La maison de monsieur Tsé-Tsé vient de gagner un grand prix au concours de design graphique Grafika 2009, dans la catégorie des emballages uniques. La petite poupée de coton écru est restée parfaitement stoïque devant l'honneur, mais Annie Lachapelle et Érica Perrot n'ont pas réprimé leur joie.

Érica Perrot fabrique à la main - et à la maison - des poupées de chiffon. Sa petite entreprise, Raplapla, fondée en 2005, compte plus de produits que d'employées: une agente à temps partiel, une couturière à temps quasi plein et une bonne douzaine de modèles de poupées hirsutes au visage traversé d'un large sourire comme un trait de crayon.

 

Les petits personnages, qui semblent tous surgir de dessins d'enfants, ont été esquissés par Érica Perrot. «À l'école d'arts appliqués, j'avais beaucoup de mal avec le cours de dessin, raconte-t-elle. J'ai eu un prof formidable qui m'a conseillé d'apprendre à utiliser mes défauts. Je me suis mise à m'inspirer des dessins naïfs des enfants.»

Monsieur Tsé-Tsé est un sympathique petit bonhomme au ventre moelleux bourré de fibres de polyester et aux oreilles torsadées. «Je l'ai dessiné pour les nouveau-nés, explique la créatrice. C'est la plus petite de mes poupées, la plus facile à manipuler, la plus légère.»

Fabriqué en coton biologique et équitable, monsieur Tsé-Tsé a des yeux et un sourire brodés, donc inamovibles. Il lui fallait un emballage qui le préserverait des tripotages en magasin. «Je voulais une image belle et unique, qui attirerait l'attention, dit Érica Perrot. Il y avait aussi un côté écolo qui m'importait dans le choix du carton.»

C'est ce qui l'a incitée à faire appel à l'Atelier Chinotto, dont elle avait vu quelques réalisations. Fondé en 2003 par la designer graphique Annie Lachapelle, le petit bureau favorise les matériaux écologiques et recyclés.

Annie Lachapelle et sa collègue Élise Eskanazi ont eu l'idée de transformer l'emballage jetable en maison permanente. Au fil des essais et des maquettes, elles l'ont muni d'un pignon et d'une large porte d'entrée. Les illustrations et la typographie ont été confiées à l'illustratrice Isabelle Arsenault. «On adore son style, qui fait enfantin, mais tout en raffinement, explique Annie Lachapelle. Pour moi, ça collait avec le style d'Érica.»

À l'extérieur, l'impression en blanc et brun laisse une large place au carton brut. Surprenant, alors que les emballages de jouets sont habituellement saturés de couleurs vives. Mais voilà: les nouveau-nés ne montreront pas la boîte du doigt au magasin. On s'adresse ici aux adultes. «Les poupées d'Érica sont des produits de qualité, sans clinquant, décrit Annie Lachapelle. On s'est inspirées de son travail.»

Autre paradoxe, c'est l'intérieur de la boîte, habituellement négligé, qui montre le plus d'exubérance. Ses parois sont tapissées d'illustrations couleur réalisées par Isabelle Arsenault. Sur l'étalage, une fois ouverte, elle sert de présentoir, maintient la poupée de chiffon debout et surprend le visiteur par sa... décoration intérieure.

C'est ce côté rafraîchissant qui a séduit le jury du concours, selon la rédactrice en chef de la revue Grafika, Mélanie Rudel-Tessier. «Il a trouvé le projet bien réalisé, à la fois délicat et vivant. Il a aussi aimé les illustrations d'Isabelle Arsenault.»

Les bébés, pour leur part, ont plébiscité son contenu.