«Chaque semaine, je trouve toujours intéressants les cas que vous présentez dans Sous la loupe, nous écrit Ginette. Sauf que je constate que ce sont des cas de gens nantis. Je comprends que la clientèle de La Presse se trouve parmi ces gens mais il y a des exceptions, comme moi!»

Ginette a été forcée de déclarer faillite en 2003. «Quelques mois après, je me suis trouvé un travail et j'ai recommencé ma vie financière, raconte-t-elle. Ce n'est pas facile. Évidemment, je ne pense même pas à la retraite avant l'âge de 65... ou plutôt 67 ans, si la santé me le permet.»

 

Elle touche un salaire de 44 000$, plus une rente de conjoint survivant de la RRQ de 8300$ par année, qui constitue sa contribution annuelle à son REER.

«Aujourd'hui, à près de 57 ans et veuve, je me retrouve dans une situation qui aurait besoin d'un miracle. Et ça... je ne m'y attends pas.»

Mais ça ne l'empêche pas de rêver. «Suis-je trop âgée pour penser à m'acheter un appartement?» demande-t-elle. Elle prendrait la mise de fonds dans son REER de 33 000$, et consacrerait sa rente de conjoint survivant aux mensualités hypothécaires. «J'aurais moins de REER mais une valeur sur un condo que je pourrais revendre à ma retraite, observe-t-elle. Quelle situation est la meilleure?»

Un budget serré, trop peut-être

À 67 ans, Ginette toucherait une rente de retraite de son employeur d'environ 5000$ par année. Avec sa rente de la RRQ, celle de conjoint survivant et la pension de la sécurité de la vieillesse, ses revenus avant impôt totaliseraient 25 000$, évalue la planificatrice Louise Belliard, de RBC Groupe financier.

Ginette voulait savoir où sa discipline actuelle d'épargne la mènerait, si sa retraite durait 20 ans.

Si elle continue à déposer la rente de conjoint survivant dans son REER jusqu'à 67 ans, elle aura alors accumulé 157 000$, sous l'effet d'un prudent rendement de 4%.

En considérant une inflation de 3%, un rendement de 4% et un taux d'imposition de 20%, les calculs de notre planificatrice montrent que Ginette pourrait en tirer un revenu annuel après impôt de 6692$ jusqu'à 87 ans.

Passons au second scénario. Ginette occupe actuellement un petit logement et rêve d'un quatre-pièces. Pour fins de comparaison, Mme Belliard lui a demandé quel loyer elle se sentirait à l'aise de payer pour un tel appartement. Elle a répondu 800$ par mois.

Ginette pense pouvoir dénicher un appartement en copropriété de quatre pièces pour 145 000$. La planificatrice a donc fait ses calculs sur cette base.

En vertu du programme d'accession à la propriété (RAP), Ginette retirerait 25 000$ de son REER pour verser une mise de fonds de 20 000$, et conserverait 5000$ pour les frais divers. Pour un condo de 145 000$, elle devrait contracter une hypothèque de 127 500$, assurance prêt incluse.

Avec l'assurance vie et invalidité - «plus on avance en âge, plus le risque est élevé», rappelle la planificatrice -, Ginette devrait donc verser une mensualité de 838$ pour un prêt amorti sur 25 ans. Mme Belliard prévoit un supplément de 235$ par mois pour l'impôt foncier et les charges de copropriété. «Je la sentais très nerveuse d'avoir à assumer autant de frais», observe-t-elle.

L'inquiétude de Ginette était justifiée. «Sa capacité d'épargne serait très réduite, estime notre conseillère, car présentement son coût de vie net annuel est approximativement de 25 000$.»

La planificatrice lui a suggéré de réfléchir à l'idée d'un trois-pièces. «Elle est revenue avec le 4 1/2, en disant qu'elle pourrait peut-être l'acheter moins cher à cause de la conjoncture. J'ai senti qu'elle le voulait vraiment et je n'ai pas insisté.»

Moins de deux ans après l'achat, Ginette devra commencer à rembourser son RAP. Elle y consacrera 2500$ par année, soit 208$ par mois, si elle veut en avoir terminé au moment de sa retraite, à 67 ans.

Quand elle sera parvenue à la retraite, les revenus de Ginette ne seront plus suffisants pour payer ses mensualités hypothécaires et elle devra se départir de sa propriété. En supposant un accroissement de valeur de 2% par année, le condo vaudra alors quelque 170 000$. Compte tenu des frais de vente et de déménagement, elle empocherait un capital de 61 000$.

Ginette aurait alors terminé le remboursement de son RAP - dans la mesure où son budget lui permettrait de soutenir cette dépense annuelle de 2500$. Son REER, toujours sous l'effet d'un rendement de 4%, contiendrait alors environ 92 000$. Avec la vente de la copropriété, son pécule de retraite, à 67 ans, totaliserait donc 153 000$ - à peine moins que dans le premier scénario.

En apparence, les deux avenues mènent à la même destination.

En apparence. Dans le premier scénario, les contributions annuelles au REER procurent des remboursements d'impôt que Ginette consacre présentement à ses dépenses courantes. Ces remboursements feront défaut dans le scénario de la copropriété.

En effet, le budget de Ginette est un point critique et des incertitudes subsistent sur sa capacité à assumer un loyer de 800$, a fortiori une hypothèque. Avant de prendre une décision définitive, elle aurait avantage à visiter un service de consultation budgétaire, une ACEF, par exemple. «Tout dépend de ce qu'elle recherche», conclut Louise Belliard.

LES DONNÉES

Ginette, 57 ans

Revenu: 44 400$

Rente de conjoint survivant: 8300$

REER: 33 800$

Liquidités: 3100$

Dettes sur cartes de crédit: 3500$

«Ginette devra réduire ses dépenses. Mais en a-t-elle le goût à l'étape de vie où elle est rendue?»

Louise Belliard, planificatrice financière, RBC Groupe financier, succursale de la Place Ville-Marie.

 

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