme de bidous, qu'il faut s'être procurés au préalable à 1$ pièce.

Un exemple? Sur bidou.ca, une enchère pour un cellulaire iPhone 4 de 16 go, d'une valeur de 659$, été lancée le 19 octobre dernier à 10h30. L'enchère s'est conclue 46 minutes plus tard, remportée par Bigben1 pour 4,92$.

Pour parvenir à ce résultat, Bigben1 a fait 59 surenchères, chacune lui ayant coûté un bidou de 1$. Son iPhone 4 lui revient donc à 63,92$, un dixième de son prix.

Bravo. Mais il n'y a qu'un seul gagnant. L'enchère a attiré 28 autres participants, dont 5 ont fait plus de 50 surenchères. Vanica est intervenue 98 fois, et a donc perdu l'équivalent de 98$. Angel59 y a consacré 75 de ses précieux bidous.

Une idée géniale

Ce trait de génie a jailli en Allemagne en 2005, sous la raison sociale Swoopo. En décembre 2007, Swoopo a gagné la Grande-Bretagne, puis l'Espagne en mai 2008, les États-Unis et l'Autriche en septembre suivant, et le Canada en juin 2009.

Dans l'ensemble de ses filiales, où plus de 2 500 000 clients sont inscrits, Swoopo met aux enchères plus de 10 000 articles chaque mois.

Un concept aussi ingénieux, et en apparence aussi rentable, ne pouvait que susciter des émules partout dans sa traînée.

Le premier site québécois, pennyblast.com, est apparu à la fin de 2009, mais a fermé en septembre. Bidou.ca, qui a suivi le 16 février 2010, est maintenant le site le plus connu.

Ça ne pouvait pas manquer: déjà, un site s'est donné la mission d'être le guide des enchères chronométrées au Québec (www.encheresaunsou.com). Son créateur, l'infographiste Simon Robert, y a déjà répertorié 19 sites actifs en français au Québec. Le dernier en liste, HuardOmax, a officiellement été lancé le 24 octobre.

Mais ne s'improvise pas encanteur à un sou qui veut. Régulièrement, les petits nouveaux annoncent une fermeture temporaire pour mise à jour et autres ajustements.

Le site Juste1Dollar a ouvert le 14 octobre, pour s'interrompre presque aussitôt: une clientèle beaucoup plus importante que prévu a surchargé le système, a-t-on expliqué. Il a frappé un grand coup, en annonçant pour le 5 novembre prochain la première mise aux enchères d'une voiture neuve au Québec, une Chevrolet Aveo 2010.

Bidou.ca lui a coupé l'herbe virtuelle sous le pied numérique: il met sa Honda Civic aux enchères une semaine plus tôt. La nouvelle fait du bruit, mais le risque est élevé. Le 11 juillet dernier, Bidou.ca avait tâté le terrain en proposant une voiture d'occasion, une première au Québec. La Honda Civic 1999, estimée à 2000$, s'est envolée pour 2,68$.