De bons coups, il y en a eu. De moins bons, aussi. Mais ce que Gabriel Gervais retient après une année en poste, c’est que le CF Montréal « a accompli de belles choses ».

Le président du club a connu des défis, des apprentissages, mais a surtout été en mesure d’apporter une progression après une première année en poste, explique-t-il à La Presse au cours d’une entrevue d’une trentaine de minutes dans les hauteurs du Centre Nutrilait.

Installé autour d’une opulente table ronde dans la salle de conférence au sommet de l’ancienne caserne Letourneux – où nous sommes entourés de pièces de collection comme un maillot porté par Paolo Maldini –, Gervais relate ses aventures. Quand il se place là où il était le 28 mars 2022, il est « très fier » du chemin parcouru.

« Quand je suis arrivé, il y avait plusieurs questions sur l’identité du club, le nom du club et il y avait les supporters de la section 132 qui refusaient de revenir au stade. Il y avait plusieurs choses. Je voulais clarifier les valeurs du club, la mission et la vision qu’on veut mettre de l’avant, et ce sont des choses qu’on a clarifiées en partant. On a voulu reconnecter avec nos partisans, notre communauté et remplir le stade, chose qui a été faite en deuxième moitié de saison », souligne-t-il.

Il note ses deux plus grandes fiertés : avoir vu le stade Saputo plein à craquer pour la deuxième moitié de saison et avoir pu compter sur six représentants du CF Montréal à la Coupe du monde. En revanche, il reconnaît certains accrocs.

Parmi ceux-ci, il y a eu le feuilleton de l’embauche de Sandro Grande comme entraîneur-chef de l’équipe réserve, dont un tweet concernant l’attentat du Métropolis en 2012 a refait surface après la nomination. Ensuite, il y a eu le lancement – ou plutôt le lancement encore attendu – du maillot à domicile pour la saison 2023. Gervais a fait retirer une inscription en langue autochtone puisque « la démarche de consultation auprès des communautés autochtones était toujours en cours », avait-il expliqué à ce moment.

On apprend chaque jour. Je n’ai pas eu de cours qui expliquait comment devenir président. Tu te développes dans ce rôle-là, tu apprends. Tu gagnes dans l’expérience au fur et à mesure.

Gabriel Gervais, président du CF Montréal

« Avec le recul, on aurait pris certaines décisions différemment, mais c’est facile à dire par après, lance Gervais. [...] La chose la plus importante dans tout ça, c’est de toujours démontrer de l’empathie, de marcher dans les souliers des autres. Maintenant on est beaucoup plus sensibles à ça. On a aussi mis en place un processus pour être certains que les décisions qu’on prend ne causent pas de tort à la communauté, à des gens personnellement ou au club. »

Gervais ne laisse toutefois pas ces évènements trop ternir son évaluation. Il se concentre sur les succès, comme les prestations de son club lors de la saison 2022. Après avoir abattu quelques records de la MLS, le CFM a terminé au troisième échelon du circuit Garber. À terme, ces honneurs ont mené à la vente de trois joueurs du club – Ismaël Koné, Djordje Mihailovic et Alistair Johnston – à des clubs européens. « Une grande fierté », dit-il.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Gabriel Gervais

Mieux vendre le club et son projet sportif

Cette fierté d’avoir conclu la saison avec des ventes n’est pas encore tout à fait partagée par certains partisans, admet Gervais.

La philosophie du club depuis l’entrée en poste d’Olivier Renard comme vice-président et chef de la direction sportive est assez simple : miser sur un mélange de jeunes joueurs, possiblement venant de l’Académie, et de vétérans, tout en privilégiant un style de jeu axé sur la possession du ballon.

Et si lesdits jeunes ont su taper dans l’œil de certains clubs européens, ils ne seront pas retenus. De son côté, le Bleu-blanc-noir engrange des profits, une bonne nouvelle pour une équipe déficitaire, et ainsi les joueurs « réalisent leur rêve » en prenant la direction du Vieux Continent.

Sauf qu’au passage, il y a ce divorce, cette séparation avec un joueur qui a été adulé par les supporters. Le maillot floqué à son nom devient alors désuet. Une réalité qui n’est pas familière au partisan montréalais.

« On a constamment une responsabilité d’expliquer le projet, de rappeler le projet qu’on veut mettre en place, affirme Gervais. Si nous étions en Europe et qu’on expliquait ce projet, c’est plus dans leur ADN où le soccer est le premier sport. C’est commun que certains clubs priorisent davantage une philosophie de développement de joueurs.

« Mais l’ambition demeure. On l’a montré l’an dernier et ce fut une belle preuve qu’avec une belle équipe, qui joue du beau soccer, tissée très serré, où il y a de la place pour les jeunes et les vétérans, on peut faire de belles choses. C’était très encourageant. On n’avait pas de grande étoile. On est ici pour bâtir une équipe avant tout. »

Oui, si on a une occasion d’aller chercher une étoile qui peut bien s’intégrer avec le club et avec la philosophie du développement des jeunes, on va le faire. Mais pour l’instant, l’idée qu’on veut mettre de l’avant, c’est de bâtir une équipe solide.

Gabriel Gervais, président du CF Montréal

Justement. Promouvoir cette idée de collectif, mais faire en sorte que lorsque l’un des joueurs part, les partisans soient habités par la même fierté dont parlait Gervais, et non une forme de désenchantement. Comment compte-t-il s’y prendre ?

« C’est à nous de raconter certaines histoires comme celle d’Ismaël, de Djordje et d’Alistair pour savoir ce qu’ils sont devenus. Il faut toucher les partisans. On a un travail à faire de ce côté-là. Je pense que si on performe sur le terrain, le projet va mieux passer, mais on a encore du travail à faire », affirme Gervais.

S’il y a une chose que l’histoire nous a apprise, c’est que la victoire et les bonnes performances sont une panacée.

Les trois piliers du CF Montréal

Le président du CF Montréal explique que la stratégie à court et à moyen terme est axée sur trois piliers.

Le premier est basé sur la philosophie sportive d’Olivier Renard. Celle de développer et de vendre des joueurs « tout en restant compétitif ».

Le deuxième, c’est d’être au niveau des standards de la MLS. Le club montréalais veut être au moins dans la moyenne pour les détenteurs d’abonnements de saison, la moyenne de partisans par match, les revenus qu’il peut tirer de partenariats et le nombre d’abonnés sur la MLS Season Pass d’Apple TV dans la région. Tous ces objectifs visent à offrir un plus grand équilibre sur le plan financier.

Finalement, le troisième et ultime pilier, c’est d’assurer l’avenir du club. Autant dans l’organisation avec les gens qui y travaillent qu’en ce qui a trait aux infrastructures, notamment le stade Saputo, qui pourrait être rénové. Gervais ajoute que ce volet inclut aussi la Fondation Impact de Montréal, le projet d’un volet féminin à l’Académie et les partenariats à long terme, basés sur Québec inc.