« Dobeš. »

Jean-François Houle n’hésite pas une seconde : le joueur qui l’a le plus impressionné cette saison dans son développement avec le Rocket, c’est le gardien tchèque recrue.

Le nom de famille du geôlier sort des lèvres de l’entraîneur alors que le son de la question n’a pas même fini de rebondir sur les murs de la salle de conférence de la Place Bell. Les médias y ont été rassemblés pendant plus de trois heures, lors du bilan de l’équipe, dimanche matin.

« De la manière dont il a commencé, ça n’a pas été facile, ajoute rapidement Houle. Il a montré beaucoup de caractère pour se redresser. C’est la position la plus dure au hockey. Faire ce qu’il a fait, c’est quelque chose, sans farce. »

Jusqu’au 7 décembre, Jakub Dobeš a enregistré une fiche de 3-5-2, une moyenne de buts accordés de 4,51 et une efficacité de ,864.

Après 51 matchs, il a ramené sa moyenne à 2,93 et son taux d’efficacité à ,906, obtenant une fiche de 24-18-6.

PHOTO CHRISTINNE MUSCHI, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Après un début de saison difficile, Jakub Dobeš a su rebondir.

Houle attribue ici du mérite à son entraîneur des gardiens, Marco Marciano. C’est aussi à lui que se réfère le principal intéressé.

Le premier mois et demi n’a pas été très bon. J’étais une recrue dans une jeune équipe, et ça arrive. J’en parlais à Marco : je ne suis pas déçu que ce soit arrivé. J’en suis fier. C’était bien pour moi d’apprendre à travers cette période difficile. Ma carrière est encore très jeune. Je dois passer à travers ce processus.

Jakub Dobeš

Sa progression a également été remarquée par ses coéquipiers, notamment celui qui a été son colocataire au début de la saison : Logan Mailloux.

« Il est devenu l’un des meilleurs gardiens de la LAH à la fin de la saison », assure le défenseur, qui est rapidement devenu un de ses bons amis.

« Il va certainement jouer dans la LNH très bientôt », a estimé Lias Andersson.

De l’importance de saisons gagnantes

« J’étais une recrue dans une jeune équipe », disait Dobeš. Ces simples huit mots reflètent à eux seuls la réalité du Rocket de 2023-2024 et, en quelque sorte, celle d’évoluer dans la LAH.

Le mandat de Houle et de l’organisation du club-école du Canadien, une équipe en reconstruction qui plus est, consiste à développer les jeunes espoirs de l’organisation pour en faire des joueurs de la LNH.

En revanche, avec le succès que connaît l’équipe au chapitre de l’assistance à la Place Bell, il devient aussi primordial d’en faire une formation compétitive qui aspire à participer aux séries éliminatoires. Ce que le Rocket n’a pas réussi à faire cette saison.

« Je suis d’accord, c’est très important d’avoir des saisons gagnantes ici pour conserver nos partisans », répond l’entraîneur lorsqu’un confrère lui fait remarquer l’enjeu de cette dualité.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Brandon Gignac célèbre un but marqué lors d’un match le 29 mars.

« C’est important d’avoir un bon produit sur la patinoire, mais aussi de développer les jeunes en ayant de bons vétérans qui peuvent te faire gagner. C’est difficile de balancer les deux, parfois. Faut trouver le bon vétéran. »

Souvent, dans la LAH, tu as plusieurs vétérans qui pensent encore un peu à leur carrière. Ils ne sont pas dans l’âge où ils pensent à aider les jeunes. Ça peut faire mal.

Jean-François Houle

Sans nommer personne, il utilise l’exemple d’un joueur qui cherche à accumuler des minutes sur l’avantage numérique, et ne comprend pas pourquoi c’est plutôt la recrue qui obtient ce temps de jeu juteux.

« On est une ligue de développement. On veut faire des joueurs de la Ligue nationale. Le vétéran de 28, 30 ans n’est peut-être plus rendu là dans sa carrière. »

« On priorise les jeunes ici »

Nous allons ici citer Tobie Paquette-Bisson, mais pas parce que le chapeau lui fait. C’est, dans les faits, tout le contraire.

Nous en parlons plutôt parce qu’il a critiqué ouvertement l’organisation après la défaite qui a éliminé le Rocket, vendredi soir. Selon le journaliste de BPM Sports Anthony Marcotte, Paquette-Bisson a reproché aux hautes instances d’avoir priorisé le développement des jeunes joueurs en faisant jouer 10 recrues pour ce match crucial contre Belleville, alors que des vétérans en santé auraient pu contribuer au succès immédiat de l’équipe. Il ne blâme pas son entraîneur-chef ici, qui de toute façon n’a pas toujours le choix final des joueurs sur son banc.

Dimanche, le défenseur a révélé – en souriant – s’être fait « taper sur les doigts » depuis.

« Je vais faire attention à ce que je dis, souligne-t-il. C’est difficile de ne pas faire les séries. On a grindé toute l’année, les gars ensemble. Il faut qu’ils rentrent, les jeunes, on priorise les jeunes ici. Ce n’est rien contre eux, ils ont fait une super bonne job, ils ont été incroyables. Je parlais plus pour les gars qui ne jouaient pas. Je me sentais mal pour eux. Les [Arnaud] Durandeau, les [Olivier] Galipeau qui allaient super bien. »

Surtout qu’en soi, une qualification pour les séries aurait été une belle occasion de contribuer audit développement des espoirs.

« C’est plate » de ne pas avoir eu cette « expérience », concède Jean-François Houle.

Mais l’entraîneur rappelle que la séquence de matchs joués essentiellement depuis l’arrivée de David Reinbacher, il y a un mois, a permis de disputer du « hockey intense, important », ce qui a été « bénéfique » pour les « jeunes joueurs » de l’organisation.

Au-delà de la victoire, c’est surtout là-dessus que le travail des entraîneurs du Rocket sera jugé.

« Développer pour la LNH, c’est important pour l’organisation, rappelle à nouveau Houle. Mais développer dans la victoire, c’est pas mal plus facile, et c’est mieux que de développer dans la défaite. »