L'annonce, mardi dernier, de l'exclusion de la lutte des Jeux de 2020 a eu l'effet d'un coup de semonce dans la «grande famille olympique». Si cette discipline millénaire pouvait se voir éjecter sans cérémonie, quel sport était à l'abri?

Le hasard a fait en sorte que le Comité international olympique (CIO) fasse cette annonce deux jours après le tournoi de Paris, où le judo, autre sport olympique, mettait à l'épreuve du feu une série de nouveaux règlements.

Le judo est depuis cinq ans l'objet d'une profonde remise en question. L'objectif? Améliorer le spectacle et fouetter la popularité du sport. Ce travail entamé en 2008 après les Jeux de Pékin n'est pas le fruit du hasard, mais plutôt un effort conscient pour éviter un sort similaire à celui de la lutte olympique. Devant des disciplines millionnaires comme le golf ou tape-à-l'oeil comme le wakeboard, le judo n'a pas dit son dernier mot.

«Je pense que la qualité du spectacle devrait être un objectif de tout sport. Au Québec, on en entend parler souvent avec le hockey où la qualité du spectacle n'est pas toujours présente, remarque l'entraîneur de l'équipe nationale de judo, Nicolas Gill. C'est toujours une préoccupation et je pense que le judo tente de trouver une solution.»

Après les Jeux de Pékin, le judo a ainsi tenté de faire le ménage dans son calendrier international pour attirer l'intérêt des télédiffuseurs, a introduit la reprise vidéo et limité les attaques aux jambes.

Puisque le judo présenté aux Jeux de Londres a été jugé décevant, les instances du sport en ont remis une couche. En décembre dernier, la Fédération internationale (FIJ) a aussi frappé d'interdiction le bris d'une prise à deux mains, a limité l'impact des pénalités en plus d'adopter une série de mesures destinées à rendre les combats plus excitants.

Comme un examen à l'école

Pour Nicolas Gill, il ne fait aucun doute que ces mesures visent à plaire au CIO et à répondre aux 39 critères qu'il utilise pour déterminer si un sport a sa place aux Jeux. Le CIO a d'ailleurs cité les critères de cette fameuse liste pour expliquer sa décision concernant la lutte.

«Le judo a travaillé fort. Je ne sais pas si tous les sports travaillent selon la grille d'évaluation du CIO, mais je pense que c'était sage pour le judo de le faire, croit Gill. C'est comme un examen à l'école, si tu réponds ce que le professeur souhaite te voir répondre, t'as plus de chance de passer que si t'en fais à ta tête.»

L'épineuse question est maintenant de savoir si les nouveautés mises en place par les autorités du judo parviendront à rehausser le niveau du spectacle. Le prestigieux tournoi de Paris, qui a eu lieu la fin de semaine du 9 février, n'a pas été concluant.

«S'il est bien trop tôt pour établir un bilan, le but de ces changements, obtenir un judo plus spectaculaire avec des combattants plus libérés, ne semble guère atteint», a ainsi commenté le magazine français L'Esprit du judo.

Le Québécois et médaillé olympique Antoine Valois-Fortier en a d'ailleurs fait les frais lorsqu'il a été disqualifié sur une attaque aux jambes qui lui semblait légale.

«L'objectif est noble, mais je ne suis pas sûr qu'ils utilisent les meilleurs moyens pour réaliser leur objectif», juge Nicols Gill.

La FIJ se donne jusqu'aux championnats du monde, l'été prochain au Brésil, pour décider de l'avenir de sa nouvelle réglementation. Mais avant tout, ces efforts mis de l'avant par l'un des sports les plus traditionalistes illustrent bien à quel point, en 2013, garder sa place aux Jeux n'est plus un jeu d'enfants.