Le Balnéa n'est pas d'abord un restaurant. Vous le connaissez. C'est un spa. Un lieu magique où se faire dorloter, en plein milieu de la campagne ondulante des Cantons-de-l'Est, à l'orée de Bromont. Bains vapeurs, saunas, enveloppements, massages... Vous voyez le style. On y va pour se relaxer, admirer la vue sur le lac, les feuilles multicolores en automne, respirer de l'air frais en été, se prélasser dans de l'eau brûlante, dehors, en plein hiver, pour narguer la bise...

La propriétaire, fondatrice et grande idéatrice des lieux, Stéphanie Émond, est toutefois aussi très amatrice de cuisine. Depuis quelques années, elle organise un événement-concours appelé «L'été des chefs» où elle invite des cuisiniers renommés - pensez Danny St-Pierre, Marc-André Jetté, Martin Juneau, etc. - à venir préparer des plats pour la clientèle du spa. Au départ, quand l'établissement a été lancé en 2005, on offrait quelques assiettes à un comptoir assez rudimentaire, mais, d'année en année, l'intérêt pour la gastronomie est ainsi devenu de plus en plus présent au sein du spa et depuis cette année, donc, il y a carrément un restaurant. Une table avec entrée libre, accessible même aux clients qui ne vont pas aux bains.

Le lieu est fort joli, décoré avec soin dans des tons chauds, avec du mobilier moderne sans être froid. Ici, quelques coussins permettent de se prélasser. Là, une cheminée lie l'atmosphère et partout, de grandes tables semblent inviter les convives au partage.

Le menu n'est pas très long et propose beaucoup de valeurs sûres. Il a été conçu par Hakim Chajar, l'un des participants de l'événement estival, qui s'est fait surtout connaître en finissant deuxième à la populaire émission Les Chefs! et qui a ensuite travaillé au Laurie Raphaël à Montréal.

Certaines assiettes sont très légères, avec beaucoup de légumes. Une salade de betteraves, pas exemple, classique, avec des pacanes grillées, des racines juste assez cuites, encore doucement résistantes sous la dent, quelques canneberges séchées qui apportent acidité et sucre, mais aussi collant... Des feuilles de roquette fraîches et poivrées. Des copeaux de fromage de chèvre. On ne réinvente pas la roue, mais cet agencement classique fonctionne.

La soupe aux won-ton de crevettes, dans un bouillon de miso, est aussi très digeste, légère. Quelques ravioles farcies de chair de crustacé, mais aussi de coriandre, le tout relevé avec un peu de gingembre. Là encore, on reste dans des accords éprouvés.

La salade rouleau de printemps déconstruite est aussi très aérienne. Quelques grosses crevettes, des juliennes de carottes, des courgettes passées à la mandoline et devenues presque des feuilles... Le tout ponctué de croustilles de pâtes de riz frites en morceaux... Le plat pourrait avoir plus de caractère, mais s'agence à la nature de l'expérience. On est au spa, n'est-ce pas?

Cela dit, il y a quelques plats plus costauds: soupe à l'oignon, sandwich de porc effiloché... Ce n'est pas parce qu'on va au spa qu'on doit plonger dans les restrictions. D'ailleurs, avec toutes les créations, on propose un vin, agencements mis au point par Élyse Lambert, sommelière médaillée et bien connue.

Notre préféré: la soupe de type dahl aux lentilles rouges et au lait de coco, sorte de curry légèrement relevé qui se mange à la louchée. C'est à la fois chaud, réconfortant, vitaminé et ensoleillé. Parfait pour une fin d'hiver.

Ce restaurant n'est pas un grand restaurant, mais il est plus qu'une cantine de spa. On préfèrerait des serviettes en tissu aux serviettes en papier, mais les verres de vin sont de qualité et il y a un soin dans le service et les présentations. Seule fausse note: les desserts, qui ont l'air sortis tout droit des années 90 avec leurs présentations maladroites et qui ne sont pas particulièrement frappants. Le dessert au chocolat cru, par exemple, décrit comme le «nirvana», est servi trop froid et n'a rien de sublime. Sorte de crème prise déposée sur un gâteau sans farine, il est lourd, sans charme et la fraise décorative a l'air d'avoir passé trop de temps dans le frigo. Même l'ado qui m'accompagnait, dévoreuse de chocolat, l'a abandonné au bout de deux bouchées. Le pudding aux fruits de la passion est un peu plus joyeux, mais là encore, il semble venu d'une autre époque et déçoit, surtout qu'en plus, on goûte un peu la rudesse de la fécule dans la préparation. Et dire qu'on nous promet un menu «inspiré du terroir»...

Bref, le salé est ici meilleur que le sucré. On ne fera pas un détour pour y aller, mais est-ce la peine de s'y arrêter après quelques heures dans les bains chauds? Sûrement. Et en ce moment, pour s'asseoir tout près du feu.

Balnéa

319, chemin du Lac Gale, Bromont 450-534-0604

> Prix: entrées entre 8$ et 15$, plats entre 18$ et 21$ et desserts

> Carte de vins: Des crus choisis minutieusement par la sommelière Élyse Lambert, qui propose aussi des agencements au verre avec les plats. Prix raisonnables.

> Atmosphère: Le restaurant est installé dans l'ancienne réception du spa. La décoration est à la fois moderne et chaleureuse, soignée. De grandes tables permettent de manger en groupe ou de partager un repas avec des inconnus. À la fois convivial et feutré. Et on s'entend parler.

> Service: Gentil, affairé, malgré quelques lenteurs.

(+) On peut maintenant aller au spa et manger un repas très agréable, dans un même lieu.

(-) La cuisine n'est pas aussi «wow» que le spa lui-même. Place à l'amélioration.

On y retourne? Au spa, c'est sûr. Et on prendra sûrement une bouchée et un verre de vin sur place.