Pour admirer un espace d'exception

Pas de doute, le superbe espace de la brasserie française Henri, attenante au nouvel hôtel Birks et à la bijouterie du même nom, est à la hauteur des attentes et de la réputation de la luxueuse marque. Mais, dans l'assiette, malgré quelques bons coups, il manque une touche de magie pour que l'expérience complète soit qualifiée d'exceptionnelle.

Ouverte en novembre, Henri est une brasserie française dans le sens le plus classique du terme : nappes et chemises blanches, cadre élégant, mais qui reste assez décontracté pour qu'on s'y sente immédiatement à l'aise. Côté espace, le nouvel établissement qui jouxte la bijouterie Birks frappe dans le mille.

Ce qu'on souhaite à ce jeune établissement, et à la brigade dirigée par le chef Romain Abrivard (M.Mme, Les chefs !), c'est qu'il définisse davantage son identité en cuisine afin de briller autant que cet espace d'exception.

Des hauts et des bas

Au menu, on mise sur les plats traditionnels des grandes brasseries françaises, tout en les transportant ici et maintenant grâce à l'utilisation de produits canadiens et québécois.

La carte propose plusieurs classiques : le pâté en croûte, les poireaux vinaigrette ou la blanquette de veau, sans oublier un bar à cru d'où sortent huîtres, crevettes « cocktail » et luxuriants plateaux de fruits de mer.

On parcourt rapidement le menu en débutant avec des cocktails à la carte, présentés comme des spécialités de la maison. Si le Negroni de notre invité se révèle parfaitement balancé, on ne peut en dire autant du Sésame !, une variation autour du gin sour, où le sirop de sésame grillé annoncé sembler briller par son absence, tellement le goût astringent du citron prend le dessus. Décevant.

La soirée se poursuivra sur le même mode mi-figue, mi-raisin.

Le problème n'a rien à voir avec un manque de technique en cuisine ni avec la qualité des produits, tous exceptionnels. Il réside plutôt dans le choix de certaines combinaisons d'ingrédients, dans l'équilibre des saveurs et dans la précision de l'exécution.

En entrée, tout commence plutôt bien : le tartare de cerf, combiné à un millet croustillant et à des armillaires marinés qui ajoutent une touche d'acidité bienvenue, est délicieux, sauf que l'huile de sapin annoncée est trop subtile pour être détectée. Quant à l'entrée du jour, un thon hamachi fondant servi avec de fines lamelles de radis et de daïkon, elle est joliment relevée avec de l'huile au vadouvan, un mélange d'épices indien. Un plat assez simple, qui laisse la place aux produits.

En service principal, c'est plus mitigé. Notre demi-homard décortiqué offre une belle cuisson, mais est loin d'être mis en valeur par les accompagnements. Les fleurons de chou-fleur - blanchis, un peu ennuyants - et le sarrasin alourdissent la préparation, au goût plus près de la terre que de la mer. Le goût du vadouvan, apprécié en entrée, se perd dans cette composition disparate.

Quant à la pintade, que notre jeune serveuse, gentille mais très discrète, nous avait vantée, le plat est somme toute simple, et visuellement terne, avec son topinambour servi en deux façons - en purée et entier, blanchi et légèrement grillé - avec les poitrines grillées de la volaille. On cherche aussi dans l'assiette la sauce au foie gras et à la truffe. Et côté quantité, c'est un peu chiche !

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Homard vadouvan, servi avec chou-fleur et sarrasin et sa bisque

Des bijoux de desserts

Notre coup de coeur de la soirée : les desserts. Le chef pâtissier Grégory Torino fait preuve d'un réel talent et réussit à nous surprendre en réinventant certains classiques, dont le millefeuille, qui accueille entre ses délicates tranches croustillantes à souhait une ganache montée au chocolat blanc et au pamplemousse. Un très bel accord !

Le gâteau forêt-noire, déconstruit, est également un succès et mise sur l'exploration de textures et de saveurs franches, sans tomber dans l'excès de sucre, avec son sorbet aux griottes, son gâteau éponge au cacao, son gel griotte-vodka et sa délicate crème chantilly. Chapeau !

Notre verdict

On mange : De 10 $ à 23 $ pour les entrées ; de 27 $ à 53 $ pour les plats principaux ; de 9 $ à 13 $ pour les desserts. On peut s'en tirer avec une addition pas trop élevée ou y aller pour la totale, si on en a les moyens.

On boit : La carte des cocktails offre plusieurs options, des plus classiques aux plus originales, mais il faut surveiller la constance d'exécution. Côté vins, c'est très classique. Un peu d'exploration serait bienvenue.

On voit : Hauts plafonds et colonnes aux moulures ornées, bar en marbre et en laiton, banquettes de velours, parquet de bois en chevrons, magnifiques vitraux : l'endroit sait mettre en valeur le patrimoine d'origine du bâtiment, dans un décor où la tradition française côtoie la modernité.

On se sent : Un brin laissé à soi-même. Étant donné le lieu et le cadre, on se serait attendu à un service plus expérimenté, avec davantage de personnalité.

On aime : L'espace, les desserts, la qualité des produits.

On aime moins : Certaines combinaisons qui fonctionnent moins, un manque d'équilibre dans certaines préparations, des saveurs trop discrètes.

On y retourne ? Peut-être, surtout pour les desserts.

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PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Millefeuille pamplemousse