Presque trois ans après ses trois seuls départs en Coupe du monde, Justine Clément n’espérait plus ce courriel. Celui où Canada Alpin l’inviterait à porter les couleurs du pays sur le Cirque blanc.

Au début du mois, elle se préparait doucement pour sa quatrième saison avec les Catamounts de l’Université du Vermont (UVM) quand la gestionnaire des opérations des équipes alpines l’a prévenue : le Canada disposait de deux quotas supplémentaires pour la Coupe du monde de Tremblant, et elle était l’une des deux premières candidates pour en obtenir un.

« Je ne m’y attendais pas du tout ! », a dit en souriant Justine Clément, mardi midi, après un entraînement avec ses coéquipières au Sommet Saint-Sauveur. « Je suis vraiment contente, c’est une très belle occasion, mais je ne pensais pas que ça arriverait. »

Le produit du club de Stoneham sera l’une des six partantes de l’équipe canadienne pour les deux slaloms géants prévus à la montagne d’Erik Guay, samedi et dimanche. À 24 ans, elle sera la plus âgée après Valérie Grenier, l’une des favorites.

« L’an passé, je me suis plus concentrée sur mon ski universitaire. Je n’ai pas fait le circuit [de développement] Nor-Am. J’étais surprise parce que le classement Nor-Am a une grande importance pour l’équipe nationale. »

La native de Bécancour, près de Trois-Rivières, a cependant marqué des points – ou en a plutôt perdu, selon la logique du classement de la Fédération internationale de ski (FIS) – sur le circuit de la NCAA, remportant entre autres le slalom des championnats de la région de l’Est. Cette récolte lui a permis de maintenir une bonne position dans la liste des partants de la FIS.

Après cinq années avec l’équipe du Québec, Justine Clément s’est buté le nez aux portes de la formation canadienne à la fin de son parcours junior, en 2020. Elle a terminé 17e en slalom géant aux Championnats mondiaux, le 11 mars, date du début de la pandémie mondiale de COVID-19.

Si tu ne te fais pas prendre par l’équipe nationale et que tu veux continuer à skier, tu dois trouver une solution à un moment donné. Il y a de bons programmes dans les universités américaines.

Justine Clément

Elle s’est inspirée du cheminement de Laurence St-Germain, ex-coéquipière à Skibec Alpin, le club de développement élite de la région de Québec. La nouvelle championne mondiale de slalom a étudié quatre ans à UVM avant de réintégrer l’équipe nationale et de briller en Coupe du monde.

« Plus jeune, je la suivais et je trouvais que ça avait l’air le fun », a relaté Clément, manteau des Catamounts sur le dos. « Pour moi, ça a toujours été UVM. » Drôle de hasard, elle poursuit un baccalauréat en génie biomédical, soit le même champ d’études que St-Germain, désormais à la maîtrise à Polytechnique Montréal.

En novembre 2020, Justine Clément a remporté l’or en slalom et l’argent en géant aux championnats nationaux reportés. Ces résultats lui ont valu une participation à trois slaloms de Coupe du monde à la fin de l’année et au début de 2021.

Elle ignorait qu’elle devrait attendre près de trois ans avant de disputer d’autres courses sur le circuit, cette fois en géant. « Les choses ne se sont pas alignées nécessairement comme je voulais. Je me suis concentrée sur l’école et mon ski universitaire. »

Elle n’a pas de regrets et se félicite de son parcours scolaire et sportif. À titre de senior, elle amorcera sa quatrième saison à UVM. En raison de la pandémie, elle est admissible à une cinquième année, si bien qu’elle prévoit d’obtenir son diplôme en 2025.

Comme elle n’est pas membre de l’équipe canadienne, Justine Clément n’a pas skié de l’été, occupant son temps à s’entraîner et à travailler à Brunelle ski vélo, une boutique de Trois-Rivières. Elle tempère donc ses attentes pour ce week-end, d’autant qu’elle s’élancera en fond de grille, sur un parcours bien entamé.

« Ce sera une belle expérience pour les prochaines saisons. Je veux mettre ça dans mon bagage pour continuer mon chemin. Je ne veux pas nécessairement me fixer un objectif pour ces courses-là, me dire que je dois me qualifier [pour la seconde manche] et blablabla. Je n’ai pas fait beaucoup de ski. Je suis retournée sur la neige il y a une semaine ! Je veux juste relaxer, faire ce que je sais faire, et ça devrait bien aller. »

Chez les cowboys

Une autre Justine, Lamontagne celle-là, aura sensiblement plus de journées de ski dans les jambes au moment de s’élancer à Tremblant. Ex-collègue de son homonyme à l’équipe du Québec, elle s’apprête pour sa part à disputer une deuxième campagne avec les Bobcats de l’Université d’État du Montana.

En septembre, la skieuse de 21 ans s’est envolée pour l’Argentine pour un stage sur neige de trois semaines avec Orsatus Ski Racing, une structure d’entraînement privée française. Au début du mois, elle a reçu une invitation inattendue pour s’aligner aux deux premiers slaloms de la Coupe du monde, à Levi, en Finlande. Chaque fois, elle s’est rendue en bas à la première manche, sans pour autant faire la coupe pour la seconde, réservée aux 30 premières.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Justine Lamontagne

À son retour, elle a effectué un camp avec les Bobcats à Panorama, en Colombie-Britannique. Elle a ensuite pris la direction de Killington, au Vermont, où elle a disputé un troisième slalom, dimanche. Elle est sortie du tracé à mi-chemin de la manche initiale.

« La surface était très, très, très glacée. À cause de ça, le parcours est resté beau malgré mon dossard [64]. Je suis partie avec un plan, j’ai fait mon ski en haut et j’ai fait une petite erreur après. Sur une surface comme ça, ça ne pardonne vraiment pas. »

À ses premiers Championnats du monde juniors, à Panorama en 2022, Justine Lamontagne a frappé un grand coup en remportant l’or à l’épreuve parallèle mixte avec Cassidy Gray, qu’elle retrouvera à Tremblant, Étienne Mazzelier et Raphaël Lessard. Ce succès lui a ouvert la porte de l’Université d’État du Montana, où elle étudie en génie environnemental. Au printemps, elle a récompensé son programme en remportant le bronze en géant aux championnats de la NCAA.

Après une première année en résidence, la représentante du club Mont-Sainte-Anne partage maintenant une maison avec quatre collègues à Bozeman, là où la populaire série Yellowstone, mettant en vedette Kevin Costner, est tournée en partie. Elle skie principalement à Bridger Bowl, à 20 minutes de route, et à Big Sky, plus vaste station en Amérique du Nord avec Park City.

« C’est un peu cowboy, mais c’est très ski bum là-bas, une ville de skieurs. C’est vraiment cool ! Un des défis était de parler et d’étudier en anglais. Mais c’est dans les montagnes, ce n’est pas trop dépaysant. »

Justine Lamontagne a grandi à Saint-Ferréol-les-Neiges, où elle vit toujours pendant l’été. Elle a fait quelques séances d’entraînement chez sa célèbre concitoyenne Laurence St-Germain, avec qui elle partage le même préparateur physique, Charles Castonguay. Ce dernier a aussi contribué aux succès d’Alex Harvey, un autre champion mondial.

Au tour des deux Justine de tracer leur propre chemin, à commencer par cette fin de semaine, à Mont-Tremblant, en compagnie des meilleures skieuses de la planète.