Au fond, c’est un peu le hockey qui gagne.

Il était assez déconcertant de penser qu’un balayage se profilait entre deux équipes qui ont terminé au premier et au troisième rang du classement général. Non pas que les Hurricanes de la Caroline aient mal joué, mais tout semblait sourire aux Rangers de New York en début de série.

Les balais sont désormais de retour dans le placard. Après avoir gagné de justesse le quatrième match, les Hurricanes ont signé une victoire bien plus convaincante de 4-1, lundi, provoquant la tenue d’un sixième affrontement jeudi à Raleigh.

C’est encore du jeu de grande qualité qui s’est déroulé sur la glace du Madison Square Garden. Des actions défensives superbes, des attaques dynamiques, des gardiens alertes. Insistons : le hockey a déjà gagné cette série.

Si les Hurricanes ne sont pas déjà en vacances, c’est toutefois parce qu’ils sont revenus à ce qu’ils font de mieux : garder leur calme.

Lors des deuxième et troisième matchs, ils ont inondé de tirs le filet défendu par Igor Shesterkin. Un coup d’œil aux chances de marquer dangereuses confirmait toutefois qu’on privilégiait largement la quantité à la qualité. Au cours des deux dernières joutes, les hommes de Rod Brind’Amour ont retrouvé leurs moyens et réussi à se distancer de leur adversaire.

Lundi, ce n’est pas arrivé dès le départ. Les Rangers, galvanisés à l’idée de mettre un terme à la série devant leurs partisans, ont eu le dessus en première période et se sont même donné l’avance 1-0 en deuxième.

Or, les visiteurs, insistons, ont été patients. Malgré l’urgence du moment, on gardait le cap, même si les occasions ne se transformaient pas en buts. À défaut de marquer, on rendait un travail soigné en zone défensive.

Puis, au dernier tiers, tout s’est mis en place. Le capitaine Jordan Staal a égalisé grâce à un effort individuel sublime. Evgeny Kuznetsov a marqué ce qui allait devenir le but gagnant à la suite d’une contre-attaque rendue possible par un arrêt névralgique du gardien Frederik Andersen. Et un cafouillage de Jacob Trouba derrière son filet a mené au but d’assurance de Jordan Martinook. Fin des programmes.

PHOTO BRAD PENNER, USA TODAY SPORTS

Evgeny Kuznetsov (92) battant le gardien Igor Shesterkin (31)

Par cette démonstration, les Hurricanes ont retrouvé leur signature. En saison, les deux clubs ont certes terminé tout près au classement général, mais le fait est que les anciens Whalers de Hartford ont connu une bien meilleure campagne à cinq contre cinq.

Sur le plan des buts marqués et accordés, les Rangers n’ont fini qu’avec un différentiel de +1 ; les Hurricanes étaient plutôt à +23, et ce, malgré les déboires de leurs gardiens en première moitié de calendrier. Les Canes ont aussi été parmi les meilleurs en matière de possession de la rondelle et de chances de marquer. Les New-Yorkais, en contrepartie, se sont davantage appuyés sur leurs gardiens de but et leurs unités spéciales pour connaître du succès.

Après avoir explosé avec quatre buts au cours des deux premiers matchs de la présente série, l’avantage numérique des Rangers vient d’être blanchi trois fois de suite, y compris lundi.

L’attaque à cinq des Hurricanes ne fait pas mieux, mais quand les unités spéciales se taisent, on peut présumer que c’est la meilleure équipe à cinq contre cinq qui prévaudra. Dans le cas qui nous occupe, ce sont les joueurs en rouge et blanc.

Andersen quasi parfait

On fait rarement tout un plat de la performance d’un gardien qui n’a reçu que 21 tirs, mais parlons néanmoins de Frederik Andersen, qui a connu l’un de ses meilleurs matchs des séries jusqu’ici.

PHOTO ADAM HUNGER, ASSOCIATED PRESS

Barclay Goodrow (21) devant le gardien Frederik Andersen

En carrière, le vétéran présente un étrange bilan en séries éliminatoires. En 2015, avec les Ducks d’Anaheim, il est passé à une victoire de la finale de la Coupe Stanley. Puis, en cinq saisons dans l’uniforme des Maple Leafs de Toronto, de 2016 à 2021, il n’a jamais passé le premier tour.

À Raleigh, depuis 2021, un mélange de blessures et d’effondrements collectifs – la saison dernière, par exemple – a limité son nombre de départs en séries. Si bien qu’à 34 ans, et alors que le jeune Pyotr Kochetkov émerge comme le gardien d’avenir de l’organisation, Andersen se voit peut-être accorder sa dernière chance d’amener son équipe jusqu’au bout.

Contre les Islanders de New York, et encore contre les Rangers, il a été tantôt extraordinaire, tantôt ordinaire. Il a même sauté son tour la semaine dernière. Lundi, toutefois, il a été presque parfait.

Une élimination rapide des Hurricanes au deuxième tour aurait pu avoir un effet sur le proche avenir de Frederik Andersen, mais aussi sur celui de l’effectif au complet, entraîneur compris : Rod Brind’Amour et 11 patineurs réguliers seront en effet sans contrat le 1er juillet prochain.

L’équipe avait donc besoin de son gardien, et le gardien, de son équipe. Tout ce beau monde a gardé son calme, conservé son essence, en somme. Et il y aura un sixième match.

On le répète chaque année : l’histoire n’est pas du côté des clubs qui se retrouvent en retard 0-3. Néanmoins, plus que quiconque, les Hurricanes de la Caroline sont en droit de garder espoir. S’il y a un club qui peut réaliser l’impensable, c’est bien lui.

Surtout s’il reste fidèle à lui-même.