Deux tout nouveaux romans s'attaquent à un sujet jusqu'ici quasi inexploité en littérature jeunesse: l'amour homosexuel, entre filles. En cette Journée de lutte contre l'homophobie, rencontre avec deux auteures d'une chick lit pour ados pas tout à fait comme les autres.

C'est l'histoire de Joëlle, amoureuse de sa meilleure amie au secondaire, Éliane. Dans le secret, elles vivent une relation intense, mais néanmoins archi compliquée.

 

Et puis, c'est l'histoire de Florence, qui n'a jamais eu de chum, et qui, en regardant Bonnie and Clyde, réalise qu'elle est attirée par... Bonnie. Ciel, est-ce possible, normal, pensable?

Deux romans: Zone floue, aux Éditions de la Paix, et La fille qui rêvait d'embrasser Bonnie Parker, aux Éditions du remue-ménage, qui pourraient passer pour de simples romans à l'eau de rose. Des romans comme il en existe des milliers d'autres. À un détail près: les héros sont en fait des héroïnes. Et l'histoire d'amour, c'est la leur.

«S'il existe déjà des romans sur cette thématique? Sûrement. Mais moi, je n'en connais pas, s'est félicité le président de Gai Écoute et de la fondation Émergence, Laurent McCutcheon, en apprenant l'existence de ces deux nouvelles publications québécoises. C'est très intéressant de voir qu'une nouvelle génération reprend le flambeau, dit-il, en faisant allusion au prix Lutte contre l'homophobie qu'il décerne justement aujourd'hui à Michel Tremblay. Car il est important que les jeunes, qui n'ont souvent que des modèles hétéros, puissent lire cette littérature-là. Avoir d'autres modèles.»

C'est d'ailleurs parce qu'elle aurait tellement aimé lire un ouvrage du genre à l'adolescence («pour me sentir moins extraterrestre!») que Julie Gosselin s'est lancée dans l'écriture de son tout premier roman: Zone floue. Et non seulement elle aborde un sujet sinon tabou, du moins toujours très délicat, mais elle plonge aussi avec une histoire carrément autobiographique. «Mon objectif, c'est que les jeunes qui vivent la même chose puissent s'identifier», dit-elle. Elle espère aussi que tous les autres pourront démystifier la chose, et que les parents concernés pourront «entreprendre un processus d'acceptation».

Dans son livre, l'héroïne de 15 ans vit sa relation dans le secret. Elle passe aussi beaucoup de temps à s'interroger sur son identité. D'où le titre, qui évoque ce flou identitaire et sexuel assez habituel à l'adolescence: «Est-ce qu'on est vraiment en amour, c'est juste elle, ou toutes les autres filles aussi?»

Mais l'auteure n'a pas voulu trop insister sur la dimension homosexuelle de l'histoire. «J'avais plutôt envie de montrer la beauté de l'amour, point. Parce que finalement, c'est une histoire d'amour, même si c'est un peu différent.» 

Le livre Zone Floue, de Julie Gosselin

De son côté, Isabelle Gagnon, qui signe La fille qui rêvait d'embrasser Bonnie Parker, a plutôt opté pour de la fiction pure, même si elle a puisé dans ses souvenirs d'adolescence pour écrire son roman.

«Il y a encore beaucoup de tentatives de suicide et de dépressions chez les jeunes qui se questionnent, dit-elle. Alors à la base, j'ai voulu écrire quelque chose pour ces jeunes-là et pour leurs parents.» L'intrigue aborde aussi le questionnement identitaire, la difficulté de s'accepter, de se faire accepter, en plus d'ajouter une note plus sombre au portrait: l'homophobie.

Le jeune frère de l'héroïne se fera en effet tabasser à l'école, pour avoir voulu défendre sa soeur. «J'ai voulu aborder ça parce que malheureusement, ce n'est pas tout rose. Il faut être fort. Moi, j'ai vraiment écrit pour encourager les jeunes à être forts, à garder la tête haute, quoi qu'il arrive. Parce que pour être soi-même, il faut aussi beaucoup de courage.»

Julie Gosselin, Zone floue, Éditions de la Paix, 195 p., 9,95$

Isabelle Gagnon, La fille qui rêvait d'embrasser Bonnie Parker, Les éditions du remue-ménage, 120 p., 12,95$ (en librairie demain) 

Le livre La fille qui rêvait d'embrasser Bonnie Parker