Geneviève Breton s’est lancée dans le projet d’avoir un enfant, seule, à 32 ans. À ce moment, elle aurait aimé avoir accès à toutes les informations et réflexions qu’elle a réunies dans son livre Solo, faire le choix de la soloparentalité. Sa fille, Raphaëlle, est née le 17 août 2022, « le plus beau jour de toute [sa] vie », écrit-elle. Entrevue.

Pourquoi ce livre sur la soloparentalité ?

C’est un livre que j’aurais aimé lire quand je me suis lancée dans le processus. Je trouve ça important de normaliser tous les types de familles, dont celui de la soloparentalité [où l’enfant n’a qu’un seul parent déclaré sur son acte de naissance] car il y en a de plus en plus. Il faut en parler, informer les gens et faire en sorte que ce ne soit plus un tabou. Récemment, j’étais en entrevue à la radio et il y avait des gens qui appelaient pour dire que c’était un choix égoïste, qu’un enfant avait besoin de deux parents, d’un papa et d’une maman. Ce genre de propos est dépassé. Il y a toutes sortes de familles aujourd’hui, homosexuelles, recomposées, monoparentales, c’est la réalité. Dans mon processus, j’ai consulté une psychologue qui m’a dit que des études démontrent que les enfants issus de familles soloparentales n’ont pas de problèmes de développement, qu’ils ont tellement été désirés qu’ils vont très bien.

Qu’est-ce qui est le plus difficile dans la soloparentalité ?

Le sommeil ! Je n’ai pas de répit. Il n’y a personne pour me proposer le week-end de pouvoir dormir et de m’occuper de mon bébé ! C’est difficile. Je dirais que sur le plan financier, il faut faire un budget, car il n’y a qu’un salaire et non deux. Il y a aussi toute la charge mentale, même si j’ai des amies qui sont en couple qui me disent qu’elles ont toute la charge mentale ! C’est important aussi de pouvoir compter sur du soutien, des amis, de la famille, moi, j’ai la chance d’avoir de l’aide de mes parents et de mes amies.

PHOTO JOSÉE LECOMPTE, FOURNIE PAR LES ÉDITIONS TRÉCARRÉ

Geneviève Breton, autrice de Solo, faire le choix de la soloparentalité

Est-ce important de faire le deuil de la famille nucléaire ?

Oui, je vois parfois des mères solos qui ne l’ont pas fait. Je vois la déception ou le sentiment d’échec à être mère solo, et c’est pour ça qu’il faut bien réfléchir avant de se lancer. La soloparentalité est un choix, mais il ne faut pas non plus regretter toute sa vie de ne pas avoir eu d’enfant parce qu’on n’a pas trouvé de partenaire. Il faut du courage, mais aussi un profond désir de devenir parent. Il n’y a rien de parfait dans la vie, j’ai une fille que j’aime plus que tout. La vie nous réserve des surprises. J’aurais aimé avoir la vie parfaite, le conjoint, la famille unie, la maison, mais je suis très heureuse aujourd’hui avec ma fille. Je n’ai pas rencontré l’homme de ma vie, ça arrivera peut-être, mais la priorité est ma fille.

Vous parlez dans le livre de votre recherche du donneur par l’entremise d’une banque de sperme.

Je voulais avoir un donneur qui me ressemble physiquement, pour que mon enfant puisse avoir des traits semblables aux miens. On peut choisir le donneur en fonction de la couleur des cheveux, des yeux, du poids, de la taille, du niveau de scolarité. Le fait qu’il ne soit pas porteur d’une maladie génétique aussi est important. Le donneur que j’ai choisi a une certaine ressemblance. J’ai des photos de lui quand il était petit, et adulte, il est américain, sportif, infirmier et vient d’une famille en santé. C’est un donneur à identité ouverte, ce qui était une condition essentielle pour moi, car ça veut dire qu’il consent à ce qu’on dévoile son identité et qu’il y aura la possibilité de le contacter lorsque ma fille aura 18 ans (par l’entremise de la clinique de fertilité).

Votre fille a des demi-frères et des demi-sœurs, car vous savez que le donneur a permis à d’autres familles d’avoir des enfants.

Je fais partie d’un groupe sur WhatApp de familles qui ont le même donneur que moi. Il y en a ailleurs au Canada, en Ontario, à Vancouver, aux États-Unis, en Australie, aussi. Il y a des mamans solos et des couples, certains enfants sont plus âgés, d’autres plus jeunes. Des familles se sont déjà rencontrées, un voyage est prévu en Australie, je n’y participerai pas, car c’est un trop long voyage, mais j’aimerais y participer dans quelques années.

Aborderez-vous la question avec votre fille, lui parlerez-vous de son donneur ?

Oui. Je lui expliquerai tout quand elle sera en âge de comprendre. Je lui dirai tout, je serai complètement honnête et transparente, et j’ai déjà des livres pour enfants sur le sujet.

Quels conseils donneriez-vous aux femmes ?

C’est important de bien se connaître. Je savais que d’être seule avec un enfant, ce serait difficile, mais je n’avais pas si peur que ça. J’avais vraiment une grande volonté de le faire. Il faut être bien entourée, il y a aussi des groupes de mamans solos sur Facebook qui apportent du soutien. On s’entraide, ça fait beaucoup de bien de ne pas se sentir seule et de pouvoir discuter avec des mères qui vivent la même chose que nous. Est-ce qu’on s’imagine avoir une vie sans enfant ou non ? C’est la grande question à laquelle il faut savoir répondre.

Solo, faire le choix de la soloparentalité

Solo, faire le choix de la soloparentalité

Éditions Trécarré

199 pages