Quand ils rentrent chez eux, au terme d'une saison dans les champs québécois, les travailleurs mexicains sont loin de se retrouver en vacances.

Miguel a un emploi en construction. «La vie de ma famille serait très difficile si je ne venais pas. J'ai gagné ici en 10 ans ce que j'aurais fait en plus de 20 ans là-bas», croit-il.

Les travailleurs envoient aussi la quasi-totalité de leur argent à leur famille. Les conditions de vie sont très difficiles dans leur pays et c'est par pure nécessité qu'ils viennent ici. «Un jour de salaire ici équivaut environ à une semaine au Mexique», calcule Fabien, qui travaille ici depuis deux ans, tout comme son grand-frère Fernando et le fils de ce dernier, Éulises.

Dans la roulotte, le soir venu, après une journée éreintante, les travailleurs parlent peu. La routine embarque. Repas, télévision, un brin de lavage et hop au lit vers 22h. Certains passent un coup de fil à leurs proches avec leur téléphone cellulaire. Ces derniers leur servent d'albums virtuels, dans lesquels sont archivées des photos de leur famille. Ils adorent les consulter et les partager, avec une fierté non dissimulée. «Avec l'argent que je gagne ici, j'ai pu envoyer ma plus vieille en médecine», se targue Enrique, fier comme un paon. Fabien, la jeune trentaine, montre des photos de sa princesse bouclée, flanquée de ses deux fils plus âgés en habits du dimanche, qui lui ressemblent comme deux gouttes d'eau.

Entre ces rares oasis de détente et de nostalgie, le travail prend toute la place. Une pénible épreuve d'endurance qui s'étire sur plus de six mois. Des journées de 12 à 14 heures et des semaines de travail étalées sur six jours. Au salaire minimum.

Mais la plupart ne demandent pas mieux. Ils sont ici pour travailler. Et ils sont servis. «Ici, je suis considéré comme pauvre, mais chez moi, j'ai de l'argent. Je suis le riche de la famille!», s'exclame Miguel.